L’hommage de Marine Le Pen à De Gaulle sur l’Ile de Sein fait des vagues
Marine Le Pen doit se rendre jeudi sur l’île de Sein pour commémorer l’appel du 18 juin du général de Gaulle, pourtant longtemps combattu par son parti, une visite qui provoque l’indignation du maire et des habitants contraints d’abréger les célébrations prévues.
La présidente du Rassemblement national, accompagnée de parlementaires, vient sur cette île du Finistère y commémorer le 80e anniversaire de l’appel du général de Gaulle à combattre l’Allemagne nazie.
La dirigeante d’extrême droite, qui prononcera un discours devant le monument des Forces navales Françaises Libres de l’île, affirme que le RN est la « continuité » des idées du général de Gaulle sur l’indépendance et la souveraineté.
En 1940, plus d’une centaine de Sénans se sont rendus par bateaux, y compris de pêche, en Grande-Bretagne après avoir entendu le 22 juin l’appel de Londres puis appris l’ordre des Allemands sur le continent de se rendre. Ils y formeront les premières unités des Forces navales libres.
Le général de Gaulle est venu lui-même sur l’Ile de Sein leur rendre hommage en août 1946 puis en tant que président en septembre 1960 pour inaugurer le monument des FFL.
« On nous vole »
La venue de Marine Le Pen a perturbé la cérémonie officielle initialement prévue sur l’île, qui aura lieu le matin « en comité restreint », a regretté lundi le maire de Sein, Didier Fouquet (sans étiquette), alors que des célébrations plus larges devaient avoir lieu, selon lui, « toute la journée avec un bagad, une goélette de la marine et un certain nombre d’officiels ».
« On nous vole un peu la cérémonie », a-t-il déploré auprès de l’AFP, tandis qu’un autre hommage aura lieu, toujours selon lui, à la pointe continentale de Pen-Hir, haut-lieu de la Résistance sur la presqu’île de Crozon, en présence du préfet du département et du préfet maritime.
L’édile s’est dit « choqué » par le déplacement de Marine Le Pen, qui vise à « récupérer des images, des symboles », alors que le général de Gaulle a longtemps été détesté au FN (devenu RN), fondé en 1972 notamment par d’anciens collaborateurs et d’anciens partisans de l’Algérie française.
« Marine Le Pen, si elle débarque à l’île de Sein, ira toute seule avec son troupeau au monument », a assuré l’un des derniers pêcheurs de l’île et neveu de résistant, François Spinec, disant regretter « la récupération » politique de ce déplacement.
Des actions de protestation sont prévues sur l’île, qui compte 250 habitants, selon le maire. L’édile sera lui au Mont Valérien près de Paris, pour une cérémonie présidée par Emmanuel Macron. L’Ile de Sein fait partie des 5 communes compagnons de la Libération, avec Grenoble, Nantes, Paris, et Vassieux-en-Vercors.
La fédération du PCF du Finistère a appelé de son côté à protester jeudi matin à Audierne, où Marine Le Pen doit embarquer pour Sein. Son parti a discrètement réservé des places sur le bateau au nom d’une « cousinade Quintric », selon le maire.
« Résistance » à Macron
« Notre parti s’est construit sur le refus de l’abandon de l’Algérie française et ça reste évidemment une cicatrice », a admis Marine Le Pen dimanche sur LCI.
« Mais au-delà de cela, il y a une vision gaullienne de la France » et « tout ce que le général De Gaulle a fait pour que notre pays soit souverain, soit indépendant, soit puissant », a-t-elle salué.
Or la candidate déjà déclarée à la présidentielle de 2022 considère que cet héritage est « totalement détruit par Emmanuel Macron » et qu’il n’en « restera plus rien après lui si une résistance dans les esprits, une résistance politique » ne s’élève pas « contre cela ».
Richard Ferrand, président de l’Assemblée et proche d’Emmanuel Macron, a déclaré à l’AFP qu’il était « toujours utile de rendre hommage à l’appel du 18 juin » mais « rien n’est oublié, pas même les filiations politiques qui interdisent les tentatives de captation d’héritage ».
Le président socialiste de la région Bretagne, Loïg Chesnais-Girard, a qualifié la visite de Mme Le Pen de « provocation ».