Le ramadan débute, l’esprit de fête gâché dans les pays en guerre

De l’Arabie saoudite à l’Indonésie, plus d’un milliard de musulmans ont commencé lundi à célébrer le ramadan, qui s’annonce cette année encore éprouvant dans les pays en guerre comme la Syrie.

Depuis l’aube, de nombreux fidèles s’abstiennent de boire et de manger jusqu’à la tombée du jour, comme le préconise le Coran pour ce mois sacré de jeûne et de prière.

Le ramadan, l’un des cinq piliers de l’islam, a débuté dans la plupart des pays à majorité sunnite, à l’exception du Maroc, où il sera entamé mardi comme dans les pays chiites, notamment l’Iran.

Ce jeûne est conçu comme un effort spirituel et une lutte contre la séduction des plaisirs terrestres durant la journée. Mais une fois le soleil couché, à l’heure de la rupture quotidienne du jeûne, la fête débute avec des repas rassemblant familles et amis.

Cette année encore, Ahmad Aswad, 35 ans, n’aura pas cette chance à Alep, une ville syrienne soumise à des bombardements quotidiens.

"Ici il n’y a rien qui ressemble à de la joie. C’est le cinquième ramadan que je passe à l’ombre de la guerre", se lamente ce père de trois enfants qui réside dans un quartier contrôlé par les rebelles.

Outre les combats, c’est le manque de nourriture et la flambée des prix qui assombrissent le ramadan dans les villes syriennes assiégées, comme à Madaya, où une simple laitue coûte 7,000 livres syriennes (5 dollars).

"Il y a très peu de produits sur les marchés et quand on en trouve, ils sont tellement chers que nous ne pouvons pas les acheter", témoigne Moumina. Cette trentenaire est donc contrainte de préparer les repas avec les boîtes en conserve, "très fades", que parvient à faire entrer l’ONU à Madaya.

De toutes façons, le coeur n’y est pas pour Moumina, "triste" de passer ce ramadan "sans ses enfants et sa famille", qui ont fuit comme des millions de Syriens.

A Daraya, autre cité syrienne assiégée, "les tirs célébrant le ramadan ne s’arrêtent pas", remarque sarcastiquement Shadi Matar, un militant, selon lequel il faut faire preuve de courage pour sortir se mettre en quête de nourriture.

L’esprit n’est pas à la fête non plus pour les quelque 50.000 personnes prises au piège à Fallouja, la ville que tentent de reprendre les forces irakiennes au groupe jihadiste Etat islamique (EI).

"Vous devez vous lever à 05H00 et patienter pour acheter un kilo de tomates 5.000 dinars (plus de 3 dollars)", raconte Abou Mohammed al-Doulaimi, un père de six enfants contacté par téléphone.

A 2.000 kilomètres au sud, le Yéménite Abdallah Sarhane regrette aussi que, "pour la deuxième année consécutive, la guerre nous gâche le ramadan que nous avions l’habitude de vivre dans la joie et la quiétude".

Cet instituteur de 42 ans et sa famille risquent "la mort à tout moment" avec "les bombardements quasi-quotidiens" qui s’abattent sur Taëz, l’une des villes les plus affectées par la guerre au Yémen.

Les plus fastueux Iftars

Le contraste est saisissant avec les autres pays du Golfe, parmi les plus riches au monde, où hôtels et restaurants rivalisent pour offrir les plus fastueux "iftars", les repas de rupture du jeûne.

A Ryad, Dubaï ou Abou Dhabi, le ramadan reste le mois de la consommation et des excès par excellence, malgré les mesures d’austérité imposées par la chute des prix du pétrole ces derniers mois.

Ainsi, le luxueux hôtel Burj al-Arab offre "un assortiment de mets traditionnels délicieux" pour l’"iftar" à 400 dirhams (110 dollars) par personne.

Les plus démunis, dont les travailleurs étrangers notamment asiatiques, ne sont cependant pas oubliés: des "iftars" sont offerts par des agences caritatives, particulièrement actives durant le ramadan.

La ferveur est également de mise en Indonésie, le pays comptant le plus grand nombre de musulmans.

Ils pratiquent en grande majorité un islam modéré mais, dans certaines régions, des groupes conservateurs tentent d’imposer de strictes règles durant le ramadan, notamment la fermeture des bars et des lieux de distraction.

"Respectez le caractère sacré du ramadan. Nous ne sommes pas opposés aux loisirs, mais parfois ils penchent vers l’immoralité", a déclaré Jafar Shodiq, responsable du Front des défenseurs de l’islam, groupe coutumier des raids dans les lieux proposant de l’alcool.

Le débat sur la tolérance agite aussi la Tunisie, un pays où aucune loi n’interdit de manger ou de boire en public pendant le ramadan. Le Collectif pour les libertés individuelles, qui rassemble plusieurs ONG, a appelé les autorités à "garantir les libertés durant le ramadan" en ne fermant pas de restaurants ou de cafés.

De telles fermetures, "attentatoires à la liberté de conscience et de croyance", constitueraient "un reniement des valeurs du vivre-ensemble", selon le Collectif.

En 2015, quatre policiers avaient été limogés pour "abus de pouvoir" après être intervenus dans des cafés ouverts avant la rupture du jeûne.

(Source AFP)

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