Le Pakistan honore l’Arabie, qui plaide pour la désescalade avec l’Inde
L’Arabie saoudite a appelé lundi à la désescalade entre Inde et Pakistan sur la question du Cachemire, au moment où le prince héritier Mohammed ben Salmane s’apprête à se rendre d’Islamabad à New Delhi dans le cadre d’une tournée asiatique en quête d’alliés et de contrats.
Il doit s’envoler plus tard dans la journée pour l’Inde, où il rencontrera le Premier ministre Narendra Modi, et est attendu en Chine jeudi et vendredi.
Cette tournée intervient dans un contexte régional très tendu, marqué par des frictions avec l’Inde et l’Iran voisins, qui accusent tous deux le Pakistan de soutien à des groupes insurgés impliqués dans deux sanglants attentats-suicides commis la semaine dernière sur leurs territoires.
Le premier a coûté la vie à 27 membres des Gardiens de la Révolution le 13 février dans le Sistan-Baloutchistan, dans le sud-est de l’Iran. Téhéran a accusé "les forces de sécurité du Pakistan" de soutenir le groupe armé qui l’a commis.
Le second, revendiqué par un groupe islamiste basé au Pakistan, a tué 41 paramilitaires au Cachemire indien jeudi dernier. Lundi, au moins sept personnes ont par ailleurs péri au Cachemire indien dans une opération militaire en riposte à l’attentat.
L’Inde accuse de longue date le Pakistan de soutenir en sous-main les infiltrations et la rébellion armée, ce qu’Islamabad a toujours démenti.
Signe de tensions croissantes, Islamabad a annoncé lundi le rappel de son ambassadeur en Inde "pour consultations". L’Inde en avait pris une mesure similaire il y a quelques jours. Dimanche, Islamabad avait rejeté les "affirmations absurdes" de New Delhi et réaffirmé vouloir "une normalisation de ses relations avec l’Inde".
Le ministre d’Etat saoudien aux Affaires étrangères Adel al-Jubeir, qui accompagne MBS dans son voyage, a plaidé lundi matin pour la désescalade entre les deux capitales rivales.
"Pour ce qui est de la dispute entre l’Inde et le Pakistan, notre objectif est d’essayer de faire décroître les tensions entre les deux pays voisins et de voir s’il existe une voie pour résoudre ces différents pacifiquement", a-t-il déclaré.
Il a par ailleurs pris la défense du Pakistan face aux mises en cause de l’Iran, l’accusant d’être lui-même le "principal sponsor mondial du terrorisme".
Prince décoré
MBS pour sa part devait recevoir lundi des mains du président pakistanais Arif Alvi le Nishan-e-Pakistan (Ordre du Pakistan), la plus haute décoration civile du pays, a indiqué le ministère des Affaires étrangères.
Le prince, dont l’image internationale a été fortement ternie par le scandale provoqué par l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi en octobre dans l’enceinte du consulat saoudien à Istanbul, avait été accueilli dimanche soir par avec les honneurs à sa descente d’avion à Islamabad par le Premier ministre Imran Khan.
Les deux hommes avaient ensuite assisté à la signature de plusieurs protocoles d’accord entre leurs deux pays dans différents secteurs pour une valeur totale estimée à 20 milliards de dollars. Le Pakistan fait face à une grave crise de sa balance des paiements et compte beaucoup sur son vieil allié saoudien pour l’aider à sortir de l’ornière.
Pour les analystes, la tournée asiatique du prince, sa plus importante sortie sur la scène internationale depuis sa participation au sommet du G20 en Argentine en décembre, vise à assurer à l’Arabie une bonne position sur un marché régional en pleine croissance, ainsi qu’à démontrer à l’Occident qu’il a encore des alliés en dépit de l’affaire Kashoggi.
MBS a par ailleurs ordonné la "libération immédiate de 2.107 prisonniers pakistanais détenus dans les prisons saoudiennes", a indiqué le ministre de l’Information pakistanais Fawad Chaudhry sur Twitter.