Le monde du foot français grogne contre la « surtaxe » de François Hollande

L’idée du candidat socialiste à la présidentielle François Hollande de taxer à 75% la part des revenus supérieurs à un million d’euros par an suscite l’indignation du monde du football français, qui dit craindre la mort du championnat de Ligue 1.

La proposition de François Hollande concernerait environ 3.500 foyers fiscaux français, notamment les grands patrons, les stars du show-business et les sportifs de haut niveau, trois domaines où les rémunérations ont explosé ces dernières années .

Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football professionnel (LFP), déclare dans L’Equipe de jeudi qu’une telle mesure mettrait à mort le football français.

"Si cette proposition aboutit, le championnat de France serait relégué en deuxième division européenne. Ce projet d’hypertaxation, ce serait la mort du football français", dit-il.

Il estime que 120 à 150 joueurs sont concernés en France, le quart des effectifs de la Ligue 1, et redoute une fuite collective à l’étranger. "On a qu’à faire un impôt sur les portes et les fenêtres aussi", dit-il.

Le président de la LFP reprend un argument ancien du monde du football français, selon lequel le championnat serait déjà pénalisé par rapport à ses homologues d’Europe de l’ouest, du fait de charges sur les salaires selon lui très supérieures.

Les principaux dirigeants du football français bataillent depuis des années sur ce thème, tentant sans succès d’obtenir des mesures fiscales dérogatoires. Le gouvernement Fillon n’a non seulement pas suivi mais supprimé en 2009 une "niche" fiscale des footballeurs appelée "droit à l’image collectif".

François Hollande s’est défendu de vouloir viser en particulier les joueurs de football professionnels et a estimé que sa mesure ne concernerait qu’une petite partie d’entre eux.

"Pour les sportifs comme pour les artistes, il y a toujours la possibilité de lisser sur plusieurs années des revenus exceptionnels", a dit mercredi le candidat socialiste à RMC en marge d’une visite à Londres.

"C’est très important que des sportifs puissent participer à des matches et donner un haut niveau à des compétitions, notamment le Championnat de France mais en même temps, il faut aussi qu’il y ait une certaine retenue pour les rémunérations", a-t-il ajouté.

"Avec un million d’euros, je pense que je ça ne concerne pas beaucoup de joueurs qui pratiquent le football en France".

"UNE MESURE QUI VA NUIRE AUX TALENTS"

Michel Seydoux, président du club champion de France 2011, Lille, exprime un point de vue diamétralement opposé, estimant, comme Frédéric Thiriez, que la mesure préconisée par François Hollande serait fatale au football français de haut niveau.

"Au-delà du football, c’est une mesure qui va nuire aux talents en général, les gens brillants vont quitter le pays", dit-il dans un entretien accordé au Parisien.

"A terme, ce serait la mort du football hexagonal. Pourtant, il rapporte beaucoup à la France".

Pour l’instant, selon les classements officiels, le football professionnel rapporte de plus en plus aux joueurs, du fait, dans un premier temps, de l’explosion des droits télévisuels puis, plus récemment, de l’apparition de riches investisseurs comme un fonds d’investissement du Qatar qui a racheté en mai dernier le Paris Saint-Germain.

Selon un classement publié en fin d’année dernière dans la presse sportive, les dix meilleurs salaires de Ligue 1 dépassent désormais tous les 3,5 millions d’euros bruts annuels, avec une forte longueur d’avance pour le leader, l’Argentin du PSG Javier Pastore (5,8 millions d’euros), devant l’Anglais de Lille Joe Cole (4,8 millions) et le Lyonnais Yoann Gourcuff (4,4 millions).

Des joueurs plus anonymes comme le défenseur du PSG Christophe Jallet dépasseraient désormais les 100.000 euros mensuels, soit bien plus que ce que gagnait dans les années 1980 un Michel Platini, considéré pourtant comme le plus grand joueur français de tous les temps.

Christophe Jallet a d’ailleurs protesté lui aussi devant la presse mercredi contre le projet socialiste.

"Je pense que si un jour on est soumis à ce régime-là, on aura forcément un peu l’impression de travailler pour pas grand-chose (…) On a un peu l’impression que ceux qui ont la chance de réussir, on leur tire un peu dans les pattes", a-t-il dit.

Le championnat français reste très loin des standards anglais, allemands ou italiens où des salaires d’un million d’euros par mois se multiplient, du fait d’une puissance financière supérieure et de règles, jugées laxistes par l’UEFA, qui ont permis le surendettement des grands clubs.

Le Parti socialiste, confronté dans la campagne à des arguments similaires à ceux utilisés par le monde du football, répond qu’à ses yeux le fait que des millionnaires en euros payent davantage en temps de crise relève du "patriotisme".

Il fait remarquer par ailleurs que la mesure ne s’appliquerait qu’au-dessus d’un million d’euros, et qu’en-dessous s’appliquerait un nouveaux taux de 45%.

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