Le gouvernement palestinien démissionne sous l’effet des fractures intestines
Le Premier ministre palestinien Rami Hamdallah a remis mercredi la démission de son gouvernement d’union, devant la fracture grandissante entre la Cisjordanie et la bande de Gaza et le défi représenté par les discussions que le Hamas mènerait secrètement avec Israël.
Nimr Hamad, conseiller du président Mahmoud Abbas, a commencé par annoncer que "Hamdallah (avait) remis sa démission à Abbas qui lui a ordonné de former un nouveau gouvernement", avant d’être démenti par le porte-parole de la présidence Nabil Abou Roudeina.
M. Hamdallah a bien présenté sa démission à M. Abbas qui ne l’a ni acceptée, ni rejetée, a dit un responsable de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) sous le couvert de l’anonymat. En fait, l’avenir du gouvernement pourrait se décider lundi lors d’une réunion du comité exécutif de l’OLP, direction palestinienne collégiale et resserrée, a-t-il dit.
En attendant, le gouvernement reste en place et, même dans l’éventualité d’une démission, resterait en place jusqu’à ce qu’un nouveau gouvernement soit formé, a-t-il dit.
Ces développements sanctionnent la persistance des dissensions palestiniennes et l’incapacité d’agir du gouvernement d’union formé en 2014, précisément pour mettre fin aux divisions entre les deux principales formations palestiniennes, le Fatah laïque et modéré de M. Abbas, et le Hamas, le mouvement islamique aux commandes dans la bande de Gaza.
Ils ajoutent aux profondes incertitudes du moment.
Près de tomber depuis longtemps
Les perspectives de création prochaine d’un Etat palestinien ont rarement paru plus sombres. La réconciliation proclamée est restée un voeu pieux, la bande de Gaza est un "baril de poudre" selon les mots du chef de la diplomatie allemande et, sous la coupe du Hamas, l’enclave paraît s’éloigner toujours davantage politiquement de la Cisjordanie, dont elle est séparée physiquement par le territoire israélien.
L’OLP, dominée par le Fatah, et le Hamas s’étaient réconciliés en avril 2014 après des années de déchirements qui ont tourné à une quasi-guerre civile en 2007. Un gouvernement d’unité avait été constitué, composé de technocrates soutenus par le Fatah et le Hamas, peu avant la guerre de l’été dans la bande de Gaza.
En fait, ce gouvernement a toujours été incapable d’exercer son autorité dans la bande de Gaza, où le Hamas n’a donné aucun signe, malgré la réconciliation, de vouloir lui céder le pouvoir pris par la force en 2007.
Malgré le soutien de la communauté internationale, l’Autorité palestinienne, l’organe intérimaire créé en 1994 pour gouverner tous les territoires palestiniens, a dû se contenter de continuer à administrer la Cisjordanie.
Mises de côté pendant la guerre de juillet-août 2014, les querelles ont repris de plus belle après. A plusieurs reprises déjà, le gouvernement d’union a paru près de tomber.
Mais le président Abbas se serait surtout alarmé de contacts indirects que le Hamas, court-circuitant l’Autorité palestinienne, aurait avec l’ennemi israélien pour tenter de conclure une trêve durable dans la bande de Gaza.
Un gouvernement de politiques
Des contacts ont eu lieu grâce à des intermédiaires arabes et européens pour consolider le cessez-le-feu informel qui a mis fin à la guerre de 2014, ont indiqué mardi des sources au sein du Hamas.
Si l’Autorité accepte la possibilité d’un accord qui lui échapperait entre le Hamas et Israël, "c’est toute l’idée d’un Etat palestinien qui disparaît complètement", explique un responsable de l’OLP.
Les discussions internes aux Palestiniens ont mis en lumière la nécessité d’un gouvernement non plus de technocrates, mais de politiques, a-t-il ajouté.
Un tel gouvernement peut-il associer le Hamas? Ce dernier a dit officiellement refuser une dissolution à la seule instigation du président Abbas.
"Le Hamas rejette tout changement unilatéral de gouvernement sans le consentement de toutes les parties", a dit à l’AFP Sami Abou Zouhri, porte-parole du Hamas.
Au-delà des déclarations de principe, un haut responsable du Hamas, Ziad al-Zaza, a laissé une porte ouverte. Il a appelé le président Abbas à former un gouvernement plus politique, "avec tous les mouvements nationaux et islamiques pour faire face à l’occupation israélienne".
Le Hamas trouverait son intérêt à un tel gouvernement s’il lui permettait de devenir un interlocuteur acceptable pour la communauté internationale. Mais une grande partie de celle-ci refuse de traiter avec une organisation considérée comme terroriste par les Etats-Unis, l’Union européenne ou Israël.