Jean Paul Gaultier dit adieu aux défilés Haute Couture
L’icône de la mode Jean Paul Gaultier, qui en 50 ans a révolutionné les codes vestimentaires et est devenu l’un des symboles du luxe français, fera mercredi à Paris ses adieux aux défilés Haute Couture pour se lancer dans un « nouveau projet » avec sa maison.
« Le 22 janvier 2020, je fêterai mes 50 ans de carrière dans la mode avec un grand défilé-show Haute Couture, au Théâtre du Châtelet. Ce sera aussi mon dernier défilé », a indiqué vendredi le couturier dans un communiqué transmis à l’AFP.
« Mais rassurez-vous, la maison de Couture Gaultier Paris continue, avec un nouveau projet dont je suis l’instigateur et qui vous sera révélé prochainement », a-t-il ajouté, sans plus de précisions.
Cette annonce intervient en pleine Semaine de la mode parisienne, juste avant l’ouverture des défilés Haute Couture qui prendront à partir de lundi le relais des défilés homme.
Le créateur français de 67 ans, qui avait fait ses débuts notamment auprès de Pierre Cardin, est une figure incontournable dans le monde de la couture, connu pour avoir bousculé les codes vestimentaires dans les années 80 au point d’être qualifié d’iconoclaste.
Il est l’auteur de créations devenues cultes comme le bustier à bonnets coniques porté par Madonna, ou son célèbre pull marin et ses marinières, un souvenir de sa grand-mère « qui l’habillait en bleu ».
Depuis ses premières collections, Gaultier a l’art de mélanger les genres, les sexes, les époques, la gouaille des rues populaires et la distinction des beaux quartiers: rappeuses chic, geishas délurées, cocottes corsetées et mâles en jupe et talons hauts.
« Garde-robe ambivalente »
Il crée la révolution en étant l’un des premiers à faire défiler des mannequins seniors et des femmes en surpoids ou tatouées. Ainsi dans les années 1980, il passe une petite annonce dans le journal Libération: « Créateur non conforme cherche mannequins atypiques. Gueule cassées ne pas s’abstenir ».
Lors de la Semaine de la mode à Paris en juillet 2014, il invite à défiler la drag queen barbue Conchita Wurst, gagnante de l’Eurovision, ainsi qu’une femme enceinte dans une robe de mariée.
« Dès votre première collection en 1976, vous avez remis en cause les critères du goût et du mauvais goût. Vous avez choqué, dérangé et agacé en vous amusant à brouiller les pistes avec une garde-robe ambivalente et interchangeable », lui lançait Pierre Cardin en 2001 en lui remettant la Légion d’honneur.
Ce fils de comptable, qui a grandi à Arcueil (Val-de-Marne), près de Paris, et qui a été initié tout petit à la couture par sa grand-mère esthéticienne, crée ainsi des jupes pour hommes dès 1984 car pour lui, « un homme ne porte pas sa masculinité sur ses vêtements, sa virilité est dans sa tête ».
Considéré dans le passé comme « l’enfant terrible de la mode », son nom est devenu une vitrine du luxe français, grâce notamment à sa ligne de parfums lancée en 1991.
Il s’est aussi fait connaître par ses costumes marquants pour plusieurs films, notamment « le Cinquième élément » de Luc Besson et les films de Pedro Almodovar « Kika », « La Mauvaise éducation » ou « La Piel que habito ».
En 2003, son arrivée chez Hermès, jusque là temple officiel du luxe classique et discret, bouscule le milieu de la mode: il réussit à lui donner un sérieux coup de jeune en apportant fantaisie et fraîcheur, tout en restant dans ses codes.
Très pop culture, il joue son propre rôle dans le film « Prêt-à-Porter » de Robert Altman et avec Antoine de Caunes, il a animé l’émission britannique Eurotrash.
Il crée aussi des costumes pour de nombreux spectacles de danse dont le célèbre « Le Défilé » (1985) de la chorégraphe Régine Chopinot.
En 2018 il annonçait qu’il renonçait à la fourrure, un « geste fort » salué alors par les associations pour la protection des animaux, précisant à l’AFP qu’il préférait désormais la voie du recyclage. « Il faut recycler les vêtements, ce que j’ai fait depuis mes débuts, dans ma première collection j’ai recyclé des vieux jeans, des trucs en camouflage, je les ai coupés dans tous les sens. Je trouve qu’avec la fourrure on peut faire la même chose », disait celui qui avait raconté son parcours dans une revue haute en couleurs l’an dernier aux Folies Bergère.