Forum économique mondial pour l’Afrique: le continent veut faire sa révolution numérique
Généralisation des paiements par téléphones portables, utilisation de drones pour acheminer des vaccins: 1.200 entrepreneurs et décideurs vont se pencher à partir de mercredi à Kigali sur les opportunités de l’économie numérique pour l’Afrique, confrontée à un ralentissement de sa croissance.
Le rendez-vous a pour thème: "Connecter les ressources de l’Afrique à travers la transformation numérique". Il s’inscrit, selon ses organisateurs, dans le prolongement du Forum annuel de Davos en Suisse, lequel s’était penché en janvier sur la "Quatrième révolution industrielle", cette transition numérique de l’économie mondiale qui transforme en profondeur les sociétés.
"C’est l’occasion pour nous d’examiner ce que cela signifie dans le contexte de l’Afrique, avec ses opportunités et ses défis", a déclaré Elsie S. Kanza, directrice Afrique du Forum économique mondial, lors d’un point presse à Nairobi au Kenya. "La question clé ici est: quelles sont les industries nouvelles qui peuvent être créées par les Africains ?", a-t-elle lancé.
Plus de 1.200 participants, entrepreneurs, décideurs ou représentants de la société civile issus de 70 pays aborderont des thèmes comme l’apport des nouvelles technologies dans l’agriculture ou la santé, ou encore comment lutter contre la cybercriminalité qui n’épargne pas le continent.
Dix chefs d’Etat ou de gouvernements africains sont aussi attendus dans la capitale rwandaise. Ce petit pays d’Afrique centrale est encore à majorité rurale, mais il a mis le développement des nouvelles technologies au coeur de sa stratégie de croissance.
Vingt-deux ans après le génocide de 1994 qui a laissé le pays exsangue, le Rwanda affiche une croissance robuste qui devrait se maintenir autour de 6,8% en 2016, un taux largement au dessus de la moyenne continentale.
Ce forum intervient en effet dans un contexte de ralentissement de la croissance en Afrique subsaharienne, frappée de plein fouet par la chute des cours des matières premières. Selon les prévisions, elle devrait s’établir autour de 3% en 2016, un chiffre deux fois plus faible que pendant les années 2000.
Parmi les pays les plus touchés, se trouvent les pays producteurs de pétrole comme le Nigeria et l’Angola, ou de minerais tels que la Zambie et la République démocratique du Congo (RDC).
"S’il y a quelque chose que la baisse des cours montre, c’est que l’Afrique a le plus grand besoin de transformer ses 54 marchés en axant sur l’industrialisation", estime Natznet Tesfay, analyste spécialiste de l’Afrique subsaharienne chez IHS Country Risk.
"Je crois qu’il y aura une période d’ajustement, beaucoup d’investisseurs venaient en Afrique pour les matières premières. Ce changement de cap aura aussi comme conséquence la nécessité de mettre en place d’autres industries compétitives", ajoute Roger Nord, directeur adjoint du département Afrique du FMI.
Certains ont déjà entamé cette diversification, comme la Côte d’Ivoire, le premier producteur mondial de cacao qui vient, par exemple, d’inaugurer sa première usine de transformation de "l’or brun".
Mais les défis restent nombreux reconnaissent les spécialistes pointant du doigt notamment le déficit en terme d’infrastructures dans le domaine de l’énergie, auquel font face de nombreux pays.
"Vous ne pouvez pas devenir un centre névralgique des nouvelles technologies sans fibre optique. Mais vous ne pouvez pas non plus le devenir sans approvisionnement suffisant en électricité", prévient Mme Tesfay.