Espagne: polémique autour de la décision d’un juge de maintenir la justice universelle en contradiction avec une nouvelle loi

Un juge espagnol s’est attiré de nombreuses critiques en décidant de poursuivre l’enquête sur la mort d’un caméraman espagnol, tué en Irak en 2003, en contradiction avec la nouvelle loi limitant le principe de la justice universelle.

Le juge Santiago Pedraz avait annoncé lundi qu’il refusait de classer le dossier concernant la mort du caméraman José Couso, tué par un obus américain tombé en 2003 sur l’hôtel Palestine de Bagdad.

Le magistrat avait considéré que la nouvelle loi était contraire aux Conventions de Genève, qui obligent, lors d’un conflit armé, à enquêter sur un crime quelle que soit la nationalité de ses auteurs et où qu’ils se trouvent.

Mercredi, l’association d’extrême droite Manos Limpias a porté plainte contre le juge pour avoir "consciemment agi à l’encontre de la loi".

Le Parquet a lui déposé un recours, estimant que le magistrat avait outrepassé ses compétences.

Le 27 février, les députés ont voté une loi, proposée par la droite au pouvoir, restreignant le principe de justice universelle, qui permet aux tribunaux espagnols d’enquêter sur des faits commis à l’étranger et a généré des tensions diplomatiques, récemment avec la Chine et dans le passé avec d’autres pays dont Israël.

C’est au nom de ce concept que la justice espagnole a fait arrêter en 1998 l’ancien dictateur chilien Augusto Pinochet. Elle a ouvert des enquêtes notamment sur les dictatures latino-américaines mais presque aucune d’elles n’a jamais abouti. Douze de ces enquêtes sont néanmoins en cours.

La nouvelle loi limite les cas dans lesquels un juge peut enquêter sur des faits commis hors d’Espagne.

Le texte était arrivé au Parlement peu après que, le 10 février, un juge espagnol eut émis un mandat d’arrêt international contre l’ancien président chinois Jiang Zemin, dans le cadre d’une enquête pour la répression au Tibet dans les années 1980-90. Pékin s’était dit très irrité par cette enquête.

La loi inclut une clause ordonnant de surseoir à l’instruction des dossiers en cours jusqu’à ce qu’il soit démontré qu’ils remplissent toutes les conditions. Parmi ceux-ci, le dossier Couso, dans lequel la justice espagnole a ouvert des poursuites contre trois militaires américains.

La famille de José Couso a salué lundi la décision du magistrat, se félicitant que "la justice en Espagne reste indépendante", tandis que de nombreux groupes de l’opposition soutenaient la décision du juge.

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