Espagne : des séparatistes catalans devant la justice

L’escalade continue entre Madrid et Barcelone alors que plusieurs responsables séparatistes doivent comparaître vendredi devant la justice espagnole pour sédition.

Les tensions entre Barcelone et Madrid menacent de s’intensifier, alors que certains espéraient l’ouverture d’un dialogue. Vendredi, plusieurs responsables indépendantistes catalans doivent passer devant le tribunal espagnol, poursuivis pour sédition. Des poursuites judiciaires avaient été engagées au début de la semaine contre plusieurs séparatistes ainsi que contre le chef de la police catalane Josep Lluis Trapero après un discours ferme et cinglant du roi d’Espagne Felipe VI.

Alors que la pression politique ne cesse de monter sur l’exécutif catalan, qui menace de proclamer l’indépendance de la Catalogne dans les prochains jours, la crise commence à se répercuter sur le système bancaire de la région. L’impasse semble totale dans ce qui est la pire crise que l’Espagne ait connue depuis des décennies. Les indépendantistes menés par le président catalan Carles Puigdemont continuent à avancer vers la sécession dans la foulée du référendum de dimanche, mais le gouvernement central de Mariano Rajoy écarte toute possibilité de médiation tant qu’ils n’auront pas renoncé à leur ambition.

Jusqu’à 15 ans de prison

Les indépendantistes déclarent que 2,3 millions de personnes ont voté et que 90 % se sont prononcées pour l’indépendance, mais ils n’ont pas encore rendu publics les résultats définitifs. C’est dans ce contexte très lourd que des responsables catalans doivent comparaître à Madrid devant l’Audience nationale, haute juridiction chargée des affaires complexes, dont celles qui touchent à la sécurité nationale. Quatre personnes sont poursuivies : Josep Luis Trapero donc, chef des Mossos d’Esquadra, la police catalane, Teresa Laplana, une autre responsable de cette police, Jordi Sanchez et Jordi Cuixart, présidents de deux puissantes associations séparatistes, l’Assemblée nationale catalane (ANC) et Omnium.

La justice les a convoqués «  en vue de leur inculpation  » dans le cadre d’une «  enquête pour sédition  » liée à des manifestations survenues les 20 et 21 septembre à Barcelone. Des manifestants, encouragés par l’ANC et Omnium, avaient alors bloqué des gardes civils dans leur bâtiment pendant des heures et avaient endommagé leurs véhicules, des faits passibles de quinze ans de prison. Depuis le début de la crise actuelle, la justice a agi avec fermeté contre les indépendantistes. Le Tribunal constitutionnel a en particulier interdit avant sa tenue le référendum d’autodétermination de dimanche, et il a suspendu jeudi la session annoncée pour lundi du Parlement catalan au cours
de laquelle une éventuelle proclamation unilatérale d’indépendance est annoncée.

Peur du secteur bancaire

De même que l’exécutif catalan avait ignoré l’interdiction du référendum et décidé la tenue de la consultation, sans toutefois les habituelles garanties élémentaires de régularité (commission électorale, vote secret…), la présidente du Parlement catalan, Carme Forcadell, a paru indiquer que la session prévue aurait lieu. Qualifiant la décision du Tribunal constitutionnel de «  fait extrêmement grave  » et contraire à «  la liberté d’expression  » des députés, Carme Forcadell a assuré que le Parlement, dominé par les indépendantistes, n’accepterait pas «  la censure  ».

L’onde de choc de la crise politique a atteint le secteur économique : Caixabank, première banque de Catalogne et troisième d’Espagne, doit tenir vendredi un conseil d’administration extraordinaire pour décider si elle va déplacer son siège social hors de la région en crise. Jeudi, c’est Banco Sabadell, deuxième banque de Catalogne et cinquième en Espagne, qui a annoncé le transfert de son siège social à Alicante, dans le sud-est du pays, après la dégringolade de son cours de Bourse. Les banques craignent les conséquences d’une éventuelle sortie de la Catalogne de la zone euro au cas où son indépendance serait proclamée.

Une société divisée

Par ailleurs, Barcelone, locomotive économique et principal pôle touristique de la Catalogne, région qui a reçu 17 millions de visiteurs en 2016, a vu s’effriter dernièrement les réservations hôtelières, selon le syndicat local de cette industrie. Décidé à empêcher l’indépendance à tout prix, Mariano Rajoy doit réunir son gouvernement vendredi pour étudier de possibles nouvelles mesures. Parmi les options figure la suspension de l’autonomie régionale dont jouit la Catalogne, une mesure que le gouvernement central n’exclut pas et que réclament des voix de plus en plus nombreuses en Espagne.

Une telle suspension échaufferait encore davantage les esprits en Catalogne, où les violences survenues lors de heurts entre policiers et manifestants le jour du référendum ont suscité la colère. Les sondages montrent que la société catalane est divisée en parts à peu près égales entre partisans et adversaires de l’indépendance. La crise affecte jusqu’au monde du football et perturbe l’ambiance au sein de l’équipe nationale espagnole. Après les ennuis de son défenseur catalan Gerard Piqué, critiqué et conspué pour s’être prononcé pour «  le droit à décider  », la Roja, toute proche d’une qualification pour le Mondial 2018, reçoit l’Albanie vendredi à Alicante. Gerard Piqué risque d’être de nouveau sifflé.

Avec AFP

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