Le « bordel » de Macron ne passe pas chez les éditorialistes

La saillie du président accusant certains salariés de « foutre le bordel », au lieu d’accepter un changement de travail, a provoqué l’ire de la presse française.

«  Il y en a certains, au lieu de foutre le bordel, ils feraient mieux d’aller regarder s’ils peuvent avoir des postes [à la fonderie d’Ussel]  »… La sortie d’Emmanuel Macron ne passe toujours pas. Ces mots prononcés en aparté pour les oreilles du président de la région Nouvelle-Aquitaine, Alain Rousset, lors de la visite présidentielle à Égletons, provoquent toujours un sentiment de colère. Mais ce n’est plus seulement la classe politique ou le délégué syndical CGT de l’entreprise GM&S qui ressentent cette colère. Non, la nouvelle saillie du chef de l’État passe également mal auprès des éditorialistes, pour lesquels un président ne devrait pas employer de tels mots qui fâchent et laissent l’impression d’un «  mépris de classe  ».

«  Une fois le tour méprisant de la formule mis de côté (mais non absous), on peut discuter : formation et reconversion sont des moyens légitimes de lutter contre le chômage. S’il l’avait dit ainsi, point de polémique », écrit Laurent Joffrin, dans Libération, avant d’asséner : «  Mais la forme compte.  » Nicolas Beytout, dans L’Opinion, comme plusieurs de ses confrères, pense que, sur le fond, Emmanuel Macron a «  raison  ». Mais, «  pourquoi le dire ainsi, avec ces mots-là  ? Des mots qui fâchent, créent l’impression d’un mépris de classe  », s’interroge-t-il.
Jupiter laisse place au charretier

«  Un président ne devrait pas dire ça. Au nom d’une certaine idée de la cohésion  », se désole Stéphane Siret, de Paris-Normandie. «  Un président devrait soigner son langage  », renchérit Sébastien Lacroix de L’Union/L’Ardennais. «  Quand Jupiter est en visite, il est prié de causer comme Jupiter et non comme un charretier  », s’exclame Dominique Jung, des Dernières Nouvelles d’Alsace. Pour ce dernier : «  Le coup de gueule du chef de l’État brouille son message.  » «  Pire, il confirme cette image de banquier hors sol, déconnecté du terrain et des réalités sociales  », s’inquiète Hubert Coudurier, du Télégramme.

«  Cette saillie vient ajouter de l’eau au moulin de ceux qui ironisent sur le Robin des bois à l’envers qui prend… aux pauvres pour donner aux riches  », persifle Jean-Marcel Bouguereau, de La République des Pyrénées. Très en colère, Maud Vergnol, dans L’ Humanité, s’alarme de voir un président de la République ne plus «  contrôler sa morgue  » et de la «  violence de ses attaques à l’égard des plus fragiles.  » «  Macron a sans doute oublié qu’il n’était pas accoudé au comptoir du café du commerce. Et qu’on peut aussi foutre le bordel par désespoir  », rappelle Florence Chédotal, de La Montagne Centre-France.

Sabotage à répétition

«  Le vernis craque parfois  », remarque Olivier Pirot, dans La Nouvelle République du Centre Ouest, et là, «  le ressenti est clairement celui du mépris  ». Impression partagée par Éric Marty (Midi libre) pour qui cette saillie «  délivre une part de mépris et de lassitude face aux réactions de salariés anxieux à juste titre pour leur avenir  ». «  À chaque fois, Emmanuel Macron ajoute une pièce à conviction au procès en “mépris social” que lui font la gauche, le FN et la droite  », relève Hervé Favre, de la Voix du Nord. Dominique Garraud, de La Charente libre est «  sidéré  » par «  la régularité avec laquelle Emmanuel Macron réussit à saboter ses propres initiatives pour corriger une image de “président des riches”  ».

«  Le président de la République a donné involontairement le fond de sa pensée. Elle donne prise à l’accusation “gouvernement des riches”. D’où cette impression de déséquilibre et de flou dans les orientations stratégiques. Comme dirait Macron, un peu le bordel, quoi…  » ironise Patrice Chabanet, dans Le Journal de la Haute-Marne.

Avec AFP

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