Coronavirus « même pas peur »: à Pourim des juifs ultra-orthodoxes font fi des consignes

Dans les rues de Bnei Brak envahies par des milliers d’Israéliens célébrant la fête juive de Pourim, il faut s’armer de patience pour tomber sur quelqu’un portant un masque de protection contre le nouveau coronavirus. Pour finalement en dégoter deux, déguisés en chirurgiens.

Israël a beau avoir interdit les rassemblements de plus de 2.000 personnes, parmi d’autres mesures drastiques pour lutter contre la propagation du nouveau coronavirus, les juifs célèbrent cette semaine Pourim avec, comme le veut la coutume, carnavals et alcool coulant à flot, sans se soucier des consignes de sécurité.

A Bnei Brak, une ville où réside une importante communauté ultra-orthodoxe dans la périphérie de Tel-Aviv, les badauds déambulent mardi déguisés en licornes, en soldats ou en princesses, dans un concert de klaxons.

Certains hommes, bouteilles de vin rouge à la main, titubent et s’enlacent, faisant fi de toutes les recommandations sanitaires des autorités, qui ont prié la population d’éviter tout contact physique.

Le grand rabbin d’Israël David Lau a lui rappelé qu’aucune obligation religieuse n’était plus importante que le respect de la vie, affirmant que suivre les directives du ministère de la Santé était « une obligation religieuse ».

« Ce sont les personnes qui regardent la télévision qui ont peur du coronavirus, mais nous on ne la regarde pas! », s’exclame Ahuva Alfa, une juive ultra-orthodoxe entourée de son mari et de ses six garçons.

La mère de famille se rappelle que « pendant la guerre du Golfe (1990-1991), le rabbin Kanievsky avait dit qu’aucun missile ne tomberait sur Bnei Brak, et ils sont tous tombés à Ramat Gan (ville voisine, NDLR) ».

« Alors quand il dit qu’il n’y aura pas de coronavirus à Bnei Brak, ça veut dire qu’il n’y en aura pas! », assure-t-elle à l’AFP.

– « Pas peur » –

Cinquante-huit cas de coronavirus ont été confirmés en Israël, où toute personne arrivant sur le territoire doit se placer en quarantaine, ont annoncé lundi les autorités.

« Le coronavirus ne nous fait pas peur! », réplique Shira Merenstain, 14 ans, visage peinturluré, à l’image de ses trois frères et soeurs.

Leur mère Ruchama n’a pas jugé utile de leur faire porter des masques de protection, car « la prière suffit », dit-elle à l’AFP.

Barouch Marzel estime lui aussi que Dieu protège ceux qui célèbrent Pourim, fête marquant selon la tradition la vaine tentative d’un dirigeant perse de l’Antiquité pour anéantir les Juifs.

Ce colon israélien assiste à une parade dans la ville de Hébron en Cisjordanie occupée, poudrière où environ 800 juifs vivent, pour la plupart par conviction idéologique, sous haute protection militaire, parmi 200.000 Palestiniens.

« Il n’y a pas de problème à défiler à Hébron, c’est une ville sainte », dit-il à l’AFP, en marge d’une parade colorée et surveillée par des soldats.

Dans le reste de la Cisjordanie occupée, l’ambiance est moins festive: les restaurants et les cafés sont fermés dans la plupart des villes comme Ramallah, ou Bethléem où ont été détectés la quasi-totalité des cas de coronavirus du territoire.

Israël a annoncé mardi la fermeture du point de passage d’Allenby, reliant la Cisjordanie occupée à la Jordanie, qu’il contrôle.

– « Faire ce qu’il faut faire » –

« Ce qui doit arriver arrivera », philosophe Rivi Bard, 30 ans, qui à l’image des autres juifs ultra-orthodoxes de Bnei Brak ne porte aucune protection contre le coronavirus.

« Il y a une expression juive qui dit: ‘celui qui respecte un commandement religieux ne peut pas être blessé' », explique-t-il, devant une synagogue où des dizaines de femmes aux cheveux couverts par des turbans s’occupent de leurs enfants visiblement excités par la fête.

Soudain, il fait un pas de côté pour laisser passer un homme ivre épaulé par deux camarades sortant précipitamment du lieu de culte. « Dieu s’occupe de nous, et nous faisons ce qu’il faut faire en ce jour si spécial. »

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