Coronavirus: l’exécutif se prépare à une crise sanitaire longue

Face aux incertitudes, dont la quantité de tests disponibles, l’exécutif se refuse pour l’heure à évoquer le bout du tunnel de la crise sanitaire mais se prépare à absorber le choc durant de longues semaines, voire des mois, en attendant un vaccin.

Le sommet de l’Etat le psalmodie, sans que l’on sache vraiment s’il ne s’agit que de l’épidémie ou des importantes turbulences économiques et sociales qui s’ensuivront: « c’est un combat long, difficile, qui impliquera de mauvaises nouvelles, des déceptions », a relevé mercredi Edouard Philippe.

Dans une France confinée officiellement jusqu’au 15 avril mais qui s’attend dans une immense majorité à devoir jouer les prolongations à domicile, la question de la fin de ces mesures exceptionnelles est loin d’être tranchée, tant les inconnues sont nombreuses.

Interrogé mercredi à l’Assemblée, M. Philippe a qualifié la question de « redoutablement complexe », rappelant qu’il n’y avait « pas de précédent » ni de « méthode éprouvée ». « Il y a des éléments dont nous ne disposons pas entièrement aujourd’hui », a-t-il observé, évoquant par exemple l’absence pour l’heure de « traitements éprouvés » .

Le Premier ministre a cependant jugé « probable » que le déconfinement ne se fasse pas « en une fois, partout et pour tout le monde », en espérant pouvoir présenter une ébauche de stratégie « dans les jours, la semaine qui viennent de façon à donner une perspective à nos concitoyens ».

« Nous avons demandé à plusieurs équipes de travailler sur cette question en étudiant l’opportunité, la faisabilité d’un déconfinement qui serait régionalisé, qui serait sujet à une politique de tests, en fonction, qui sait, de classes d’âge », a poursuivi le Premier ministre, demandant cependant encore du temps pour travailler. Même si l’exécutif joue contre-la-montre, tant les répercussions économiques s’annoncent dévastatrices, la décision « prendra en compte avant tout les impératifs de santé », a-t-il encore fait valoir.

Or, plusieurs indicateurs montrent que la crise devrait s’étaler a minima jusqu’au début de l’été.

L’urgence des tests

Tout d’abord parce que c’est l’effet même recherché du confinement, qui vise à lisser le pic de l’épidémie et du nombre de malades hospitalisés et augmente donc de fait sa durée, supposément à moindre intensité.

Surtout, l’absence actuelle de dépistage massif empêche d’avoir une vision claire de la propagation du coronavirus, alors que 80 % des personnes infectées ne présentent que peu ou pas de symptômes.

« On n’a aucune idée de la proportion de la population qui a été contaminée. On ne sait pas combien de gens sont positifs, sont guéris. C’est donc difficile de prévoir quoi que ce soit », déplore l’épidémiologiste Catherine Hill, en insistant sur « l’urgence à faire des tests sur un échantillon représentatif de la population ».

Pour l’heure, près de 30.000 tests sont conduits chaque jour. Mais les tests sérologiques, c’est-à-dire par prélèvement sanguin, qui permettront de vérifier le niveau d’anticorps et donc l’immunité de chacun face au virus, ne seront disponibles que « dans les prochains jours, les prochaines semaines », a déclaré le ministre de la Santé Olivier Véran.

Quant aux « tests rapides », qui donneront des résultats en quelques minutes, leur réelle montée en puissance (100.000 par jour) n’est prévue qu’au mois de juin.

Autre signe d’anticipation d’une épidémie au long cours, l’importation de plus d’un milliard et demi de masques, alors que la France en consomme pour l’heure 40 millions par semaine. Même si ces besoins pourraient augmenter dans les prochaines semaines à mesure de la progression de l’épidémie, l’Etat s’est décidé à « faire beaucoup de réserves avec ces commandes », relève un ministre.

Au Royaume-Uni, les autorités sanitaires ont d’ores et déjà annoncé que les mesures mises en place pour contenir la maladie seraient réexaminées « toutes les trois semaines » durant « probablement six mois » voire plus, alors qu’un éventuel vaccin n’arriverait pas avant 2021.

Une autre inconnue plane encore: la saisonnalité du virus, qui semble bien résister à la chaleur comme l’indique son implantation en Afrique. Selon l’épidémiologiste à Harvard Marc Lipsitch, « même si l’on peut s’attendre à une régression modeste », « il n’est pas raisonnable d’en attendre une nette chute » avec les chaleurs d’été.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite