Accord historique sur le nucléaire iranien

L’Iran et les grandes puissances ont scellé dans la nuit de samedi à dimanche un premier accord historique pour contenir le programme nucléaire iranien, mais Téhéran et les États-Unis ont aussitôt étalé leurs divergences sur la question de l’enrichissement.

Au terme de cinq jours de négociations marathon à Genève et d’un black-out médiatique total sur le climat et l’évolution des tractations, la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton a annoncé "un accord sur un plan d’action" concernant le programme nucléaire iranien controversé. Elle était entourée du ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif et des six chefs de la diplomatie du groupe 5 + 1 (États-Unis, Chine, Russie, Royaume-Uni, France et Allemagne).

Simultanément, à Washington, lors d’une intervention solennelle depuis la Maison-Blanche, le président américain Barack Obama a assuré que cet accord obtenu à l’arraché "barre le chemin le plus évident" de la République islamique vers une bombe atomique.

Persistance d’"énormes difficultés"

Le président Obama a toujours dit qu’il ferait tout – y compris recourir à la force – pour empêcher l’Iran de se doter d’armes nucléaires. Les Occidentaux et Israël soupçonnent Téhéran de dissimuler un volet militaire derrière son programme civil, ce qu’il nie.

Barack Obama a pris soin de qualifier cet accord intérimaire de six mois de "première étape importante", soulignant les "énormes difficultés" persistant dans ce dossier qui empoisonne la communauté internationale depuis une décennie. Son homologue iranien Hassan Rohani, réputé modéré et qui a lancé une politique d’ouverture vers l’Occident depuis son élection en juin, a salué une entente qui allait "ouvrir de nouveaux horizons".

Son ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a salué "un résultat important mais (qui) est seulement un premier pas". "Nous avons mis en place une commission conjointe pour surveiller la mise en place de notre accord. J’espère que les deux parties pourront avancer d’une manière qui puisse rétablir la confiance", a déclaré le ministre, notamment entre Téhéran et Washington qui ont rompu leurs relations diplomatiques en avril 1980.

Mohammad Javad Zarif a également réaffirmé le "droit inaliénable" de son pays à l’enrichissement d’uranium". Le texte de Genève contient une "référence claire selon laquelle l’enrichissement va continuer", a-t-il martelé, très applaudi par la presse et la délégation iraniennes venues en nombre à Genève.

Droit à l’enrichissement d’uranium

Le droit à l’enrichissement d’uranium n’est pas mentionné dans le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) dont l’Iran est signataire.

Cette question est au coeur des inquiétudes des pays occidentaux et d’Israël, qui craignent que l’uranium enrichi à 20 % ne soit utilisé par l’Iran pour obtenir de l’uranium à 90 % pour un usage militaire, malgré les dénégations de Téhéran. L’Iran affirme que cet uranium est destiné à son réacteur de recherche et à des fins médicales.

Succédant à Mohammad Javad Zarif devant la presse dimanche à l’aube, le secrétaire d’État américain John Kerry a paru prendre son contre-pied. L’accord de Genève, a-t-il insisté, "ne dit pas que l’Iran a le droit à l’enrichissement (d’uranium), quoi qu’en disent certains commentaires d’interprétation".

"L’Iran a accepté de suspendre l’enrichissement d’uranium au-delà de 5 %. L’Iran a accepté de dégrader ou de convertir son stock d’uranium enrichi à 20 %", a détaillé John Kerry, parlant d’"une première étape" avant une prochaine "phase beaucoup plus difficile".

Le secrétaire d’État américain, parrain de la reprise des négociations directes israélo-palestiniennes, a également voulu rassurer Israël qui s’est farouchement opposé ces dernières semaines à tout allègement des sanctions contre l’ennemi iranien. Un accord nucléaire "complet rendra le monde (…), les partenaires de la région et l’allié Israël plus sûrs", a promis John Kerry.

Alors que les relations américano-israéliennes traversent une crise, John Kerry a affirmé qu’il n’y avait pas la moindre différence entre les États-Unis et Israël sur l’objectif final qui est que l’Iran n’aura pas de bombe nucléaire. La réaction de l’État hébreu ne s’est pas fait attendre : le bureau du Premier ministre Benyamin Netanyahou a dénoncé un "mauvais accord qui offre exactement ce que l’Iran voulait : la levée significative des sanctions et le maintien d’une partie significative de son programme nucléaire.

Les cinq jours de négociations se sont déroulés dans un grand hôtel de Genève, où toutes les délégations résidaient. Les diplomates et experts du 5 + 1 ont négocié à partir de mercredi – après un échec près du but début novembre – avant d’être rejoints par chacun de leurs ministres.

Avec l’Iran, les grandes puissances étaient en quête d’un accord intérimaire de six mois apportant des garanties sur le caractère pacifique du programme nucléaire en contrepartie d’un allégement "limité" de sanctions qui étranglent l’économie iranienne. Le président Obama a assuré que les sanctions "les plus sévères continueront d’être appliquées", mais il a une nouvelle fois exhorté le Congrès à s’abstenir d’adopter de nouvelles mesures punitives contre Téhéran.

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