Tenue par visioconférence depuis Paris et Rabat sous le double thème « Les rivalités de puissance en Afrique » et « L’Afrique face au terrorisme », cette édition a permis de mettre en relief les effets de la pandémie sur le ralentissement « à court terme » des rivalités entre des puissances comme l’Inde, la Chine, la Turquie ou encore les Etats-Unis.
Lors de cette rencontre modérée par le Senior Fellow au Policy Center for the New South, Abdelhak Bassou, sous le thème « Les groupes armés en Afrique : Bilan et Analyse », la présidente de l’African Security Sector Network , Niagalé Bagayoko, a tenu à observer d’abord que » l’environnement auquel nous avons à faire aujourd’hui est complexe ».
« On se trouve face à un véritable défi collectif puisque les difficultés rencontrées ne sont pas propres à un acteur. Nous sommes face à la nécessité de repenser collectivement les modes d’intervention dans la région sahélienne », a-t-elle dit, soulignant la nécessité de repenser les instruments, les concepts, les doctrines et la façon avec laquelle on évalue les interventions.
La plupart des acteurs se trouvent face à une extrême maitrise technique et à un immense professionnalisme, en contrepartie d’un décalage avec la compréhension de l’environnement, a relevé Mme Bagayoko.
Dans le cadre de cet environnement sécuritaire sahélien, les acteurs extrémistes sont loin d’être les seuls à jouer un rôle et à influer, il y a également des acteurs rebelles dont les revendications sont indépendantistes ou autonomistes, des groupes criminels, en plus d’acteurs qui menacent la sécurité des populations sur le terrain, notamment les forces de défense et de sécurité dans certains cas.
L’instrument militaire est indispensable pour apporter une réponse à ces problématiques sécuritaires de l’environnement mais ne peut être mobilisé pour répondre à chacune d’elles, selon la présidente de l’African Security Sector Network.
Pour sa part, l’amiral Alain Oudot de Dainville, ancien Chef d’État-Major de la Marine française, s’est arrêté sur la piraterie dans le Golfe de Guinée. La piraterie est une opération qui fait perdre beaucoup d’argent aux compagnies, puisqu’il faut assurer les bateaux, et prévoir des indemnités de captivité et d’insécurité pour les équipages, a-t-il relevé.
La piraterie ne fait qu’augmenter dans le golfe du Guinée, endroit principal de piraterie avec 4000 bateaux qui passent, a-t-il indiqué, notant qu’elle a augmenté de 10% dans les 10 dernières années et se concentre principalement au Nigeria.
La piraterie dans le golfe du Guinée se distingue de la piraterie dans les autres zones du globe, avec une double motivation : motivation politique et motivation pour la contrebande du pétrole, selon l’ancien Chef d’État-Major de la Marine. Le Nigeria cherche à lutter contre cette piraterie, en lançant des actions de représailles à terre, en changeant son organisation et en investissant dans les actions de répression avec près d’un milliard de dollars dépensés dans les trois dernières années pour lutter contre la piraterie, a-t-il fait valoir.
Par ailleurs, le Nigeria a mis en place l’organisme « Nigeria maritime administration and safety agency » qui coordonne les efforts des différentes autorités pour lutter contre les pirates, a-t-il ajouté.
De son côté, l’expert auprès du Conseil de sécurité de l’ONU, Jérôme Evrard, a indiqué qu’en Afrique, « Al Qaida devient la principale menace du temps long non pour ses capacités opérationnelles en Afrique de l’Ouest ou en Somalie mais pour sa capacité à s’appuyer sur des actions de radicalisation minutieusement entreprises par des acteurs concourants qui visent à transformer les sociétés africaines », a souligné M. Evrard.
« Al Qaida bénéficie d’un contexte radical porteur que seul des améliorations très substantielles de la gouvernance politique, économique et sociale ainsi qu’un véritable accès à des opportunités professionnelles, à une éducation de qualité, et à une santé primaire pourraient éventuellement corriger », a-t-il poursuivi.
Depuis 2016, le PCNS et le Centre HEC de Géopolitique organisent chaque année deux éditions des « Dialogues Stratégiques ».
Cette plateforme d’analyse et d’échange réunit des experts, des chercheurs représentant différents think-tanks, des académiciens et des praticiens, outre des décideurs politiques pour débattre des grandes questions géopolitiques et sécuritaires à l’échelle internationale, ainsi que des problématiques d’importance commune pour l’Europe et l’Afrique.