Tel un train lancé à grande vitesse, la politique d’Emmanuel Macron dans sa lutte contre le radicalisme paraît être le grand combat de son quinquennat. Il aura été dit que de tous les présidents français de ces derniers décennies, Emmanuel Macron aura été celui qui a pris à bras le corps la problématique de l’islam de France pour tenter de l’expurger de sa déviance vers la radicalité.
Les dramatiques attentats qui ont frappé la France, les virulentes tentations séparatistes qui travaillent certaines franges de la société, la diffusion de plus en plus large de postures religieuse radicales ont été autant de facteurs qui ont fait mûrir la décision française de lutter contre le radicalisme religieux.
Cette nécessité est d’autant plus urgente qu’elle intervient dans un contexte politique extrêmement sensible. Pour Emmanuel Macron, la droite classique comme la droite extrême sont à l’affût de la moindre défaillance sur un sujet aussi régalien que la sécurité des Français. Comme en 2015, ceux qui ont décidé de frapper la France par des attentats terroristes inspirés ou organisés savent qu’ils jouent sur un fragile équilibre politique où les peurs et les angoisses peuvent aisément faire basculer les choix électoraux et paver le chemin à d’invraisemblables scénarios.
Pour Emmanuel Macron dont la santé économique du pays a été largement affaiblie par la pandémie du Covid-19, un des chevaux de bataille sur lequel il sera jugé par les Français sera celui de la sécurité et la lutte contre le terrorisme. D’où cette loi de « sécurité globale » avec ses grandes polémiques, d’où cette loi sur le séparatisme devenue au fil des débats loi pour renforcer la laïcité et qui a provoqué autant de vives incompréhensions avec le monde anglo-saxon. Ce qui, fait rare et inédit, avait obligé le président Macron à prendre sa plus belle plume pour interpeller les grands médias britanniques et américains, accusés de placer leurs empathies aux mauvais endroits.
Dans sa lutte affirmée contre le radicalisme, Emmanuel Macron rencontre plusieurs obstacles susceptibles de lui compliquer la tâche et d’affaiblir sa gouvernance.
Sa décision de couper brutalement la relation de la France avec ce qu’il est convenu d’appeler « l’islam consulaire » pose deux défis majeurs et immédiats . Le premier est de trouver dans l’urgence une alternative aux financements étrangers au culte musulman sachant que l’Etat français est dans l’incapacité juridique d’offrir une alternative par l’argent publique. Et le second est la décision de fermer le portes de France aux imams étrangers et de les remplacer par des « imams made in France » . Les réponses données à ces deux situations d’urgence sont encore à évaluer dans leurs pertinences. La création d’un Conseil national des imams doit encore montrer les preuves de son efficacité et ne pas être paralysé par des bisbilles internes nourris par une floraison d’égo et d’agendas personnels.
Sans parler des réactions imprévisibles de la part de pays comme la Turquie ou l’Algérie qui se sont retrouvés brusquement hors jeu dans l’organisation idéologiquement et financièrement fructueuse de l’islam de France.
Le second obstacle qui peut ralentir et même brouiller le message de cette lutte contre le radicalisme menée par Emmanuel Macron se trouve dans la prévisible guérilla juridique qui va s’opposer à sa volonté de dissoudre toutes les structures qui, selon l’appréciation des autorités françaises, produisent, encouragent et diffusent les formes du radicalisme religieux. Certaines forces politiques notamment à gauche, peuvent se saisir de cette confusion pour tenter d’affaiblir et de discréditer son action.
Le troisième obstacle important qui a toutes les chances de provoquer un débat et une déception nationale est la difficulté manifeste à convaincre certains pays, notamment du Maghreb à récupérer toutes les personnes fichées S et que le gouvernent a promis d’expulser vers leur pays d’origine. Ce choix a été pensé comme une forte promesse dans une stratégie de lutte contre les milieux qui se sont publiquement inscrits dans une démarche de rupture avec la société française et dont la présence sur le territoire français devient un enjeu de sécurité nationale.
Pour Emmanuel Macron, réussir ce pari devient à la fois un enjeu domestique de crédibilité dans sa lutte contre la radicalité et un enjeu diplomatique de convaincre ces « pays d’origine » de récupérer « leurs citoyens radicalisés ».