Règlement de compte entre Castaner et Faure, sur fond d’affaire Griveaux
Règlement de comptes entre anciens amis: le patron du PS Olivier Faure a accusé mercredi le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner d’avoir « commis une faute grave », après que celui-ci eut évoqué sa vie privée à la radio, sur fond d’affaire Griveaux.
« Si mes propos l’ont blessé, je les regrette. Il n’y avait aucune menace », a affirmé M. Castaner, dans la soirée à l’AFP. Il a souligné que « l’un et l’autre », compagnons de route en politique durant plusieurs années, avaient « connu des moments difficiles dans (leurs) vies ». « Nous étions côte à côte ».
Les deux quinquagénaires se sont côtoyés pendant des décennies au Parti socialiste, des jeunesses rocardiennes aux arcanes de l’Assemblée nationale, où tous deux ont été élus pour la première fois en 2012.
« Nos bureaux étaient côte à côte », a rappelé le ministre.
Après le départ de Christophe Castaner chez les marcheurs, Olivier Faure l’a d’abord ménagé au début du quinquennat Macron. Mais depuis quelques mois, les mots se font plus offensifs, plus aigres. Et mercredi, le Premier secrétaire du PS est allé jusqu’à demander à Emmanuel Macron « de convoquer le ministre de l’Intérieur dans les meilleurs délais et d’en tirer les conséquences ».
Objet de son courroux: l’intervention dans la matinée de M. Castaner qui, sur France Inter, s’est dit « étonné des leçons de morale » d’Olivier Faure, « que je connais bien et que j’ai accompagné dans ses divorces et ses séparations ».
Une allusion directe à la vie privée du numéro un socialiste. Qui, la veille, avait lui-même dénoncé la « légèreté incroyable » de Benjamin Griveaux, l’ex-candidat LREM aux municipales de Paris, obligé de se retirer de la course après la diffusion de vidéos intimes.
La déclaration de M. Castaner a aussitôt déclenché un tollé à gauche, mais aussi à droite. Face à l’avalanche de critiques, M. Castaner, dans un message directement adressé à son ex-ami sur son Twitter, a tenu à préciser: « cher @faureolivier, il n’y avait ni menace ni attaque personnelle dans mon propos. Nous nous connaissons depuis assez longtemps pour savoir l’un et l’autre que la vie n’est pas linéaire. Et nous y avons quelquefois fait face ensemble. »
Mais cette tentative d’explication du ministre n’a pas calmé le colère froide de son ancien ami. Lors d’une déclaration qu’il a voulue solennelle dans la salle des conférences de presse à l’Assemblée, M. Faure a dénoncé, quelques heures plus tard, « une faute grave » de la part du ministre.
– « Ligne rouge » –
« Dès lors, il appartient au président de la République, garant de nos institutions, de convoquer le ministre de l’Intérieur dans les meilleurs délais et d’en tirer les conséquences », a souligné le patron du PS.
La relation entre les deux hommes avait déjà pris un sérieux coup de canif en mars 2019, lorsque le Premier secrétaire du PS avait ironisé sur les annonces « entre deux verres » de son ex-allié, en allusion à une soirée en boîte bien arrosée de celui-ci, révélée par la presse people quelques jours plus tôt.
Mais « ce matin une ligne rouge a été franchie », a insisté M. Faure.
Le patron du PS a reçu le soutien de nombreux responsables politiques. A commencer par ceux du Parti socialiste. « Amateur en tant que ministre ? Mais professionnel de l’attaque minable. Ces propos déshonorent leur auteur et le mettent au niveau de ceux qu’il prétend combattre dans cette pathétique affaire », a cinglé le patron des sénateurs PS Patrick Kanner.
« Dans une démocratie sereine, M. Castaner serait en train de chercher du boulot », a attaqué Julien Dray, ex-député PS.
« LREM peut réclamer l’anonymat sur les réseaux sociaux, son ministre est une vraie balance! », s’est exclamé Fabien Roussel, secrétaire national du PCF.
A droite aussi, les critiques ont fusé. « En attaquant Olivier Faure sur sa vie privée, Christophe Castaner fait la preuve de la bassesse dont est capable ce pouvoir qui dégrade chaque jour davantage le climat politique », selon Bruno Retailleau, président des sénateurs LR.
Quelques jours plus tôt, après la publication de la vidéo à caractère sexuel de M. Griveaux, la classe politique, dans une rare unanimité, avait exprimé son indignation et appelé au « respect de la vie privée » des politiques.