L’Algérie parmi les pays les plus corrompus
Le rapport annuel 2012 de Transparency International classe l’Algérie à la peu honorable 105e place sur un total de 176 pays. Depuis une décennie, le pays n’a pas quitté la zone rouge des nations en dégénérescence dans la gestion des deniers publics.
Dans le groupe des pays arabes, le pays occupe la 10e place (sur 18 pays notés) et en Afrique, il arrive à la 21e place (sur 50 pays). Dans le classement mondial, la première place des pays les moins corrompus revient au Danemark, la Finlande et la Nouvelle-Zélande, tandis que la Somalie, la Corée du Nord et l’Afghanistan ferment la marge du classement mondial des pays les plus corrompus. Le classement de l’Algérie était «prévisible» au regard des scandales de corruption qui éclatent au grand jour, touchant les secteurs les plus stratégiques. C’était encore plus attendu en raison de «l’absence de volonté politique du gouvernement à lutter contre la corruption qui est devenue une règle, plus grave encore, des ministres en exercice – cités et/ou impliqués dans des affaires de corruption – continuent de bénéficier d’une totale impunité et de l’inertie de la justice», estime Djilali Hadjadj, porte-parole de la section algérienne de Transparency International.
Depuis une décennie, l’Algérie n’a pas quitté la zone des nations en dégénérescence en matière de transparence dans la gestion des deniers publics. «La stagnation de l’Algérie en 10 ans de notation par l’indice de perception de la corruption (2003-2013) est significative de la généralisation de la corruption qui menace gravement la stabilité et la sécurité du pays, alors que d’autres pays plus mal notés que l’Algérie, auparavant, ont fait des progrès dans la lutte contre la corruption et sont maintenant mieux classés qu’elle», relève encore Djilali Hadjadj. Le pays avait obtenu en 2011 la note de 2,9/10, la même que celle de 2010, et la 112e place, reculant de 7 places par rapport au classement de 2010. La position peu flatteuse qu’occupe l’Algérie montre toute l’étendue de la corruption qui gangrène les rouages de l’Etat et de ses administrations publiques qui fonctionnent dans l’opacité et loin de tout contrôle. La gabegie, la dilapidation, le gaspillage et tous genres de trafic règnent en maître dans toutes les sphères du pouvoir. Le phénomène se banalise dangereusement.
Gabegie, prédation et impunité
Les différents organismes de lutte contre la corruption installés par les gouvernements successifs n’ont pas pu venir à bout du phénomène de la corruption qui s’est mû en un redoutable système brisant les reins du pays. Pour Djilali Hadjadj, «non seulement la volonté politique du gouvernement à lutter contre la corruption n’est toujours pas au rendez-vous, mais plus grave, le pouvoir continue de réprimer tout élément de la société civile qui essaye de lutter contre la corruption. Il s’acharne surtout à combattre les organisations et les militants politiques et associatifs qui dénoncent la corruption et essaient de multiplier les initiatives pour la contrer». Faut-il rappeler à ce titre le calvaire infligé au syndicaliste Achour Bouni, dont le seul tort était d’avoir dénoncé des malversations au sein de l’entreprise ENNA. Les corrompus, eux, continuent de piller impunément. Plusieurs hauts responsables politiques cités dans des affaires de corruption présumées, mais jamais inquiétés par la justice.
Le dernier en date est celui qui mit en cause le ministre des Travaux publics, Amar Ghoul. Les différents scandales, Khalifa, Sonatrach, autoroute Est-Ouest, pour ne citer que ceux-là, qui ont éclaboussé des dirigeants politiques et économiques du pays sont emblématiques de la décrépitude avancée des institutions étatiques. Les «ambitions» du gouvernement de Bouteflika pour endiguer ce phénomène ravageur sont restées lettre morte. Que d’effets d’annonce !
En l’absence de démocratie réelle, il serait difficile d’inverser cette infernale équation. Avec une justice aux ordres, un Parlement soumis et une société civile brimée, le pays ne peut que s’enfoncer dangereusement dans la spirale de la corruption. Les organismes chargés de lutter contre ce fléau sont mis en veilleuse. Que penser de l’efficacité des institutions érigées pour assurer «l’immunité» contre le virus de la corruption qui a infesté tous les rouages de l’Etat et donc une large part du corps social ? La Cour des comptes, l’IGF, les multiples organismes censés jouer le rôle qui leur est assigné sont comme tétanisés sous l’effet d’une politique autoritariste et sans possibilité de contre-pouvoir.
La lutte contre la corruption nécessite «plus de démocratie, de libertés, moins d’atteintes aux droits de l’homme, le droit à l’accès à l’information gouvernementale pour tous, l’abrogation de la nouvelle loi liberticide sur les associations de janvier 2012», exhorte M. Hadjadj. En somme, le palmarès affligeant de l’Algérie ne fait que conforter les rapports accablants qu’établissent les organismes nationaux et les constats établis, y compris par les institutions officielles. Le dernier en date est celui de la Cour des comptes qui démontre, chiffres à l’appui, les graves dérives d’une gestion mafieuse des comptes publics. Avec ce constat accablant, l’Algérie ne pourrait pas arborer fièrement l’étendard de la lutte contre la corruption, le 9 décembre prochain, une date décrétée par les Nations unies comme Journée internationale de lutte contre la corruption.
Les scores de l’Algérie de 2003 à 2009
– 2009 : 2,8 sur 10 et 111e place
– 2008 : 3,2 sur 10 et 92e place sur 180 pays classés
– 2007 : 3 sur 10 et la 99e place
– 2006 : 3,1 sur 10 et 84e place (sur 163 pays)
– 2005 : 2,8 sur 10 et 97e place (sur 159 pays)
– 2004 : 2,7 sur 10 et 97e place (sur 146 pays)
– 2003 : 2,6 sur 10 et 88e place (sur 133 pays)
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