Deux jours après l’annonce par Ryad de la fin de la campagne aérienne lancée le 26 mars, de nouveaux raids ont été lancés dans la nuit et jeudi matin contre des positions rebelles au Yémen, tandis que des combats ont opposé des factions rivales, notamment dans la ville d’Aden (sud), selon des habitants.
Mardi, le gouvernement saoudien avait annoncé que la phase intensive des frappes était "terminée", mais qu’il se réservait la possibilité d’intervenir de nouveau si des mouvements rebelles se faisaient menaçants.
C’est ce qu’a répété mercredi l’ambassadeur saoudien à Washington Adel Al-Joubeir. "Lorsque les Houthis feront un geste agressif, il y aura une réponse", a déclaré l’ambassadeur. "Nous continuerons d’employer la force pour les empêcher de prendre le Yémen par des actions agressives", a-t-il ajouté.
Selon lui, des forces Houthies ont commencé à converger vers Aden "depuis trois endroits différents". Ces forces pourraient être à Aden "d’ici quelques heures, si ce n’est plus tôt", a-t-il dit.
Selon l’analyste émirati Abdelkhaleq Abdalla, "les conditions objectives d’un véritable cessez-le-feu ne sont pas réunies" et "la guerre n’est pas finie".
Les nouvelles frappes aériennes ont visé des sites près de la capitale Sanaa, au nord de la ville de Taëz (sud-ouest) et dans la ville de Yarim (centre), ont indiqué des habitants. D’autres raids ont été signalés dans la province de Lahj (sud), ainsi qu’aux entrées nord et est de la grande cité portuaire d’Aden.
A Aden, de violents affrontements nocturnes se sont poursuivis entre des rebelles et des combattants favorables au président en exil, Abd Rabbo Mansour Hadi, ont indiqué des témoins.
Et à Taëz, des frappes aériennes ont visé des rebelles Houthis qui s’étaient emparés mercredi du QG de la Brigade 35 blindée, précédemment contrôlée par les forces loyales au président Hadi, réfugié en Arabie saoudite, ont rapporté des résidents.
Jeudi matin, des raids ont visé au nord-est de Sanaa des positions Houthies et des unités favorables à l’ex-président Ali Abdallah Saleh, allié aux rebelles chiites. Et dans la ville de Yarim (centre), l’aviation de la coalition a également visé un quartier-général des Houthis dans une ancienne université, ainsi qu’une unité rebelle favorable à M. Saleh, selon des habitants.
Le 26 mars dernier, l’Arabie saoudite a pris la tête d’une coalition comprenant au total neuf pays arabes, qui a mené des raids aériens pour stopper les avancées des Houthis, soutenus par l’Iran.
– Interrogations sur la stratégie de Ryad –
La poursuite des raids suscite des interrogations sur les raisons qui ont poussé l’Arabie saoudite à annoncer la fin de la campagne aérienne.
Les spéculations vont bon train à ce sujet. Certains mettent en avant des pressions internationales en raison des nombreuses victimes civiles du conflit, d’autres évoquent des négociations en coulisse et l’amorce d’un règlement politique.
L’Arabie saoudite a fait l’objet de nombreuses critiques à propos du coût humain des raids, dont celles de Human Rights Watch, qui a demandé jeudi une enquête sur les bavures présumées de la guerre. HRW avait dénoncé le 13 avril "le nombre alarmant de civils tués". L’Organisation mondial de la santé fera état quatre jours plus tard d’un bilan de 944 morts et 3.487 blessés –civils et militaires– depuis le 19 mars.
Quant aux rebelles, ils ont exigé l’arrêt total des raids aériens avant une éventuelle reprise du processus politique sous l’égide des Nations unies.
"Après un arrêt complet de l’agression contre le Yémen et la levée du blocus (aérien et maritime), nous exigeons la reprise du dialogue politique, là où il s’était arrêté (…), sous le parrainage des Nations unies", a déclaré Mohammed Abdelsalam, porte-parole des rebelles, dans un communiqué.
Il a aussi salué "les efforts positifs" des Nations unies et leur "soutien déclaré au dialogue national", alors que l’Arabie saoudite et ses alliés semblent préférer un processus régional.
La presse du Golfe de jeudi pullulait d’informations non confirmées sur des contacts régionaux en vue d’une reprise des négociations au Yémen. Selon l’analyste Abdalla, "il y a plusieurs tentatives pour trouver une solution politique".
Asharq al-Awsat, quotidien à capitaux saoudiens, évoquait en particulier des contacts à Ryad avec des proches de l’ex-président Saleh auquel il serait proposé de quitter le Yémen pour faciliter une solution dans le pays.