Venezuela: Nicolas Maduro inaugure sa Constituante au milieu de la contestation

Le président vénézuélien Nicolas Maduro doit inaugurer vendredi une Assemblée constituante qui lui est toute acquise, au milieu de polémiques sur sa légitimité et des contestations de l’opposition qui devait manifester à Caracas, faisant craindre de nouvelles violences.

Le parquet général du Venezuela, dirigé par la procureure dissidente Luisa Ortega, a tenté jeudi de freiner la mise en place de cette Constituante: il a demandé à la justice d’annuler la séance inaugurale du lendemain.

Cette demande du parquet, lancée après l’ouverture d’une enquête mercredi soir, "se base sur la commission présumée de délits durant le processus électoral" dimanche, a précisé sur Twitter le ministère public. Elle intervient après les révélations de l’entreprise britannique chargée des opérations de vote qui estime que la différence entre la participation réelle et celle annoncée par les autorités est "d’au moins un million de votes".

"Nous savons, sans le moindre doute, que (les chiffres de) la participation à l’élection d’une Assemblée constituante nationale ont été manipulés", a déclaré Antonio Mugicala, le PDG de SmartMatic.

L’initiative du parquet a cependant peu de chances d’aboutir, ses précédentes décisions ayant toutes été neutralisées par la Cour suprême (TSJ), accusée par l’opposition d’être inféodée au pouvoir.

Dotés de pouvoirs illimités durant un temps indéfini, les 545 membres de l’Assemblée sont pour la plupart issus de la société civile et appartiennent tous au camp présidentiel, l’opposition ayant boycotté le scrutin. Ils commenceront à siéger dans le "salon elliptique" du Parlement, à quelques mètre de l’hémicycle dans lequel se réunissent les députés élus fin 2015.

Le gouvernement accusé de provoquer des pénuries

L’Assemblée constituante se situe au-dessus de tous les pouvoirs, y compris du chef de l’Etat. Elle aura pour mission de réécrire la Constitution du Venezuela de 1999, promulguée par Hugo Chavez.

Son élection dimanche, entachée par des violences qui ont fait dix morts, a suscité un tollé international. Plus de 120 personnes ont été tuées en quatre mois de manifestations contre le président.

De son côté, l’opposition entend continuer de siéger au Parlement où elle est majoritaire, faisant craindre des tensions au sein du bâtiment. Le camp présidentiel a notamment promis de rapporter les portraits du défunt président Hugo Chavez (1999-2013) que les antichavistes (du nom du défunt Hugo Chavez, président de 1999 à 2013) avait décroché après leur victoire aux législatives de fin 2015.

La séance inaugurale, prévue à 11H00 locales (15H00 GMT), aura lieu sous haute tension à l’extérieur aussi: partisans du gouvernement et de l’opposition défileront à Caracas, faisant craindre de nouvelles violences.

"Qu’il n’y ait pas de provocations, et que l’on ne tombe pas dans des provocations", a déclaré jeudi soir le président Maduro, assurant que tout était prêt pour l’ouverture des travaux de la Constituante.

Cible d’une vague de contestation l’accusant de vouloir étendre ses pouvoirs et prolonger son mandat, M. Maduro entend, grâce à cette Constituante, "perfectionner" l’économie et inscrire ses programmes sociaux dans la Constitution.

Confronté à une inflation vertigineuse (projection de 720% pour 2017 selon le FMI), le gouvernement impose depuis 2003 un strict contrôle des prix qui pèse sur la rentabilité des entreprises locales, qui accusent le gouvernement de provoquer ainsi des pénuries.

La Constituante rejetée par 72% des Vénézuéliens

Cette assemblée "naît avec du plomb dans l’aile. Mais peu importe pour Maduro, il veut seulement une Constituante à sa mesure", juge l’analyste Luis Salamanca.

L’opposition continue à contester le principe même de ce "super pouvoir", les leaders antichavistes évoquant son "illégitimité".

"La lutte continue. La fraude que représente cette Constituante met le pays sur la voie d’une explosion sociale. Ce processus est nul. C’est le début de la fin" a déclaré Henrique Capriles, l’un des chefs de l’opposition.

Selon les autorités, plus de 8 millions d’électeurs, soit 41,5% du corps électoral, ont participé à l’élection des membres de la Constituante. Soit un chiffre supérieur aux 7,6 millions de voix réunies par l’opposition le 16 juillet, lors d’un référendum contre le projet de Constituante.

Chaque camp conteste les chiffres de l’autre et les accusations de "manipulation" lancées par la société chargée des opérations de vote ont fait bondir les autorités.

La Constituante est rejetée par 72% des Vénézuéliens, d’après l’institut de sondages Datanalisis.

Les antichavistes ont boycotté le scrutin de dimanche en dénonçant sans relâche une "fraude" visant à prolonger le pouvoir de M. Maduro, dont le mandat s’achève en 2019.

Enfin, la Constituante fait face à une opprobre internationale après l’arrestation dans la nuit de lundi à mardi de deux des figures de l’opposition, Leopoldo Lopez et le maire de Caracas Antonio Ledezma.

Avec AFP

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite