Quatre otages libérés au Mali, la Française Sophie Pétronin, le Malien Soumaïla Cissé et deux Italiens
Le Mali a annoncé jeudi la libération de Sophie Pétronin, dernière otage française dans le monde, de l’homme politique malien Soumaïla Cissé et de deux Italiens, jusqu’alors présumés aux mains des jihadistes.
La présidence de la République « confirme la libération de M. Soumaïla Cissé et Mme Sophie Pétronin. Les ex-otages sont en route pour Bamako », a-t-elle indiqué sur Twitter.
Le gouvernement malien a ensuite annoncé dans un communiqué la libération des Italiens Nicola Chiacchio et Pier Luigi Maccalli, un prêtre enlevé au Niger en 2018.
Mme Pétronin et M. Cissé « sont dans l’avion pour Bamako », a dit un responsable de l’aéroport de Tessalit (nord), qui a dit les avoir vu embarquer.
Ils « ont affirmé qu’ils étaient contents avant de monter dans l’avion », a-t-il rapporté sous le couvert de l’anonymat compte tenu de la sensibilité de l’affaire.
Très peu de détails étaient disponibles dans un premier temps sur les circonstances de cette libération annoncée, qui se dessinait depuis le week-end et met fin à une épreuve de près de quatre années pour Mme Pétronin et de plus de six mois pour M. Cissé. La libération des deux otages italiens n’avait pas été évoquée jusqu’alors.
Aucune information n’a été fournie sur l’état de santé des otages libérés.
Une source proche des tractations a indiqué à l’AFP que l’opération avait été compliquée jusqu’au « dernier moment ». « Il y avait quelques problèmes. Mais, Dieu merci, tout se termine bien ».
Sophie Pétronin, 75 ans aujourd’hui, avait été enlevée le 24 décembre 2016 par des hommes armés à Gao (nord du Mali), où elle vivait et dirigeait depuis des années une organisation d’aide à l’enfance.
Soumaïla Cissé, 70 ans, deuxième à trois reprises de l’élection présidentielle, avait été enlevé le 25 mars alors qu’il faisait campagne pour les élections législatives dans la région de Tombouctou (nord-ouest).
Tous deux étaient présumés être détenus par des groupes islamistes armés liés à Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi).
Cette libération parachève une opération dont les dessous demeurent obscurs.
Elle a été précédée par la libération, depuis le week-end par les nouvelles autorités maliennes sous la coupe des militaires, d’un nombre considérable de prisonniers – plus de 200 ans selon un organe d’information d’Al-Qaïda – présentés par des responsables maliens comme des jihadistes.
Ces libérations ainsi que des déclarations de responsables maliens s’exprimant sous couvert d’anonymat suscitaient depuis quelques jours l’espoir que Sophie Pétronin et Soumaïla Cissé retrouvent leurs familles. Au même moment, le fils de Sophie Pétronin, Sébastien Chadaud, prenait l’avion à destination de Bamako.
« Immense soulagement »
Les autorités maliennes ont, jusqu’à jeudi soir, observé un silence total, les autorités françaises invoquant de leur côté l’exigence d’une totale discrétion, sévèrement mise à mal par quatre jours de publicité.
Le président français Emmanuel Macron a indiqué avoir « appris avec un immense soulagement la libération » de Sophie Pétronin, selon un communiqué de l’Elysée.
« À sa famille, à ses proches, j’adresse un message de sympathie. Aux autorités maliennes, merci. Le combat contre le terrorisme au Sahel se poursuit », a tweeté quelques minutes plus tard le président de la République.
Depuis sa capture, Sophie Pétronin était apparue dans des vidéos diffusées en 2017 et 2018 par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) alliance de groupes jihadistes affiliée à Al-Qaïda.
La dernière où on la voit autrement qu’en photo, publiée mi-juin 2018, la montrait très fatiguée, le visage émacié, en appelant au président français Emmanuel Macron.
Mobilisation des proches
Les images de l’otage n’ont cessé d’alarmer la famille. Les proches se sont mobilisés sans désemparer pour sa libération, pressant le président Emmanuel Macron et le gouvernement français d’accepter de négocier avec les ravisseurs.
M. Macron a assuré plusieurs fois que les services français travaillaient à sa libération « sans relâche », mais dans la discrétion. Des responsables de haut niveau ont exprimé leur opposition à toutes négociations avec les jihadistes.
Soumaïla Cissé, ancien ministre et chef de l’opposition parlementaire, est quant à lui la personnalité nationale la plus éminente kidnappée au Mali depuis que les rébellions indépendantistes et jihadistes de 2012 ont plongé le pays dans une crise sécuritaire profonde.
La spirale des violences a causé, avec les tensions intercommunautaires, des milliers de morts civils et militaires, malgré le déploiement de forces françaises et internationales, et s’est propagée au Burkina Faso et au Niger voisins.
Le sort de M. Cissé a constitué un des cris de ralliement de la contestation de plusieurs mois contre l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta.
Ce dernier a fini par être renversé par un putsch le 18 août.
Avec ces libérations, les nouvelles autorités de la transition installée pour 18 mois par les militaires peuvent se prévaloir d’une réussite spectaculaire, même si les détails de l’opération et la part prise par les différents acteurs restent à établir.
Plusieurs autres otages occidentaux resteraient détenus au Sahel.
De nombreux Français et étrangers ont été enlevés ou tués depuis 2010 dans le Sahel par des groupes jihadistes ou des malfaiteurs cherchant à monnayer leurs prises auprès des jihadistes.