Première passe d’armes en justice vendredi entre Ghosn et Renault
Carlos Ghosn affrontera vendredi son ancien employeur Renault, par avocats interposés, pour réclamer une indemnité de départ à la retraite de 250.000 euros devant le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine).
L’audience en référé (procédure d’urgence) est prévue à partir de 09H00 vendredi. Aucune décision sur le fond n’est attendue le jour-même. Si l’affaire est retenue, elle sera plaidée et la décision mise en délibéré dans un délai de 15 jours à un mois.
La saisie des prud’hommes par Carlos Ghosn, révélée en janvier, avait suscité plusieurs réactions indignées dans une France en plein débat sur la réforme des retraites.
« C’est indécent! C’est quelqu’un qui a massacré l’emploi, l’industrie et qui veut aller aux prud’hommes comme un salarié qui a été licencié (…) chez Renault », avait notamment déclaré le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez.
Le litige porte sur le non versement d’une indemnité de départ en retraite de 249.999,99 euros réclamée par Carlos Ghosn.
Ce dernier avait été contraint de quitter ses fonctions de PDG de Renault le 23 janvier 2019, quand il était en prison au Japon pour diverses malversations présumées révélées par le constructeur japonais Nissan (dont il présidait aussi le conseil d’administration).
Au printemps 2019, l’ancien dirigeant de 65 ans avait fait les démarches pour liquider ses droits à la retraite.
« Il bénéficie du versement de cette pension depuis le 1er juin 2019, tant au titre du régime de base que du régime Agirc–Arrco », a-t-on indiqué dans son entourage. « Or, en dépit de (…) ses demandes répétées auprès de (Renault), son indemnité de départ en retraite ne lui a toujours pas été versée », plus d’un an après son départ.
Du côté de Renault, on considère que M. Ghosn n’a pas droit à cette indemnité dans la mesure où il n’était plus salarié de l’entreprise depuis des années.
Les documents de référence du groupe au losange stipulent qu’on ne peut cumuler un statut de mandataire social avec un contrat de travail. Or, M. Ghosn disposait de ce statut de mandataire depuis sa nomination comme PDG en 2005.
Les défenseurs de Renault considèrent que le contrat de travail était dès lors rompu, tandis que ceux du dirigeant estiment qu’il n’était que suspendu.
– « J’ai des droits » –
La patron déchu avait été libéré sous caution et assigné à résidence au Japon avec interdiction de quitter le territoire. Mais il avait réussi à fuir le pays en fin d’année pour se réfugier au Liban, estimant qu’il n’aurait pas bénéficié d’un procès équitable alors qu’il nie toutes les accusations.
Début janvier, lors d’une conférence de presse à Beyrouth, Carlos Ghosn avait lancé une contre-attaque. « J’ai des droits vis-à-vis de Nissan, vis-à-vis de Renault, qui n’ont pas été respectés et je compte bien les réclamer en justice », avait-il prévenu.
Outre son indemnité de départ à la retraite, Carlos Ghosn réclame à Renault ses droits à une « retraite-chapeau » pour un montant brut de 774.774 euros par an ainsi que 380.000 actions, d’une valeur de près de 12 millions d’euros au cours actuel, qui lui avaient été attribuées entre 2015 et 2018 en récompense des bonnes performances du constructeur.
Sur ces deux sujets, Carlos Ghosn a menacé de saisir un tribunal de commerce qui devra essentiellement se prononcer sur les conditions de son départ.
L’intéressé estime avoir été contraint de se retirer pour permettre à Renault de fonctionner, compte tenu de son arrestation au Japon en novembre 2018. Dans sa lettre, il considère avoir informé Renault de sa décision de quitter l’entreprise afin de prendre sa retraite.
Mais le groupe au losange voit dans ce départ une démission qui annule ses droits à la « retraite-chapeau » et aux actions de performance.