L’or « valeur refuge », riche de 3.000 ans d’histoire
L’or a battu lundi son record historique, atteignant 1.944,71 dollars l’once dans les échanges asiatiques. Sa hausse a été alimentée par son statut de valeur refuge en pleine pandémie, fruit d’une longue histoire et de caractéristiques uniques.
Les premières mines d’or découvertes datent de 3.000 ans avant notre ère et ont été exploitées par les Égyptiens. Mais la répartition relativement équilibrée de l’or à l’échelle du globe a fait que de nombreuses civilisations anciennes s’y sont intéressées très tôt.
Si, au début, il était surtout recherché pour son aspect esthétique, il est ensuite devenu à partir de 700 ans avant Jésus-Christ, la base du système monétaire, avec l’argent.
Rare, relativement aisé à extraire, facilement malléable (il devient liquide à 1.064 degrés Celsius) et inoxydable, l’or dispose de nombreuses qualités, en plus de sa beauté, qui le rend très pratique et ont fait de lui le métal précieux par excellence.
Il conservera une prédominance dans le système monétaire international jusqu’en 1971 et la décision du président américain Richard Nixon de suspendre la convertibilité du dollar en or, faisant éclater le système de Bretton Woods hérité de la Seconde guerre mondiale. Entre temps, l’argent avait déjà perdu de son éclat, notamment avec la découverte de nombreux gisements sur le continent américain.
Si, aujourd’hui, l’or n’est plus communément utilisé comme moyen d’échanges, il reste une valeur privilégiée pour quiconque veut se protéger des aléas.
De par sa rareté, et donc son prix, « beaucoup de valeur peut être conservée dans un petit espace », explique à l’AFP Carlo Alberto De Casa, analyste pour ActivTrades et auteur d’un livre sur le métal précieux.
L’offre d’or étant constante dans le temps, comparée à celle d’autres matières premières comme par exemple le pétrole, il jouit d’une image de stabilité.
Entre 2018 et 2019, la production minière a très peu évolué, baissant d’environ 1%, et seule la hausse du recyclage a permis d’augmenter l’offre totale d’environ 3%.
Et le métal précieux, « contrairement au dollar et aux autres devises, ne peut pas être imprimé » à volonté, ajoute l’expert, tandis que les principales banques centrales du monde ont déversé des quantités inédites de liquidité pour affronter la crise économique.
En revanche, l’or n’offre pas de rendements, comme c’est le cas des obligations avec les intérêts, ou des actions avec le dividende.
Ce qui pourrait être un défaut en fait un atout en période de crise: sa valeur et son rendement (qui est donc nul) ne dépendant pas de la santé de l’économie réelle, il résiste bien aux soubresauts de l’activité et devient une valeur refuge vers lequel se ruent les investisseurs.
C’est également le cas d’autres métaux précieux, comme l’argent ou le palladium, mais ceux-ci étant en grande partie utilisés à des fins industrielles, leur demande a tendance à diminuer en cas de récession mondiale.
Si l’or est apprécié des investisseurs, il connait aussi ses détracteurs pour son improductivité, parmi lesquels Warren Buffett.
Selon le milliardaire américain, l’or « est extrait d’un trou en Afrique, ou ailleurs. Ensuite, on le fond, on creuse un autre trou, on l’enterre à nouveau et on paie des gens pour le garder. Il n’a aucune utilité. Quiconque nous regarderait depuis Mars se gratterait la tête ».
Plus ancien, l’économiste John Maynard Keynes avait raillé le précieux métal en le qualifiant de « relique barbare ».