Le gouvernement d’union libyen avance malgré un premier accroc

Le gouvernement d’union libyen a renforcé jeudi son autorité balbutiante à Tripoli, même si le chef des autorités non reconnues fait de la résistance dans la capitale, et l’ONU l’a appelé à se mettre au travail d’urgence.

La confusion qui règne à Tripoli démontre la fragilité du processus mis en oeuvre pour imposer le gouvernement d’union nationale soutenu par les Nations unies et les grandes puissances désireuses de sortir la Libye du chaos.

Le Premier ministre désigné de ce gouvernement, Fayez al-Sarraj, a réussi depuis son arrivée à Tripoli le 30 mars à engranger de nombreux soutiens, dont celui d’institutions économiques, et a aussi obtenu le ralliement des autorités non reconnues qui contrôlaient la capitale libyenne depuis août 2014.

Mais le chef de ce gouvernement parallèle, Khalifa Ghweil, a toutefois annoncé mercredi qu’il refusait de partir et qu’il demandait à son cabinet de rester en poste.

Il était difficile d’évaluer jeudi le soutien dont bénéficie à Tripoli M. Ghweil, un ingénieur de Misrata, une ville située à 200 km à l’est de la capitale et d’où sont originaires des milices ayant combattu les forces de Mouammar Kadhafi durant la révolte de 2011.

Fort des ralliements obtenus ces derniers jours, le gouvernement d’union a conforté jeudi son pouvoir avec la prise de contrôle du site internet officiel, où le logo de l’"Etat de Libye – Gouvernement d’union nationale" a remplacé celui du "Gouvernement de salut national" de Khalifa Ghweil.

Un communiqué a annoncé jeudi que "le site internet du Premier ministre" était "dorénavant sous la supervision du Bureau d’information (…) du gouvernement d’union".

Là où étaient inscrits jusqu’à présent les noms des membres du cabinet Ghweil figurent à présent ceux des membres du Conseil présidentiel, qui seconde le gouvernement d’union dirigé par M. Sarraj.

– ‘Bonne nouvelle’ –

C’est dans ce contexte incertain que l’envoyé spécial de l’ONU pour la Libye, Martin Kobler, a pressé jeudi devant le Conseil de sécurité le gouvernement d’union de "passer de la salle de conférence au travail pratique", selon des diplomates.

Au cours de consultations à huis clos, M. Kobler s’est montré "d’un optimisme prudent", soulignant que les conditions de sécurité restaient "fragiles" et la situation politique instable, ont indiqué ces mêmes sources.

L’ONU et les grandes puissances comptent sur M. Sarraj pour stabiliser ce pays riche en pétrole – la Libye dispose des plus importantes réserves d’Afrique – et confronté à la montée en puissance du groupe jihadiste Etat islamique (EI), présent notamment dans la ville côtière de Syrte.

Le président François Hollande et la chancelière Angela Merkel ont réaffirmé leur "soutien" à M. Sarraj à l’issue d’un conseil des ministres franco-allemand, à Metz (est de la France). Selon M. Hollande, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Marc Ayrault s’est entretenu jeudi avec M. Sarraj.

"La Libye peut être un chaos et offrir aux passeurs, aux trafiquants de toutes sortes, l’occasion de mettre des populations entières en danger et ensuite de faire arriver en Europe, en Italie ou à Malte, des dizaines de milliers de personnes", a estimé le président français.

– Long et chaotique –

Mais le processus de stabilisation en Libye s’annonce long et chaotique, avertissent les experts, qui soulignent toutefois le "pragmatisme" des responsables des différentes factions libyennes.

L’ONU exhorte depuis plusieurs jours les autorités qui contrôlent l’est du pays à adouber le gouvernement d’union, sur la base de l’accord interlibyen signé au Maroc en décembre 2015.

Le gouvernement d’union est soutenu par une courte majorité des députés du Parlement siégeant à Tobrouk (est) mais un vote solennel est nécessaire pour sa légalisation.

Pour tenter d’asseoir sa légitimité, le gouvernement d’union a ordonné mercredi à toutes les autorités l’ordre d’obtenir son feu vert pour effectuer toute dépense. Il compte pour cela sur la Banque centrale, qui lui a formellement apporté son soutien.

Dans les administrations, cependant, l’incertitude perdure.

"Nous ne nous rendons plus au siège du gouvernement depuis plusieurs jours car on nous a demandé de ne pas venir", a ainsi indiqué à l’AFP un fonctionnaire qui a préféré garder l’anonymat. "M. Ghweil n’est plus venu depuis plusieurs jours et nul ne sait où il se trouve en ce moment".

Khalifa Ghweil est apparu sur la scène publique de Tripoli en devenant en septembre 2014 l’adjoint d’Omar al-Hassi, nommé chef du gouvernement de salut national par la coalition Fajr Libya (Aube de la Libye).

Lorsque ce dernier a été limogé en mars 2015, M. Ghweil l’a remplacé comme Premier ministre.

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