Jacques Chirac, grand fauve de la politique française, est mort

L’ancien président Jacques Chirac, grand fauve de la politique française, celui qui a dit "Non" à la guerre en Irak en 2003, est mort jeudi à 86 ans, suscitant une pluie d’hommages du monde entier.

Jacques Chirac était l’une des grandes figures de la droite française dont la longévité, entre brillants succès et échecs cuisants, a démontré une exceptionnelle capacité de rebond.

Son nom a aussi été mêlé à plusieurs affaires judiciaires et il a été le premier président français à être condamné par la justice – en 2011 alors qu’il n’était plus au pouvoir – dans une affaire d’emplois fictifs.

"Le président Jacques Chirac s’est éteint ce matin au milieu des siens. Paisiblement", a annoncé à l’AFP Frédéric Salat-Baroux, époux de Claude, la fille de l’ancien président.

Un deuil national a été décrété pour la journée de lundi, avec notamment une messe en l’église Saint-Sulpice, l’un des plus grands édifices religieux parisiens. Les services religieux officiels se déroulent traditionnellement dans la cathédrale Notre-Dame, mais celle-ci est fermée au public depuis l’incendie qui l’a ravagée le 15 avril.

Le président Emmanuel Macron a salué dans une allocution télévisée "un grand Français, libre", qui incarna "une certaine idée de la France et du monde", le héraut d’une "France indépendante et fière, capable de s’élever contre une intervention militaire injustifiée lorsqu’il refusa en 2003 l’invasion de l’Irak sans mandat des Nations unies".

Emmanuel Macron s’est ensuite rendu, accompagné de son épouse Brigitte, au domicile de Jacques Chirac à Paris, près du Sénat, pour se recueillir devant sa dépouille.

Plusieurs centaines de personnes ont par ailleurs afflué dans la soirée au palais de l’Elysée pour rendre hommage à Jacques Chirac et signer des livres d’or mis à disposition jusqu’à dimanche.

Le Premier ministre Édouard Philippe s’est dit "très ému et un peu nostalgique".

Les dirigeants du monde entier ont réagi rapidement, certains évoquant avec émotion leur amitié pour celui qui a présidé la France pendant 12 ans, de 1995 à 2007.

La chancelière allemande Angela Merkel, "très attristée", a évoqué un "formidable partenaire et ami". Le président russe Vladimir Poutine a parlé d’un dirigeant "sage et visionnaire".

– "Débonnaire" –

Le Premier ministre libanais Saad Hariri, qui était un ami, a qualifié l’ancien chef d’Etat de "l’un des plus grands hommes de la France".

Le roi du Maroc Mohammed VI a salué un "grand homme d’Etat" et un "grand ami du Maroc".

"C’est un lion de la politique française qui disparaît", a commenté l’ancien Premier ministre de droite François Fillon.

De nombreux badauds avaient aussitôt convergé près du domicile parisien de Jacques Chirac. "J’avais fait sa campagne en 2002 comme petite main", témoignait parmi eux Thibaud, désormais collaborateur parlementaire. "Il faisait facilement des photos avec nous, c’était un grand homme qui aimait les gens, il était débonnaire et ne se forçait jamais".

Jacques Chirac, qui n’apparaissait plus en public depuis plusieurs années, fut aussi deux fois Premier ministre, trois fois maire de Paris, chef de parti et ministre à répétition.

Il restera sans doute dans l’Histoire comme le président français qui, en 2003, a refusé de participer à la guerre en Irak voulue par les Etats-Unis. Son ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin avait mené la bataille diplomatique à l’ONU, s’opposant à la guerre au nom d’un "vieux pays, la France, un vieux continent (…), l’Europe (…) qui a connu les guerres, l’Occupation, la barbarie".

– "Notre maison brûle" –

Il a aussi tenté de relancer la politique arabe de la France, fort notamment de son amitié avec les Premiers ministres libanais Rafic puis Saad Hariri.

Sur le plan intérieur, ses mandats de président resteront aussi marqués par la fin de la conscription militaire, la reconnaissance de la responsabilité de l’Etat français dans les crimes nazis, le passage du septennant au quinquennat pour la présidence et son cri d’alarme ("Notre maison brûle !"), lors du Sommet de la Terre de 2002, face à la dégradation de l’environnement dans le monde.

Jacques Chirac était parvenu à conquérir la présidence française en 1995 après deux défaites face au socialiste François Mitterrand (1981 et 1988).

En 2007, affaibli par un accident vasculaire cérébral qui l’avait frappé deux ans plus tôt, il laissait la place à Nicolas Sarkozy.

Perte de mémoire, absences, surdité : Jacques Chirac apparaîtra ensuite de plus en plus rarement en public.

Particulièrement populaire depuis qu’il avait quitté le pouvoir, Jacques Chirac avait pourtant essuyé de cuisants échecs. En 1988, alors qu’il venait d’être sèchement battu par François Mitterrand, son épouse Bernadette s’était désespérée que "les Français n’aiment pas (son) mari".

En 1997, sa dissolution de l’Assemblée nationale, qui devait lui permettre de conforter sa majorité, avait finalement provoqué une humiliante déroute de la droite en France.

Il avait aussi été rattrapé par les juges après son retrait de la politique.

Jacques Chirac vivait à Paris avec son épouse Bernadette. Il avait deux filles, Laurence, anorexique depuis sa jeunesse, décédée en avril 2016, et Claude, qui fut sa conseillère en communication.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite