Intenses combats au Nagorny Karabakh, la Turquie appelle à des « pourparlers à quatre »

D’intenses combats opposaient mardi forces séparatistes arméniennes du Nagorny Karabakh et armée azerbaïdjanaise, ignorant toujours une trêve humanitaire, tandis que la Turquie, grand soutien de Bakou, a proposé des « pourparlers à quatre » avec la Russie.

La Turquie, qui a pris fait et cause pour l’Azerbaïdjan depuis le début des derniers affrontements le 27 septembre, et la Russie, qui est engagée dans une alliance militaire avec l’Arménie, sont de facto les arbitres du conflit. Ankara a ainsi estimé qu' »il est temps de trouver un nouveau mécanisme » pour résoudre la question du Nagorny Karabakh, une région disputée depuis des décennies.

De tels pourparlers acteraient l’impuissance du Groupe de Minsk, médiateur historique du conflit co-présidé par la Russie, la France et les Etats-Unis, qui a parallèlement exhorté l’Arménie et l’Azerbaïdjan à respecter la trêve pour « éviter des conséquences catastrophiques » pour la région.

Le Secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo a lui aussi appelé les belligérants à « respecter leur engagement d’un cessez-le-feu » et à « cesser de cibler des zones peuplées de civils ».

Bakou et Erevan se rejettent la responsabilité des hostilités qui ont fait plus de 600 morts, dont 73 civils, selon des bilans partiels, l’Azerbaïdjan ne communiquant pas les décès parmi ses troupes. Et pour le quatrième jour consécutif, le cessez-le-feu censé être en vigueur depuis samedi est resté lettre morte.

« Après deux semaines de combats intenses, et s’intensifiant malheureusement (…) nous voyons que des centaines de milliers de personnes sont déjà affectées dans la région », a regretté le directeur Eurasie du Comité International de la Croix-Rouge, Martin Schuepp.

Selon lui, des « discussions continues » sont néanmoins en cours pour des échanges de corps et de prisonniers, un objectif de la trêve négociée à Moscou.

 Impasse diplomatique et militaire

 

Du côté du front, les séparatistes du Nagorny Karabakh accusent l’armée adverse d’avoir lancé une triple offensive au sud, au nord et au nord-est de la république autoproclamée.

Bakou de son côté affirme « respecter le cessez-le-feu », mais que l’adversaire arménien tirait sur les districts azerbaïdjanais de Goranboy, Terter et Agdam.

L’Azerbaïdjan semble avoir conquis quelques territoires, sans avoir gagné un avantage significatif sur les séparatistes qui tiennent les montagnes.

« L’Azerbaïdjan a enregistré certains succès militaires, mais rien de spectaculaire. Bakou est loin d’être prêt à prendre le contrôle du Karabakh », relève Guela Vassadze, expert au Centre géorgien d’analyse stratégique, évoquant une « impasse diplomatique et militaire ».

Dans le district de Terter (front nord), une équipe de l’AFP a vu au loin les forces azerbaïdjanaises pilonner les montagnes où se trouvent les positions arméniennes tirant sur la zone.

Dans une cave sombre, une vingtaine d’Azerbaïdjanais s’abritent. « On est là depuis seize jours. Tous les jours ils nous bombardent, malgré le cessez-le-feu. Hier et aujourd’hui, c’est sans arrêt », raconte Akiif Aslamiv, 62 ans.

Une scène similaire à celles dont les journalistes de l’AFP ont été témoins les deux semaines précédentes du côté arménien du front, où les civils se terrent aussi dans les abris.

Depuis Stepanakert, la capitale de la région séparatiste, on pouvait aussi entendre les tirs d’artillerie provenant du front sud.

 Œillets rouges et peluches

 

Le Nagorny Karabakh, territoire majoritairement peuplé d’Arméniens, a fait sécession de l’Azerbaïdjan, entraînant une guerre ayant fait 30.000 morts dans les années 1990. Les hostilités en cours sont les plus graves depuis 1994.

Après près de trente ans d’impasse diplomatique, le président azerbaïdjanais Ilham Alïev a juré de reprendre le contrôle de la région.

Les belligérants s’accusent par ailleurs de viser délibérément des zones civiles peuplées, de crimes de guerre et d’user de bombes à sous-munitions, une arme interdite.

A Gandja, deuxième ville d’Azerbaïdjan où un immeuble a été détruit faisant dix morts dimanche, des habitants déposaient des œillets rouges et des peluches aux abords des ruines.

Outre une potentielle crise humanitaire, la crainte de la communauté internationale est de voir ce conflit s’internationaliser, la Turquie étant en outre accusée d’avoir envoyé des combattants pro-turcs de Syrie se battre aux côtés des Azerbaïdjanais, ce que Bakou dément.

Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), 119 d’entre eux ont déjà été tués depuis le début des combats.

Enfin, l’évolution dans la région de l’épidémie de nouveau coronavirus inquiète l’Organisation mondiale de la santé (OMS) qui a constaté des cas en forte augmentation.

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