Les États-Unis, le Royaume-Uni, le Canada, le Japon, l’Allemagne, la France et l’Italie ont tous affirmé que l’adoption contre la Chine de mesures commerciales punitives figurerait à l’ordre du jour de leur sommet annuel de trois jours, l’objectif étant de soustraire les chaînes d’approvisionnement cruciales de l’influence chinoise.
Alors que le sommet devrait aboutir, selon les analystes, à une déclaration commune exprimant la préoccupation des pays face à ce qu’ils caractérisent de « coercition économique » de la Chine et une vision commune quant à la position à adopter vis-à-vis de la deuxième économie mondiale, la question est de savoir si les pays membres sont prêts à afficher un front uni.
Les Etats-Unis ont déjà adopté une approche ferme, bloquant l’accès de Beijing aux semi-conducteurs les plus avancés et aux équipements nécessaires à leur fabrication. La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, avait même appelé à une « action coordonnée » des pays du G7 contre Beijing, affirmant que Washington finalise un nouveau mécanisme de filtrage des investissements sortants visant la Chine.
Ces nouvelles restrictions américaines à l’investissement, dont le mécanisme de sélection devrait être dévoilé suite au sommet, seraient « de portée étroite » et « ciblées sur les technologies ayant des implications claires pour la sécurité nationale », avait expliqué Mme Yellen.
La Chine, pour sa part, rejette les accusations selon lesquelles elle utilise le commerce comme une arme. « Si le sommet du G7 met à l’ordre du jour la lutte contre la coercition économique, je suggère qu’ils discutent d’abord de ce que les États-Unis ont fait », avait déclaré le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Wang Wenbin, lors d’une conférence de presse.
« La Chine elle-même est victime de la coercition économique américaine et nous avons toujours été fermement opposés à la coercition économique des autres pays », a-t-il insisté.
Selon les analystes, si la position des Etats-Unis sur la question est sans équivoque, le Japon et l’Europe devraient se montrer “plus prudents” dans leurs prises de position au risque de perturber les relations avec la Chine, leur premier partenaire commercial.
« Nous recherchons une approche multidimensionnelle de nos relations économiques avec la Chine », avait d’ailleurs souligné la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. Mais « cette approche se caractérise par une réduction des risques et non par un découplage », a-t-elle noté.
La France et l’Allemagne ont, quant à elles, tenu à affirmer qu’il ne s’agit en aucun cas « d’un G7 antichinois », réfutant toute alliance contre la Chine, alors que l’Italie se trouve face à une impasse, devant rassurer les dirigeants du bloc quant à sa disposition à quitter l’initiative “la Ceinture et la Route”, sans pour autant attiser des tensions avec Beijing et risquer des représailles contre les entreprises italiennes déjà affaiblies par la pandémie.
Si rendre les chaînes d’approvisionnement moins dépendantes de la Chine est le sujet majeur de ce sommet d’Hiroshima, les analystes s’attendent à ce que le pays hôte remette sur la table les “activités de militarisation » de Beijing en mer de Chine méridionale, déjà discutées durant la réunion des ministres des Affaires étrangères du G7 en avril dernier.
Le Premier ministre japonais, Fumio Kishida, a averti à plusieurs reprises que “l’Ukraine pourrait être l’Asie de l’Est demain” et souhaite obtenir “un soutien tout aussi fort de la part de l’Europe sur la manière dont le G7 devrait s’attaquer à la Chine au risque d’un conflit à propos de Taïwan”.
Le chef du gouvernement nippon cherche ainsi à répondre d’une voix unie “aux ambitions militaires de la Chine”, mais des divergences à ce sujet sont apparues notamment après la visite du président français, Emmanuel Macron, à Beijing le mois dernier. Le dirigeant européen avait appelé l’UE à “réduire sa dépendance à l’égard des États-Unis” et l’avait également mise en garde contre le “risque de se laisser entraîner dans une crise à propos de Taïwan”.
Autre point important figurant à l’agenda du sommet est l’adoption de mesures pour contrer le non-respect des sanctions imposées à la Russie. Quinze mois après le début du conflit en Ukraine, les leaders du G7 entendent s’assurer que les sanctions contre la Russie ne sont pas contournées.
Les pays membres visent également le renforcement des sanctions contre Moscou avec des mesures portant sur le secteur énergétique russe et les exportations, tandis que Washington souhaiterait interdire toutes les exportations destinées à certains départements de l’armée russe.
Le Japon et l’UE se sont déjà opposés à cette proposition américaine jugée “irréaliste”, minimisant ainsi les chances d’une interdiction totale d’échanges commerciaux avec la Russie.
Même si les leaders du G7 sont loin d’avoir une réponse unanime aux questions à l’ordre du jour, ils s’accordent sur la nécessité d’efforts supplémentaires pour attirer des États non alignés qui hésitent à prendre parti dans le conflit en Ukraine.
Une liste inhabituellement longue d’invités non membres du G7 a ainsi été dévoilée, comprenant les dirigeants de l’Inde, de la Corée du Sud, de l’Australie, du Brésil, du Vietnam, de l’Indonésie, des Comores et des Îles Cook, un pas vu par les analystes comme une tentative du bloc de “resserrer les rangs tout en élargissant le cercle”.
Par ailleurs, selon des responsables nippons, le G7 devrait aussi faire une déclaration sur le désarmement nucléaire, un sujet auquel tient énormément le dirigeant japonais, qui a choisi d’organiser le sommet à Hiroshima, ville ravagée par la première bombe atomique de l’histoire en 1945.
Le sommet du G7 s’annonce ainsi comme un pari diplomatique compliqué à enjeux élevés, dans lequel la question de la Chine sera omniprésente et la volonté d’afficher un front commun contre la Russie s’imposera au centre des discussions.