Brexit: ultimes tergiversations sur les conditions de la future relation entre Londres et l’UE

Les tractations commerciales entre Londres et Bruxelles se poursuivaient jeudi après une nuit entière de pourparlers concentrés sur la pêche, retardant l’annonce d’un accord post-Brexit historique à la veille de Noël et à une semaine de la rupture définitive.

S’il est confirmé, ce divorce à l’amiable entre la Commission européenne et le Royaume-Uni, obtenu à l’arraché après dix mois de pourparlers harassants, scellerait près d’un demi-siècle de mariage houleux entre les deux partenaires.

La présidente de la Commission Ursula von der Leyen devait initialement s’entretenir en début de matinée avec le Premier ministre britannique Boris Johnson pour conclure la négociation, avant une annonce dans la foulée. Mais cet entretien n’a pas encore eu lieu.

« Ca bagarre sur les chiffres » de la pêche, dernier point d’achoppement des discussions, « et ça, c’est mauvais signe », a expliqué une source européenne. « Les négociations ne sont pas encore finies », a prévenu une deuxième source européenne.

Le ministre irlandais des Affaires étrangères, Simon Coveney, se voulait lui plus optimiste. « Il est certain que l’élan et l’attente sont tels que nous obtiendrons un accord Brexit pour la veille de Noël », a-t-il dit sur RTE.

Quatre ans et demi après le référendum de juin 2016 sur le Brexit, l’aboutissement de ces discussions permettrait aux deux parties de s’épargner un « no deal » aussi embarrassant sur le plan politique que dommageable au niveau économique.

 

– Prouesse –

 

La conclusion d’un texte de 2.000 pages en à peine dix mois constituerait aussi une prouesse pour Londres et Bruxelles, surtout pour un accord de cette envergure qui prend en général des années.

Deux ans et demi avaient été nécessaires pour négocier le traité de retrait scellant le départ britannique, conclu fin 2019, un texte qui apporte une sécurité juridique aux expatriés des deux côtés de la Manche et fournit des garanties pour le maintien de la paix sur l’île d’Irlande.

Un traité commercial devra encore être validé par les Etats membres, ce qui prendra plusieurs jours, pour une entrée en application provisoire le 1er janvier, quand le Royaume-Uni, qui a officiellement quitté l’UE le 31 janvier dernier, aura définitivement abandonné le marché unique. Le traité serait alors validé a posteriori par le Parlement européen.

Sans accord, les échanges entre l’UE et Londres seraient régis par les seules règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), synonymes de droits de douane, de quotas, ainsi que de formalités administratives susceptibles d’entraîner des embouteillages monstres et des retards de livraison.

Un scénario noir pour le Royaume-Uni, déjà malmené par une variante plus virulente du coronavirus qui l’a isolé du reste du monde.

Les négociations sont depuis lundi entre les mains de la présidente Ursula von der Leyen et de Boris Johnson, qui ont échangé à plusieurs reprises pour tenter de surmonter l’impasse sur la pêche.

Malgré son faible poids économique, le secteur revêt une importance politique et sociale majeure pour plusieurs Etat membres, dont la France, les Pays-Bas, le Danemark ou l’Irlande. Mais les Britanniques, qui entendent reprendre le contrôle de leurs eaux, en ont fait le symbole de leur souveraineté retrouvée.

– 5 milliards provisionnés –

 

Les tractations se concentrent sur le partage des quelque 650 millions d’euros de produits pêchés chaque année par l’UE dans les eaux britanniques et la période d’adaptation pour les pêcheurs européens dont la durée fait encore débat.

Les autres sujets jusque là problématiques –la manière de régler les différends et les mesures de protection contre toute concurrence déloyale– ont pour leur part été réglés ces tout derniers jours.

Avec cet accord, négocié par Michel Barnier côté européen et David Frost côté britannique, l’UE offrirait à son ancien Etat membre un accès inédit sans droits de douane ni quota à son immense marché de 450 millions de consommateurs.

Mais cette ouverture sera assortie de strictes conditions: les entreprises d’outre-Manche devront respecter un certain nombre de règles évolutives au fil du temps en matière d’environnement, de droit du travail et de fiscalité pour éviter tout dumping. Des garanties devraient aussi exister en matière d’aides d’Etat.

Un mécanisme devrait permettre aux deux parties d’activer rapidement des contre-mesures, comme des droits de douane, en cas de divergences sur ces normes.

En cas de « no deal », le Royaume-Uni perdrait beaucoup plus que l’Europe: les Britanniques exportent 47% de leurs produits vers le continent, quand l’UE n’écoule que 8% de ses marchandises de l’autre côté de la Manche.

Accord ou pas, l’UE a provisionné 5 milliards d’euros dans son budget pour soutenir les secteurs les plus touchés par le Brexit.

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