« Bordel »: une nouvelle saillie de Macron fait polémique

« Au lieu de foutre le bordel… »: une nouvelle saillie du président français Emmanuel Macron, coutumier des propos polémiques, a suscité jeudi des réactions politiques outrées brocardant « le mépris » de l’ancien banquier envers les moins nantis.

Lors d’un déplacement mercredi en Corrèze (centre), M. Macron s’entretenait avec un responsable local qui évoquait les difficultés à recruter d’une entreprise. M. Macron lui a alors répondu: "Certains, au lieu de foutre le bordel, feraient mieux d’aller regarder s’ils ne peuvent pas avoir des postes là-bas".

Cible de la remarque de M. Macron: "une délégation (du syndicat de gauche) CGT qui (…) est venue au contact et a décidé de gêner la visite", a indiqué ensuite le porte-parole du gouvernement Christophe Castaner, sans préciser s’il s’agissait bien du rassemblement de salariés et ex-employés licenciés de l’équipementier automobile GM&S, qui se sont heurtés aux forces de l’ordre. Leur usine à La Souterraine (Creuse) se trouve à environ deux heures de route de là.

Ce sont des mots "surprenants dans la bouche d’un président de la République", a concédé M. Castaner.

M. Macron "assume sur le fond", a assuré de son côté à l’AFP le porte-parole de l’Elysée, Bruno Roger-Petit. Pas de réel rétropédalage donc, même si l’on admet cette fois, dans l’entourage du chef de l’Etat, qu’il n’aurait pas employé dans un discours le terme "bordel", un "mot familier" utilisé "dans une discussion officieuse".

M. Macron "ne savait pas qu’il était filmé et, par conséquent, son registre de langage relevait du privé", a insisté Bruno Roger-Petit, alors que le chef de l’Etat était à ce moment-là entouré de journalistes, une perche pour capter le son au-dessus de lui.

Cette polémique éclate une semaine après la présentation d’un budget accusé de favoriser les plus riches, alors même que le chef de l’Etat vante ses mesures en faveur des classes moyennes et des salariés.

"C’est de l’arrogance"

A droite comme à gauche, on a fustigé un "président des riches" coupé des classes les plus populaires, alors même que M. Macron tente de se montrer proche des préoccupations sociales.

"C’est de l’arrogance", a cinglé jeudi Christian Jacob, le patron des députés Les Républicains (LR, opposition de droite). "Mépris de caste", a renchéri Florence Portelli, candidate à la présidence de LR.

A gauche, Jean-Christophe Cambadélis, ex-premier secrétaire du Parti socialiste, a estimé que "ça dit beaucoup de l’univers culturel du président de la République. Ce sont des propos classiques de droite".

Alexis Corbière, député du parti de gauche radicale La France insoumise, a évoqué "une langue de classe méprisante".

Pour le politologue Jérôme Sainte-Marie, la nouvelle déclaration polémique montre le vrai visage de M. Macron: "Macron parle comme on parle dans les entreprises, comme le patron de la France: il y a ceux qui bougent, qui dirigent, et les autres, les poids morts".

Pour Emmanuel Rivière, directeur général France de Kantar Public (institut Sofres), la petite phrase de Macron "contribue à éloigner le président en confortant une image d’une certaine brutalité et d’un président peu à l’écoute des plus démunis".

"Cela va ajouter au déplacement de ses soutiens vers la droite. Ses sympathisants de droite pensent un peu comme ça", a-t-il souligné.

Ce n’est pas la première fois que le président provoque ce genre de remous avec des phrases peu consensuelles et directes, plutôt inattendues dans la bouche d’un président de la République.

"Une gare, c’est un lieu où on croise des gens qui réussissent et des gens qui ne sont rien", avait-il dit en juillet. Ou encore à Athènes en septembre: "je ne céderai rien, ni aux fainéants, ni aux cyniques, ni aux extrêmes".

Avant d’être élu président, en septembre 2014, tout juste arrivé au gouvernement avec une image de technocrate brillant et d’ex-financier aisé, il avait parlé des salariées "illettrées" d’un abattoir breton, après le licenciement de près de 800 personnes.

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