Dans tous les cas de figure, au regard de la grave détérioration du pouvoir d’achat des algériens, d’une inflation galopante et d’une grogne sociale qui n’épargne aucune catégorie, ce ne sont pas les mesures décidées qui vont éteindre la flamme de la colère.
La mesure d’augmentation entre 2.000 DA (13 euros) et 6.000 DA (45 euros) soumise à toutes les retenues (taxes, IRG…), annoncée par le gouvernement pour soulager un tant soit peu les petites et moyennes bourses, n’aura fait qu’attiser la colère des fonctionnaires.
Elle ne permet pas de colmater la brèche béante subie par le portefeuille des Algériens par l’incapacité des pouvoirs à maîtriser la flambée des prix des produits de première nécessité.
Cette revalorisation attendue depuis plus de trois mois a provoqué une forte déception et le pouvoir en place a cherché de profiter de l’effet d’annonce en optant pour un saupoudrage, qui ne résout en rien les difficultés économiques structurelles dont souffre le pays et qui ne fait que retarder les réformes essentielles.
Cela fait que l’effet attendu a provoqué le contraire de ce qui est attendu. Au contraire on a eu droit à une véritable levée de boucliers comme le montrent les réactions hostiles de plusieurs syndicats.
Plusieurs syndicats et corporations se sont élevés contre ces augmentations, considérées comme « dérisoires » et « insignifiantes » et qui sont au cœur d’une colère qui ne fait que monter.
Le Syndicat national autonome des Inspecteurs du travail (SNAIT) a souligné qu’après une longue attente de la hausse des salaires au niveau du secteur de la Fonction publique, qui devait être importante, selon les déclarations des responsables, et qui a suscité tant d’espoir pour améliorer la situation sociale du fonctionnaire, il s’est avéré que cette augmentation ne peut pas répondre à ses préoccupations les plus élémentaires à l’ombre de la chute du pouvoir d’achat du citoyen et la hausse injustifiée des prix des produits de large consommation.
Dans un communiqué, le SNAIT a rappelé que « l’une de ses premières revendications est liée à la hausse de la valeur du point indiciaire et non le chiffre indiciaire ».
Dans ce sillage, le syndicat a demandé la révision de la grille indiciaire des traitements et le régime de rémunération des fonctionnaires, la hausse du point indiciaire à un niveau qui permet d’améliorer la vie socio-professionnelle du fonctionnaire, la révision du système indemnitaire et l’entame de réformes radicales et profondes du secteur de la Fonction publique.
D’autres syndicats autonomes du secteur de l’Education sont montés au créneau en estimant que les conditions économiques et sociales des fonctionnaires, notamment ceux du secteur de l’Education, sont devenues « insupportables à cause de la terrible chute du pouvoir d’achat ».
Dans un communiqué, une dizaine de syndicats ont fait savoir que les travailleurs sont très en colère.
« Attendue avec impatience, la révision du point indiciaire a abouti à une véritable mascarade, qui a provoqué une grande déception », dénonce ce collectif de syndicats.
Abondant dans le même ordre d’idées, le Conseil des enseignants des lycées d’Algérie (CELA) a fait part de sa « stupéfaction » suite à la publication du décret portant augmentation du point indiciaire tant elles sont « décevantes » et « ne répondant pas aux attentes des fonctionnaires publics » qui espéraient des mesures plus « dignes ».
« La politique de la fuite en avant entamée par les pouvoirs publics n’est qu’une mesure dilatoire car malgré ce qui est déclaré au sujet du rythme de la croissance économique, la situation sociale du fonctionnaire algérien est en constante régression », dénonce le syndicat.
« Ceci est une preuve flagrante de l’incapacité du gouvernement à gérer les défis actuels », peut-on lire dans un communiqué du CELA, qui n’écarte pas la possibilité de revenir sur le front social afin d’arracher ses droits.
Pour sa part, le Syndicat national autonome des auxiliaires médicaux en anesthésie et en réanimation de santé publique (Snaamarsp) a exprimé sa colère face aux augmentations annoncées.
Le Snaamarsp considère cette augmentation comme une « insulte » à l’égard des travailleurs, appelant les pouvoirs publics à reconsidérer cette décision et revaloriser l’augmentation en fonction de la réalité du terrain et d’une politique salariale plus juste.
De son côté, le coordinateur de la Confédération des syndicats algériens (CSA), Boualem Amoura a, dans une déclaration au journal « Liberté », qualifié d' »insignifiantes » ces augmentations dont les conséquences seront « lourdes ».
« Nous n’avons pas été associés ni dans le dossier de l’IRG ni dans celui du point indiciaire », déplore Amoura, qui évoque aussi la surprise des travailleurs lorsqu’ils ont appris la valeur de ces augmentations brutes, alors que le chef de l’Etat avait parlé d’améliorer leur pouvoir d’achat.
« 50 points ne représentent rien du tout. Ils représentent entre 2.000 et 6.000 DA et un maximum de 7.200 DA pour les plus anciens », regrette-t-il, se demandant : « Que peut faire un travailleur avec une augmentation de 1500 DA, le prix d’un kilo de raisins secs ? ».
« Je peux dire qu’on est déçu de cette décision qui ne va pas dans le sens de l’amélioration du pouvoir d’achat des travailleurs algériens. Ces augmentations sont vite absorbées par l’inflation et la hausse vertigineuse de tous les produits de consommation et des services », s’indigne-t-il.