Le bourreau des Tombouctiennes arrêté
A la tête du «Centre de recommandation du convenable et d’interdiction du blâmable», Ahmed Mohamed Mossa faisait régner la terreur dans les rues sablonneuses, n’hésitant pas à administrer lui-même les coups de fouet aux femmes jugées provocantes. Il suffisait de porter un vêtement jugé trop ample ou pas assez opaque pour être emmenée sans autre forme de procès dans la «prison des femmes», sise dans une agence de la Banque malienne de solidarité. La minuscule pièce où se trouvait le distributeur automatique avait été reconvertie en cellule. Une dizaine de femmes y ont été parfois entassées durant des heures, sans eau ni nourriture, et sans pouvoir se soulager.
Membre du Comité de crise, qui a fait l’interface durant neuf mois entre la population et ceux qu’il appelle «les occupants», Diadié Maïga a eu plusieurs fois affaire au numéro 3 d’Ansar ed-Dine. «C’était un homme implacable, il indisposait beaucoup les femmes, raconte-t-il. Nous avons dit aux chefs islamistes ce que la population lui reprochait. Au début, ils ont rejeté ces doléances, affirmant que celui-ci avait toute leur confiance, qu’il maîtrisait bien le Coran.» Le Comité de crise rassemble alors des témoignages accablants contre le tortionnaire avant de les présenter aux islamistes : «Lors d’une nouvelle audience, nous leur avons demandé "comment quelqu’un qui se dit religieux peut-il prendre la femme d’autrui sans raison et la maltraiter, l’enfermer et ainsi l’empêcher de prier ?"» Ce notable local assure avoir été entendu : peu après cette réunion, Mossa a été appelé à d’autres fonctions.
Abou Zeid, le chef d’Al-Qaeda au Maghreb islamique (Aqmi), a également beaucoup impressionné Diadié Maïga : «C’est un petit bonhomme d’un calme olympien, simplement vêtu, toujours muni de sa kalachnikov. Il était ouvert à la discussion mais très déterminé dans ses décisions.» Mahi Touré, l’un des responsables de la station locale Radio Bouctou, se souvient d’un individu ne payant pas de mine, passant inaperçu sur sa moto dans les rues de la ville. «Il était interdit de le prendre en photo», souligne-t-il.
C’est l’un des activistes les plus recherchés par Paris. Il détiendrait les quatre hommes d’Areva et de Vinci enlevés par un commando à Arlit, au Niger, en septembre 2010. A Tombouctou, plusieurs habitants affirment avoir aperçu les otages juste avant la prise de la ville par les soldats de l’opération «Serval». Les yeux bandés, ils auraient été embarqués dans un convoi de 4 × 4 parti plus au nord, peut-être en direction de Kidal. Des témoignages impossibles à vérifier en l’état.