"Toute personne qui accélère le changement climatique en réduisant la protection de l’environnement, qui vend plus d’armes dans une zone de conflit et qui ne veut pas résoudre politiquement des conflits religieux, eh bien cette personne met en danger la paix en Europe", a souligné le ministre des Affaires étrangères allemand Sigmar Gabriel, selon un communiqué.
"La politique à courte vue du gouvernement américain est contraire aux intérêts de l’Union européenne", a-t-il ajouté, quelques jours après la fin de la première tournée à l’étranger de M. Trump qui l’a conduit en Arabie Saoudite, en Israël à Bruxelles et au sommet du G7 en Italie.
S’exprimant devant la presse, M. Gabriel a aussi estimé que les tergiversations américaines sur le climat et les 110 milliards de dollars (98 milliards d’euros) de contrats d’armement à l’Arabie Saoudite, pays très critiqué pour son bilan en matière de droits de l’Homme, ont rendu "l’Occident plus petit, ou en tout cas plus faible".
Prendre son destin en main
La veille, c’est la chancelière Angela Merkel, une atlantiste convaincue, qui avait ouvert le bal en estimant que l’Europe ne pouvait plus totalement compter sur les États-Unis de Donald Trump et le Royaume-Uni post-Brexit.
«L’époque où nous pouvions entièrement compter les uns sur les autres est quasiment révolue. C’est mon expérience de ces derniers jours. Nous, Européens, devons prendre notre destin en main», a-t-elle dit.
«Notre amitié avec les États-Unis, avec le Royaume-Uni, notre bon voisinage avec la Russie, aussi avec d’autres pays, cela compte bien sûr. Mais nous devons savoir, nous devons nous battre pour notre propre futur, pour notre destin», a insisté la dirigeante la plus puissante d’Europe et qui vise un quatrième mandat.
Jusqu’ici ni les États-Unis ni les autres capitales européennes n’ont réagi directement aux propos de Mme Merkel et de son diplomate en chef. Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, «reste partisan de bâtir des ponts», s’est borné à commenter lundi son porte-parole Margaritis Schinas.
L’émissaire de l’UE dans les négociations sur le Brexit, Michel Barnier, s’est dit sur Twitter «d’accord avec Mme Merkel» sur la nécessité pour les Européens de se prendre en main, sans évoquer ses propos sur Londres et Washington.
Cette sortie critique exceptionnelle pour la chancelière faisait suite au sommet du G7 qui n’a notamment pas abouti à un engagement américain à respecter l’accord de Paris sur le climat. Angela Merkel avait déjà dénoncé samedi une situation «pas du tout satisfaisante».
Le sujet semble en tout cas faire l’unanimité en Allemagne entre les conservateurs de Mme Merkel et les sociaux-démocrates, famille politique de M. Gabriel.
Le concurrent de la chancelière aux élections de septembre, l’ex-président du Parlement européen Martin Schulz, a d’ailleurs défendu sa rivale lundi et accusé M. Trump de tabler «sur l’isolationnisme et le droit du plus fort» pour imposer ses vues.
Respect des valeurs
Dès le jour de l’élection de l’homme d’affaires, la chancelière avait signifié à Donald Trump qu’il devait se tenir aux valeurs des démocraties occidentales après une campagne marquée par les dérapages et les controverses.
Le président américain, avant et après son élection, ne s’est pas privé non plus d’attaquer l’Allemagne.
Fidèle à son discours anti-libre-échange, il a notamment adopté un ton très dur vis-à-vis des excédents commerciaux allemands, menaçant d’instaurer des taxes douanières en représailles.
La semaine dernière à Bruxelles, lors d’une rencontre avec le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, et celui du Conseil, Donald Tusk, le chef de l’État américain s’en serait à nouveau pris au commerce extérieur de l’Allemagne et aurait qualifié les Allemands de «très mauvais», selon l’hebdomadaire Der Spiegel.
En mars, après avoir pourtant qualifié d’«EXCELLENTE» sa rencontre à Washington avec Mme Merkel, M. Trump avait lancé sur Twitter une diatribe contre l’Allemagne, accusée selon lui de devoir «d’énormes sommes d’argent» à l’OTAN et aux États-Unis.
afp