Provisions de masques, annulations en rafale et mesures inédites: les pays infectés par le nouveau coronavirus dressent des remparts devant l’épidémie, qualifiée pour la première fois mercredi de « pandémie » par l’Allemagne, qui affole le monde entier et pèse sur l’économie planétaire.
En quelques semaines, les masques, gels désinfectants mais aussi gants ou combinaisons de protection sont devenus des denrées rares.
Après la France qui avait réquisitionné les stocks et la production des masques, la Russie a interdit mercredi l’exportation de matériel médical de protection, imitée par l’Allemagne.
Peu après, le ministre de la Santé du pays Jens Spahn osait pour la première fois prononcer le mot de pandémie, affirmant que « l’épidémie de coronavirus en Chine [s’était] transformée en pandémie mondiale », à l’heure où le Covid-19 touche 81 pays et territoires, a infecté plus de 94.000 personnes et fait plus de 3.200 morts.
Dans le pays, la compagnie aérienne Lufthansa a annoncé mercredi qu’elle allait immobiliser 150 de ses appareils, soit un cinquième de sa flotte, en raison de la baisse du trafic aérien résultant de l’épidémie.
En Chine, où l’épidémie a pris naissance en décembre et fait depuis 2.981 décès, le manque initial d’équipements de protection a entraîné la contamination de milliers de médecins et infirmières. Le pays a depuis converti des lignes de production de manteaux, couches et mêmes téléphones portables en chaînes de fabrication de masques ou de combinaisons intégrales.
La Omra suspendue
Le nouveau coronavirus affecte dorénavant tous les continents, sauf l’Antarctique, et perturbe la vie quotidienne dans un nombre croissant de pays.
L’Italie, premier foyer européen, qui a passé la barre des cent morts (107 morts pour 3.089 cas), envisage des mesures exceptionnelles. Le pays pourrait fermer toutes les écoles et universités à partir de jeudi et jusqu’à mi-mars pour faire face à l’épidémie, une décision qui doit être tranchée « dans les prochaines heures », selon la ministre de l’Education Lucia Azzolina.
Une solution également envisagée par le Royaume-Uni.
Face au danger, les autorités annulent ou reportent tout évènement ou rassemblement susceptible de constituer un risque de propagation au sein d’une foule.
Les compétitions sportives sont parmi les premières à pâtir de ces chamboulements: les deux demi-finales retour de la Coupe d’Italie ont été reportées, le gouvernement prévoit même de faire jouer à huis clos les matches ces deux prochaines semaines…
Deux évènements sportifs majeurs concentrent beaucoup de questions: l’Euro de football (12 juin-12 juillet) et les Jeux olympiques de Tokyo (24 juillet-9 août).
Les lieux religieux sont également ciblés. L’Arabie saoudite a décidé de suspendre « temporairement » la Omra, le petit pèlerinage musulman entrepris tout au long de l’année.
En France, le sanctuaire de Lourdes qui attire chaque année des millions de pèlerins catholiques a annoncé qu’il fermait ses piscines, les bassins sacrés où environ 350.000 personnes s’immergent chaque année.
Le Louvre, le musée le plus visité au monde, qui était fermé depuis dimanche, a en revanche rouvert mercredi.
« Réponse mondiale »
Devant la globalisation de la situation sanitaire, la patronne du Fonds monétaire international Kristalina Georgieva a déclaré mercredi que cette crise appelait « une réponse au niveau mondial » tandis que les pays membres de l’institution ont promis « tout le soutien nécessaire pour limiter l’impact » de l’épidémie, « confiants » dans leur capacité à « restaurer la croissance ».
Pour tenter de limiter ses répercussions économiques, la banque centrale américaine (Fed), la plus puissante du monde, a baissé en urgence mardi ses taux d’intérêt, une décision inédite sous cette forme depuis la crise financière de 2008.
Mardi, le G7, qui regroupe les six pays occidentaux les plus riches et le Japon, avait évoqué la possibilité de recourir à la relance budgétaire. De son côté, la Banque mondiale avait annoncé un plan d’urgence de 12 milliards de dollars pour aider les pays à contenir l’épidémie.
S’il est trop tôt pour quantifier précisément l’impact économique du coronavirus, le FMI a confirmé que la croissance mondiale serait en 2020 « inférieure » à celle de 2019.
Repli en Chine
Le virus continue de progresser dans le monde, mais cette propagation ralentit dans deux des pays les plus durement touchés: la Chine et la Corée du Sud.
En Chine, la quarantaine de 56 millions de personnes continuait dans la province centrale du Hubei, épicentre de l’épidémie et, pour le troisième jour consécutif, le nombre de nouveaux cas journaliers était en repli.
Le pays s’inquiète toutefois de nouvelles contaminations depuis l’étranger : au moins 13 Chinois rentrés de l’étranger ont été réinfectés ces derniers jours, dont huit mardi de retour d’Italie, troisième plus gros foyer après la Chine et la Corée du Sud (5.621 contaminations, dont 32 décès).
Les voyageurs qui arrivent à Pékin en provenance de Corée du Sud, d’Italie, d’Iran et du Japon se retrouvent désormais en quarantaine pendant 14 jours.
Les pays qui restaient encore à l’abri de la maladie se font moins nombreux chaque jour. De premiers cas ont été annoncés par la Pologne, l’Argentine, le Chili, le Sénégal ou Gibraltar ainsi que deux cas au sein des institutions européennes. L’Irak a fait état de son premier décès, au Kurdistan.
A un mois de la Pâque juive lors de laquelle des milliers de juifs du monde en entier se rendent en Israël, le pays qui recense 15 cas, impose désormais une quarantaine de deux semaines pour les voyageurs en provenance de France et de plusieurs autres pays européens (France, Allemagne, Suisse, Espagne et Autriche).