La Tunisie peine à relancer sa croissance mais pourrait éviter le pire

La Tunisie peine à relancer sa croissance mais pourrait éviter le pire
Neuf mois après la révolution et une saison touristique désastreuse, la Tunisie peine à relancer sa croissance et fait face à un chô mage persistant aggravé par le conflit en Libye, mais le pays entrevoit les prémices d’une reprise.

Le gouvernement de transition se targue d’avoir maintenu la continuité de l’Etat et a voulu rassurer les investisseurs en édictant un décret-loi pour lutter contre la corruption et le clientélisme cultivés sous le régime Ben Ali.

La croissance a entamé une timide reprise au troisième trimestre (+1,5%), après une récession en début d’année qui s’est traduite par une chute brutale du PIB de près de 8% entre janvier et mars. Le taux de chô mage est estimé à 19%, officiellement mais atteindrait les 20% avec l’arrivée de nouveaux diplô més, selon les experts.

"La situation demeure difficile en termes de croissance, d’emploi et de production mais l’activité économique commence à enclencher un trend haussier", assure le gouverneur de la Banque centrale Mustapha Ennabli.

Etincelle de la révolution partie de Sidi Bouzid dans le centre-ouest enclavé, le chô mage demeure un problème structurel et les partis en lice pour l’élection de dimanche y vont chacun de sa panacée.

"L’économie peut en effet s’en sortir dans les six mois à condition de mettre en oeuvre des moyens exceptionnels", estime l’économiste indépendant Lotfi Bouzaiane, plaidant pour "un pacte économique" qui a cruellement fait défaut à la Tunisie post-Ben Ali.

A l’instar du pacte politique qui a moralement engagé des partis politiques, un pacte économique aurait contribué à restaurer la confiance", explique à l’AFP cet expert international.

Selon lui, "des malentendus" persistent sur "la question des initiés", en l’occurrence les clans de Ben Ali et de son épouse Leila Trabelsi "qui ont contrô lé le cinquième de l’activité économique la plus rentable" (immobilier, télécom, transport, tourisme…)

Le tourisme (6% du PIB) a sévèrement pati des contrecoups de la révolution avec une chute sans précédent de 70% en février. L’afflux de Libyens fuyant le conflit dans leur pays et le retour timide de touristes français ont atténué le choc, à 34,4%, selon l’Office du tourisme (ONTT).

Le pays a reçu 3,6 millions de visiteurs contre une moyenne annuelle de 7 millions, les Algériens –près d’1 million par an– ont boudé le voisin en pleine tourmente révolutionnaire et Ramadan, selon l’ONTT.

La baisse (-24%) des investissements étrangers a surtout plombé le tourisme un secteur souffrant déjà d’une image "low cost" et tourisme de masse axé sur le balnéaire.

Plus 100 entreprises étrangères ont fermé causant la perte de 9.000 emplois. Les efforts du gouvernement et ses partenaires, France en tête, ont permis d’en crééer presque autant, dont 170.000 pour les diplô més chô meurs (700.000).

Quid de mégas projets annoncés en pompe par l’ancien régime? Les chantiers ont été désertés et l’avenir est désormais incertain pour des investisseurs du Golfe, généralement associés aux membres du clan Ben Ali.

"Les acteurs étaient exclus de la réflexion, cloisonnés dans des ilô ts sans liberté et sans vue d’ensemble sur les dysfonctionnemments du système", analyse M. Bouzaine.

La Tunisie devrait cependant éviter le pire, voire "renouer avec la croissance avec un potentiel de 7%, dans le cadre d’un pacte économique", assure-t-il.

Les prémices d’une reprise ont pointé grâce à une récolte céréalière exceptionnelle, la bonne santé du textile (off shore) et l’arrêt des grèves sauvages dans le secteur des phosphates pourvoyeur de devises.

L’issue du conflit en Libye, deuxième partenaire commercial après la France, offre de nouveaux horizons, le Premier ministre intérimaire Béji Caïd Essebsi a visité Tripoli et le patronat y a ouvert un bureau.

La crise libyenne a cependant fortement pesé sur l’économie: plus de 100.000 réfugiés au plus fort du conflit, pénurie d’eau, de sucre et de lait, retour de quelque 60.000 travailleurs tunisiens expatriés.

Le sommet du G8 avait adopté fin mai le principe d’un financement de 20 milliards de dollars au profit de l’Égypte et de la Tunisie, un engagement que des élections devraient aider à concrétiser.

Premier partenaire de la Tunisie échaudée par les dérives de l’ancien régime, l’Union européenne a traîné des pieds au début de la révolution avant d’engager 4 milliards d’euros (prêts et dons 2011-2013).

La Tunisie espérait plus: l’octroi rapide d’un statut avancé avec l’UE (partenariat privilégié) retardé faute de progrès démocratiques sous Ben Ali.

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