Joyeux Ramadan J-4

– Narjis Rerhaye –

Depuis que Hajja Meftaha, ta grand-mère, s’en est allée cet automne –c’était juste avant les législatives, tu t’en souviens parce que la tante de ta mère avait chuchoté en plein gnaza que cela faisait une voix de moins au PJD- ton grand-père est devenu irascible. Il ne supporte plus les partis politiques. Sa regrettée épouse, que Dieu l’accueille en sa sainte miséricorde, avait toujours servi d’adoucissant dans ses rapports à la politique, organisant des walimate –Ah les tajines de Hajja Meftaha !-à la maison pour recevoir du beau linge partisan. Ton Istiqlalien de grand-père avait alors appris à mettre de l’eau dans son vin.

Mais là, c’est terminé, achevé, fini. Haja Meftata avait emporté avec elle dans la tombe la discipline partisane de son mari qui ne se remet toujours pas du décès de son épouse. La politique le poursuivra jusqu’au ton grand-père. La mort de ta grand-mère coïncide avec celle quasi-clinique des partis dits historiques. C’est en tout cas ce qu’affirme ton grand-père. Au f’tour familial de ce quatrième jour de Ramadan et devant toute ta tribu réunie pour la circonstance dans le salon ultra- beldi de ta tante, bent l’ONEP son sobriquet depuis qu’elle a déménagé dans les beaux quartiers de Rabat, il s’est lancé dans sa diatribe contre les partis du mouvement national. C’était juste avant le muezzin, à l’heure où tout le monde est autour de la table emplie de mille mets préparées par la nouvelle cuisinière que ta tante paie à prix d’or.

« Et les batailles rangées à l’Istiqlal ? Allal Al Fassi doit se retourner dans sa tombe. De mon temps, les leaders étaient de vrais leaders, pas des mécaniciens. On n’osait même pas respirer devant eux Et l’USFP, parlons-en. Un candidat unique successeur à sa succession. Un parti qui perd les élections et qui se retrouve au pouvoir quand même. Mais c’est quoi cette pratique politique qui se chabatise et se lachgarise », tonne ton grand-père.

Fort heureusement, presque personne n’avait entendu sa dernière phrase. L’appel de la prière d’Al Maghrib avait couvert sa réflexion sur la pratique politique. Fin de la séquence ? C’est mal connaître le mari de ta tante qui ne jure plus que par la gauche de la gauche depuis qu’il a assisté à une conférence de Nabila Mounib à HEM. A l’heure du café, viennoiseries et salés –commande spéciale chez un traiteur de Fès où il faut montrer patte blanche, précise ta tante bent l’ONEP- il brandit ce sondage politique publié par un quotidien casablancais. « 16 ministres de ce gouvernement, et pas des moindres, ne sont même pas cités par les sondés. Des ministres comme Boussaïd, Nasser Bourita, Mohamed Yatim, Nabil Benabdallah ou encore, Laftit et Bassima Hakkaoui sont cités par 5 à 1% des personnes interrogées. Tu parles d’un gouvernement populaire et d’un délai de grâce ! ».

Ton grand-père qui n’a jamais vraiment apprécié le mari de ta tante voit soudain en lui un allié. C’est bien la première fois. Ramadan, mois de tous les miracles ?

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