Hymne national, drapeaux, larmes : Paris submergé par l’émotion dit non au terrorisme

Un million et demi de personnes, des larmes, des sourires, et un cri : « Charlie! Charlie! »: Paris a connu dimanche un rassemblement d’une ampleur inouïe pour dire non au terrorisme, une marche marquée aussi par la stupéfiante image de dirigeants internationaux battant le pavé parisien.

Le rassemblement est "sans précédent" et un comptage officiel est "impossible", a même reconnu le gouvernement, alors que plus d’un million de personnes ont aussi manifesté en province, pour exprimer leur solidarité avec les victimes d’une série d’attaques ayant fait 17 morts et une vingtaine de blessés en trois jours en France. Il pourrait s’agir de la plus importante mobilisation en France depuis la Libération en 1944.

Dans une atmosphère à la fois recueillie et joyeuse, solennelle et bon enfant, une foule de tous âges a envahi les grandes artères menant à la place centrale de la République, lieu de départ du cortège organisé. Mais beaucoup doutaient d’y arriver avant plusieurs heures.

La marche était également inédite par sa dimension planétaire et cette image de dirigeants et responsables étrangers dont certains sont en conflit – Israël-Palestine, Ukraine-Russie… – serrés les uns contre les autres et défilant sur quelques centaines de mètres.

François Hollande entouré du président malien Ibrahim Boubacar Keita et de la chancelière allemande Angela Merkel, le président palestinien Mahmoud Abbas à quelques mètres du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, le Britannique David Cameron, le roi de Jordanie, ont été applaudis par la foule à leur arrivée à la marche, et ont observé une minute de silence. Après avoir fait environ 300 mètres d’un parcours qui compte au total 3,5 kilomètres, ils ont quitté le défilé pour retourner à l’Elysée, siège de la présidence française.

M. Hollande a ensuite longuement salué les familles et proches des victimes, qui étaient en tête du cortège.

"Paris est aujourd’hui la capitale du monde. Le pays tout entier va se lever vers ce qu’il a de meilleur", avait prédit le président français peu avant de rejoindre les manifestants brandissant des slogans tels que "Faites l’humour pas la guerre", "Paris stand up for freedom". Plus loin, l’Hymne à la joie de Beethoven retentissait depuis une fenêtre donnant sur le parcours, sous les applaudissements de la foule.

– Tous Unis, réunis, ravis –

-"Je suis Charlie, je suis juif, je suis policier" : ce slogan résumait l’hommage rendu aux victimes de ces attaques : douze morts, dont sept journalistes, et deux policiers mercredi dans l’attentat contre l’hebdomadaire satirique à Paris, une policière tuée jeudi près de Paris, et quatre Juifs tués dans la prise d’otages vendredi dans un supermarché casher à Paris.

"On est tous unis, réunis, ravis", souriait René Sartore, un cadre de 43 ans, tandis que Lassina Traore, un Français musulman, voyait dans cette marche "un signe de la force de la France". "On peut vivre ensemble parce qu’on partage les mêmes valeurs", assurait de son côté Daniel, 30 ans, musicien et juif.

Sur la place de la République, les manifestants agitaient des drapeaux français, mais aussi de Palestine, de Tunisie, d’Ukraine, du Liban, débattaient ou communiaient dans l’émotion et la solidarité.

Fait rarissime en France, les forces de l’ordre ont été applaudies et saluées par les manifestants. D’autres manifestations de patriotisme, plutôt inhabituelles, comme la Marseillaise, l’hymne national français, ou des drapeaux français brandis, ont été signalés.

Le parcours du défilé était sous haute protection policière, avec des tireurs d’élite postés tout au long du parcours.

Des manifestations étaient aussi en cours dimanche dans de nombreuses capitales d’Europe et d’Amérique, avec des milliers de personnes réunies à Madrid, Londres, Bruxelles ou Washington.

– L’enquête s’accélère –

De leur côté, les enquêteurs progressaient dans leurs investigations concernant Amedy Coulibaly, l’un des trois jihadistes impliqués dans les attaques qui ont secoué la France.

Auteur de la prise d’otages du supermarché juif dans l’est de Paris (dont les quatre victimes juives seront inhumées en Israël) et du meurtre d’une policière à Montrouge, dans la proche banlieue parisienne, Coulibaly est en outre soupçonné de l’agression d’un joggeur mercredi, grièvement blessé par balles.

A l’épopée sanglante menée ces derniers jours par ce délinquant multirécidiviste de 32 ans -déjà condamné dans une affaire d’extrémisme islamiste, pourrait s’ajouter l’explosion d’une voiture piégée jeudi soir à Villejuif, près de Paris.

C’est en tout cas ce qu’affirme une vidéo postée dimanche matin sur internet.

Dans la matinée de ce dimanche historique, une conférence internationale sur le terrorisme a eu lieu à Paris. Les ministres européens et américain de l’Intérieur ont appelé à renforcer les contrôles des mouvements aux frontières extérieures de l’Union européenne. Un sommet pour combattre l’extrémisme se tiendra le 18 février aux Etats-Unis, a annoncé le ministre américain de la Justice, Eric Holder.

Avant d’être tués par les commandos français vendredi, les frères Chérif et Saïd Kouachi, responsables de la tuerie à Charlie Hebdo, ont affirmé agir au nom d’Al-Qaïda tandis qu’Amedy Coulibaly s’est revendiqué du groupe Etat islamique.

Eric Holder a toutefois estimé dimanche qu’il n’y avait "pas d’information crédible" attestant qu’Al-Qaïda ou que l’EI soit derrière les attentats.

"La France n’en a pas terminé avec les menaces", a averti vendredi le président français, alors que le gouvernement a reconnu "des failles" dans la sécurité du pays engagé sur plusieurs théâtres d’opération contre les mouvements jihadistes.

Selon un sondage publié dimanche, plus de huit Français sur dix disent craindre d’autres attentats dans les semaines à venir.

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