Selon des témoins, la plupart des blessés l’ont été par des voyous en civil, croit-on, qui ont bombardé à l’aide de pierres et d’engins incendiaires des manifestants qui ont riposté à coup de pavés arrachés sur les trottoirs.
Les gendarmes, armés de pistolets Taser et de matraques, sont intervenus en tirant en l’air pour empêcher la foule de s’approcher du bâtiment abritant le ministère de la Défense.
Le ministère de la Santé a publié à la télévision nationale un bilan global faisant état d’au moins 143 blessés.
Auparavant, des milliers de personnes avaient marché dans le calme sur le ministère de la Défense pour exiger de l’armée au pouvoir une accélération du processus de réformes au lendemain de la dispersion par la force d’une manifestation à Alexandrie.
Quelques heures auparavant, le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, président du Conseil suprême des forces armées (CSFA, au pouvoir depuis le renversement, le 11 février, du président Hosni Moubarak), a promis l’organisation d’élections pour faire de l’Egypte un pays démocratique.
Quant au Premier ministre, Essam Charaf, il a invité sur Facebook ses compatriotes à travailler "dans le calme et la stabilité, en respectant le principe du dialogue pour permettre au gouvernement de remplir sa mission". "Le gouvernement est tout à fait désireux de mettre en oeuvre les exigences de la population en faveur de la liberté, de la démocratie et de la justice sociale", a-t-il affirmé.
Des véhicules de l’armée avaient bloqué l’accès principal au ministère de la Défense où siège le CSFA, et des gendarmes avaient pris place pour faire face aux manifestants.
Le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui a quitté son ministère avant l’arrivée des manifestants.
"Le peuple veut le départ du maréchal Tantatoui", scandaient les manifestants qui marchaient sur le ministère de la Défense tout en paralysant la circulation.
Les jeunes Egyptiens qui campent depuis deux semaines sur sur la place Tahrir, épicentre de la contestation politique, ont juré de rester jusqu’à ce que leurs revendications soient satisfaites.
Vendredi, des violences ont éclaté dans plusieurs villes du pays entre gendarmes et manifestants, faisant 14 blessés, dont quatre parmi les forces de l’ordre.
"UN ETAT CIVIL MODERNE"
Dans son discours télévisé prononcé samedi à l’occasion de la Fête de l’armée qui commémore le renversement en 1952 du roi Farouk par les "officiers libres" emmenés par Gamal Abdel Nasser (1918-1970), le maréchal a souligné que son mandat était de faciliter l’avènement d’un gouvernement élu en Egypte.
"Nous sommes attachés à faire de l’Egypte un Etat civil moderne", a-t-il dit lors de ce discours, son premier à la nation depuis la chute d’Hosni Moubarak.
"Nous irons de l’avant pour consolider la démocratie en garantissant les libertés et les droits des citoyens par le biais d’élections libres et équitables".
Mohamed Hussein Tataoui, qui a été deux décennies durant le ministre de la Défense du "raïs" déchu, n’a pas avancé de réponses particulières aux revendications des révolutionnaires.
A la veille du 23 juillet, la gendarmerie a tiré en l’air et battu des manifestants qui bloquaient une rue d’Alexandrie vendredi, selon des témoins.
Un autre accrochage dans la ville portuaire de Suez a alimenté la colère des jeunes révolutionnaires.
Dans un communiqué publié sur sa page Facebook, le CSFA a nié avoir utilisé la force et accusé le Mouvement du 6-Avril, un des groupes qui avaient appelé au soulèvement contre Hosni Moubarak, de chercher à semer la division entre l’armée et le peuple.
Le Mouvement du 6-Avril a dénoncé des "allégations mensongères" et promis de "ne pas se laisser intimider".
"Nous serons les derniers à quitter Tahrir, soit vivants et la tête haute après avoir obtenu triomphalement la réalisation des demandes du peuple égyptien, soit en martyrs pour le bien de Dieu et du pays", a ajouté le groupe.
Les jeunes révolutionnaires de la place Tahrir, qui réclament une rupture plus rapide et plus complète avec l’ancien régime, n’ont pas été satisfaits par le remaniement du gouvernement annoncé jeudi, jugeant celui-ci insuffisant en raison notamment du maintien de ministres contestés.
Pour quitter Tahrir, ils exigent également le transfert d’une partie des pouvoirs de l’armée au gouvernement de transition, l’abandon des tribunaux militaires pour juger les manifestants, le jugement rapide des responsables du régime Moubarak et des policiers accusés d’avoir tiré sur les manifestants pendant la révolution, ou encore la hausse du salaire minimum.