"Quand il s’agit de réformes économiques, d’ouverture, de mondialisation, de l’Europe et de ses institutions, certains souverainistes de gauche ont exactement le même discours que l’extrême droite", a lancé le président de la Commission, José Manuel Barroso, lors d’un point de presse.
Il réagissait à une charge menée contre lui par le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg. Commentant dimanche la progression du Front national lors d’une élection partielle dans le sud de la France, ce dernier avait accusé M. Barroso d’être "le carburant du Front national" pour avoir qualifié récemment la position française sur l’exception culturelle de "réactionnaire".
Lundi matin, un porte-parole de la Commission européenne avait dénoncé "les souverainistes de gauche et de droite". Mais quelques minutes plus tard, M. Barroso a franchi un cran supplémentaire dans la réplique en mettant dans le même sac une partie de la gauche française et l’extrême droite.
Le porte-parole a aussi dénoncé le "chauvinisme" français. "Il faudrait que certains responsables politiques français abandonnent certaines ambiguïtés vis-à-vis de l’Europe et la défendent davantage vis-à-vis du nationalisme, du populisme, voire du chauvinisme", a déclaré Frédéric Vincent.
M. Montebourg, qui s’était fait pendant la campagne présidentielle française le chante de l’antimondialisation, a aussi accusé la Commission d’agir contre les peuples européens et de donner ainsi "raison à tous les partis souverainistes et anti-européens". Une autre ministre, la verte Cécile Duflot, a dénoncé lundi une Europe "gendarme qui regarde de haut les pays".
Alors que le président François Hollande se pose toujours en Européen convaincu, le centriste François Bayrou (Modem) a pointé lundi un "problème majeur de ligne gouvernementale" et le président du principal parti de droite, Jean-François Copé (UMP) a dénoncé "l’incohérence" du gouvernement.
Ce nouvel accrochage survient sur fond de tensions persistantes entre Paris et Bruxelles sur la réduction des déficits français et de réformes structurelles, avec une récente passe d’armes sur la réforme des retraites. M. Barroso s’en est d’ailleurs pris lundi à ceux qui "essaient de faire de la Commission le bouc émissaire de leurs propres difficultés".
Mais les traditionnelles critiques contre la Commission se sont faites plus personnelles ces derniers jours contre son président: de Jean-Christophe Cambadélis, secrétaire du PS chargé de l’Europe, à la députée européenne et ancienne ministre UMP Rachida Dati, certains responsables politiques français n’hésitent plus à demander le départ de M. Barroso, dont le mandat à la tête de la Commission s’achève fin octobre 2014.
Conformément à sa ligne anti-européenne, la présidente du FN, Marine Le Pen, a estimé lundi que le problème n’était pas M. Barroso. "José Manuel Barroso est une catastrophe pour notre pays et notre continent, mais il l’est d’abord et avant tout parce qu’il est l’homme d’un système européen devenu fou", a-t-elle affirmé.
De son côté, M. Barroso a une nouvelle fois tenté de minimiser ses déclarations sur l’exception culturelle. "Mes propos ont été mal compris", s’est-il défendu. "J’ai toujours dit que l’exception culturelle, c’est sacré, qu’on ne doit pas faire de marchandage de la culture". Dénonçant une "polémique absurde, comme si moi-même et la Commission étions contre la diversité culturelle", il a insisté: "c’est faux, absolument faux".
"La Commission réaffirme que l’Europe demeure le meilleur moyen pour façonner la mondialisation", a assuré son porte-parole, plaidant pour que les institutions européennes et les Etats membres "travaillent ensemble pour peser de tout notre poids".