Au Maroc, la colère gronde après un inattendu changement d’heure légale

Narjis Rerhaye (A Rabat)

Dimanche 28 octobre, les Marocains se sont réveillés sans savoir à quelle heure se vouer. Si le gouvernement a officiellement -et sans crier gare- décidé de maintenir l’heure d’été en la décrétant désormais heure légale du Maroc, les smartphones en ont convenu autrement, défiant l’oukase gouvernemental : ils ont retranché 60 minutes aux horloges des portables. « Bref, ce dimanche au Maroc, plus personne ne savait quelle heure il était », résume à moitié amusé cet internaute.

La compagnie aérienne nationale a, elle, tenté, de limiter les dégâts en prévenant les voyageurs de tous les retards et perturbations provoqués par ce changement d’heure. L’attente est longue. La colère gronde. Depuis l’annonce inattendue de l’adoption de la nouvelle heure légale GMT+1, les réseaux sociaux sont ébullition. Les internautes ne décolèrent pas. Sur la Toile, les initiatives se multiplient. Les appels au boycott de l’heure légale défilent au fil des pages Facebook.

Une pétition sollicitant 10 millions de signatures pour demander le retour à l’heure GMT a été mise en ligne. « Un air de désobéissance civique et virtuelle s’installe. Jusqu’où ira-t-il ? Quelles proportions prendra-t-il ? », se demande un sociologue de la place. « Le gouvernement se venge de nous parce que nous avions appelé au boycott de marques », « Quel est l’intérêt d’un tel changement d’heure décidé à la sauvette et surtout sans demander l’avis des citoyens de ce pays », « pour qui nous prennent-ils ? ». Les internautes laissent libre cours à leur condamnation du gouvernement et d’une décision à l’évidence impopulaire.

Durant tout le week-end, l’Exécutif a redoublé de pédagogie tentant d’expliquer les bienfaits d’une telle décision qui « ne serait pas tombée du ciel ». « Plusieurs pays on adopté l’horaire d’été comme la Turquie ou encore Singapour. Ces pays ont ainsi réussi à créer une réelle dynamique économique puisque les ménages après les horaires de travail ont encore du temps pour pratiquer plusieurs activités créatrices de valeur pour l’économie. Ceci en plus de l’économie d’énergie, tout en évitant les pics de consommation et les coupures d’électricité. De plus, nos études très avancées sur le sujet nous ont permis de déduire que le GMT+1 procure plusieurs avantages à l’économie nationale », déclarait le ministre de la fonction publique au journal « Les échos » tout en s’appuyant sur une mystérieuse étude.

Les arguments n’ont pas convaincu grand-monde. Les mesures d’accompagnement annoncées avec fanfare n’ont servi qu’à augmenter la colère des citoyens. « Du changement des horaires des établissements scolaires à la flexibilité de ceux administratifs, les Marocains sont complètement perdus. Ils ignorent de quoi demain sera fait ! », s’exclame ce cadre supérieur.

Ce lundi matin, les écoles marocaines sont fermées. Elèves et écoliers sont en vacances. De nouveaux horaires seront en vigueur dès la semaine prochaine dans les établissements scolaires. L’horaire continu adopté par les écoles et lycées privés sera-t-il abandonnés comme le stipule le communiqué du gouvernement marocain ? « Mais nous n’en savons rien. Personne n’est capable de répondre à cette question. Nous même nous ne savons pas ce qui va se passer. Nous n’avons pas d’interlocuteur au ministère de l’éducation nationale. Le téléphone de l’école n’arrête pas de sonner depuis ce matin. Les parents sont encore plus perdus que nous », a déclaré à Atlasinfo cette directrice d’établissement scolaire à Rabat.

La nouvelle heure légale prend aussi les proportions d’une affaire politique. Le parlement s’est emparé de la question. Le groupe parlementaire des islamistes, le parti du chef de gouvernement, a d’ores et déjà interpellé l’Exécutif.

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que vous êtes d'accord avec cela, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite