Asma el-Assad, femme de dictateur

Asma el-Assad, femme de dictateur
On la compare souvent à Marie-Antoinette, reine étrangère aux revendications du peuple et aux enjeux de la révolution française de 1789. Muette face aux massacres de 2011 et 2012 qui ont déjà fait plus de 9000 morts en Syrie, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, Asma el-Assad est désormais dans le collimateur de Bruxelles : ce vendredi 23 mars, son nom a été ajouté à la liste des personnes dont l’Union européenne s’apprête à geler les avoirs et auxquelles elle ne délivrera plus de visas. Celle dont l’arrivée à Damas pour épouser Bachar el-Assad, en décembre 2000, avait suscité un certain espoir, rejoint donc ces « Femmes de dictateurs » dont l’historienne Diane Ducret racontait brillamment les destinées, dans un livre paru l’an dernier aux éditions Perrin : Elena Ceaucescu, Jiang Qing, ou encore Eva Braun.

La jeunesse, la beauté et l’élégance d’Asma el-Assad ont longtemps fait illusion. Aujourd’hui âgée de 36 ans, cette jeune femme, née à Londres d’un père médecin originaire de Homs et d’une mère diplomate, était la face souriante d’un régime dictatorial. Avec ses ONG consacrées aux femmes et aux enfants des camps de réfugiés, elle donnait l’image d’une « première dame » cherchant à adoucir le sort de ses compatriotes. Et c’était probablement ce que l’on pouvait attendre d’une diplômée du Queen’s College de Londres, diplômée en informatique puis spécialiste des fusions et acquisitions chez JP Morgan, avant de tomber amoureuse d’un fils de tyran. Sa personnalité, au côté de Bachar el-Assad, a donné du crédit à l’image d’homme neuf qu’il était parvenu à se créer auprès des pays occidentaux. En le recevant à l’Elysée, Nicolas Sarkozy prenait le pari qu’il allait changer son pays.

Dès le début du printemps arabe, pourtant, l’insensibilité d’Asma el-Assad aux souffrances de son peuple est apparue au grand jour. Non seulement elle ne plaidait pas en faveur de l’ouverture auprès de son mari, mais sa futilité faisait les gorges chaudes des bloggeurs syriens. La révélation récente, par le quotidien anglais The Guardian, de certains de ses mails est à cet égard sans équivoque : plus que la démocratie, ce sont les colliers de diamant et les chaussures Louboutin qu’elle chérit. Quand l’armée syrienne massacrait ses compatriotes, elle continuait à en commander par Internet, particulièrement chez Harrods, ce symbole du luxe londonien.

Le magazine américain Vogue, lui, n’a pas senti le vent tourner. En mars 2011, il a fait paraître un article dithyrambique sur la première dame syrienne. « Asma el-Assad est glamour, jeune et très chic – c’est la plus fraîche et la plus magnétique des premières dames », assure l’auteur en attaque de son papier. On y apprend que la Syrie est « l’un des pays les plus sûrs du Moyen-Orient », où de plus, « les femmes gagnent autant que les hommes ». Pas très fier de ce panégyrique, le magazine édité par le groupe Condé-Nast a récemment retiré l’article, qui figurait encore sur son site web. Mais on peut encore le lire…sur celui du tyran de Damas, www.presidentassad.net. L’article y figure dans sa totalité, et l’on y apprend notamment qu’Asma al-Assad encourage les jeunes de son pays à s’engager dans une « citoyenneté active ». Cela ne s’invente pas. Cette caricature d’article de presse, très probablement suscité par une opération de relations publiques, aurait pu prêter à sourire dans d’autres circonstances. Ce n’est pas le cas. Asma el-Assad n’a pas renversé son destin : elle est et restera femme de dictateur.

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