Afrique du sud: l’avenir économique s’assombrit sur fond d’une profonde crise politique
L’Afrique du sud devra s’attendre à une aggravation de ses maux économiques et sociaux sur fond d’une crise politique qui ne donne aucun signe de s’estomper.
Dans un arrêt qualifié d’historique, la Cour a ordonné au président de rembourser une partie des frais dépensés pour la rénovation de sa résidence privée dans sa localité natal de Nkandla, au KwaZulu Natal. Elle a également estimé que M. Zuma n’a pas respecté la Constitution en refusant de rembourser à l’Etat les frais de rénovation de sa propriété privée.
M. Zuma, qui a longtemps nié toute irrégularité dans le financement public de ces travaux estimés à 16 millions de dollars, a fini par s’excuser vendredi dernier d’avoir eu recours aux fonds publics, reconnaissant par la même avoir commis une faute constitutionnelle. Il a également promis de se conformer à l’arrêt de la cour constitutionnelle et rembourser les frais engagés à titre privé.
Ces excuses n’ont pas aidé à apaiser la tension, une situation qui accentue les pressions sur l’ANC. Mardi, l’ANC a réussi à bloquer, au parlement qu’il domine largement, une motion de censure présentée par l’opposition pour faire tomber M. Zuma. Cependant, les partis de l’opposition et la société civile ont juré de poursuivre le combat pour destituer un président qu’ils ne considèrent plus apte pour diriger le pays.
Ce climat politique extrêmement tendu s’est répercuté négativement sur la devise sud-africaine, le rand, qui s’est de nouveau inscrit dans une tendance baissière par rapport au dollar américain. Ainsi, le billet bleu s’est échangé mardi et mercredi à plus de 15 rands. Selon les analystes de la place financière de Johannesburg, la nouvelle dégringolade de la monnaie sud-africaine est périlleuse, car intervenant dans une conjoncture politique et économique d’une gravité inquiétante.
Les entreprises sud-africaines devront faire face à des difficultés énormes pour survivre dans un environnement aussi défavorable, estime l’analyste Maarten Mittner. Cette situation se traduira par un affaiblissement des investissements et davantage de pertes de postes d’emploi, ajoute l’analyste. Ces contre-performances n’aideront en rien l’économie du pays, avertissent les économistes, qui n’écartent pas une nouvelle récession après celle de 2009, au regard de l’aggravation des freins à la croissance qui persistent depuis le début de 2015.
Des chiffres publiés récemment par le département sud-africain des statistiques ont montré que le ralentissement s’aggrave pour atteindre un niveau rappelant la récession de 2009. L’économie sud-africaine a réalisé un taux de croissance de 1,3 % sur toute l’année 2015 contre 1,5 une année auparavant. Cet affaiblissement est attribué, selon les analystes économiques, à la sécheresse qui affecte le pays, sabrant la production agricole et poussant le gouvernement à recourir à l’importation au moment où la devise nationale, le rand, n’arrive pas à se remettre face au dollar américain.
Les perspectives pour l’année 2016 ne sont pas plus encourageantes. Le Fonds monétaire international a en effet réduit de moitié les perspectives de croissance économique de l’Afrique, les ramenant à 0,7 %. La persistance des freins à la croissance, accentués par la crise politique régnante devra peser lourd dans l’analyse de la situation économique du pays par les agences de notation.
Les analystes sont unanimes que ces agences pourraient bien rétrograder la note de crédit du pays au niveau spéculatif, désignant les valeurs les plus risquées. Ces économistes estiment que l’Afrique du sud doit s’attendre au pire. Une équipe de l’agence Moody’s a récemment effectué une visite dans le pays dans le but de réévaluer son climat économique.
Le ministre sud-africain des Finances, Pravin Gordhan, a averti mardi que le climat politique sera pris en compte par les agences de notation dans le cadre de la révision de la note souveraine du pays. Les Sud-Africains doivent être conscients que les agences de notation regarderont la situation politique du pays dans le cadre de leur évaluation , a dit l’argentier sud-africain suite au vote au parlement sur une motion de censure contre le président Zuma.