Les députés vont débattre toute la semaine d’un projet de loi assez technique, dont la disposition-phare est la création d’un titre de séjour valable plusieurs années, pour éviter aux étrangers d’avoir à renouveler leurs papiers tous les ans.
Le gouvernement, qui appréhendait les postures sur ce sujet brûlant, avait présenté son texte en juillet 2014, juste avant les vacances parlementaires, et ne l’a finalement inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale qu’un an plus tard.
Malgré la torpeur estivale et l’absence de nombreux parlementaires, les échanges ont tourné à l’aigre dès lundi soir. A l’ouverture des débats, l’opposition a qualifié la politique d’immigration du gouvernement de "contraire à l’intérêt national". Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve, qui porte le texte, a répliqué en accusant la droite de "pure mauvaise foi".
Mardi, le député Guillaume Larrivé, du parti Les Républicains (LR) de l’ancien président Nicolas Sarkozy, a franchi un nouveau cap, taxant de "folie" une disposition facilitant l’octroi de la nationalité à un jeune arrivé en France avant ses six ans.
"M. Larrivé ne fait qu’agiter peurs et fantasmes", lui a rétorqué le député socialiste Erwan Binet, en regrettant que son collègue ait utilisé le terme "immigrationniste" cher à l’extrême droite.
Sur le fond, outre le titre de séjour pluriannuel, le projet de loi crée un titre "passeport talents" qui remplacera la multitude de titres existants pour les étrangers qualifiés ou ayant une compétence spécifique (artistes, sportifs, scientifiques…).
Contrepartie de ces mesures, le texte propose de renforcer la lutte contre la fraude en donnant la possibilité aux préfets d’obtenir des données des autres administrations et de certaines personnes privées (banques, etc).
Environ 2,5 millions d’étrangers hors Union européenne (60% venant d’Algérie, du Maroc, de Turquie et de Tunisie) disposent d’un titre de séjour en France. Celle-ci accueille environ 200.000 nouveaux immigrants réguliers chaque année.
Si les flux sont stables depuis une dizaine d’années, les Français manifestent une intolérance croissante à la présence des étrangers, selon tous les sondages. Dans les urnes, le parti d’extrême droite Front national (FN), qui dénonce une "immigration de masse", ne cesse de progresser. En avril 2014, il est arrivé en tête des élections européennes.