Yémen: second jour de raids saoudiens contre la rébellion chiite, 39 morts
Les raids aériens contre les rebelles chiites se sont étendus à plusieurs régions du Yémen vendredi, au second jour de l’opération militaire menée par l’Arabie saoudite qui cherche à stopper l’influence de l’Iran, son rival régional, à ses frontières.
Plusieurs pays occidentaux, en tête desquels les Etats-Unis, ainsi que la plupart des pays arabes ont serré les rangs derrière l’Arabie saoudite et réaffirmé leur soutien au président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi, arrivé jeudi à Ryad en route pour le sommet arabe qui s’ouvre samedi en Egypte.
L’intervention militaire a fait suite à des appels à l’aide du camp Hadi incapable de stopper l’offensive des Houthis qui ont réussi depuis septembre 2014 à prendre plusieurs régions du pays, dont la capitale Sanaa, et avançaient ces derniers jours vers Aden, la capitale du Sud où avait pris refuge le chef de l’Etat.
Vendredi avant l’aube, de nouvelles frappes de la coalition arabe ont visé des positions des Houthis dans la région d’Arhab au nord de Sanaa, faisant 12 morts parmi les civils, selon des responsables du ministère de la Santé contrôlé par les Houthis.
Depuis le début jeudi de l’opération "Tempête décisive", 39 civils au total ont péri dans les frappes, selon ces responsables. Il n’était pas possible de confirmer ce bilan de source indépendante.
De nombreux véhicules montés de canons de la DCA circulaient à Sanaa, mettant en danger la sécurité de la population, et des sources de sécurité ont fait état de huit civils blessés par l’explosion sur un marché d’un projectile de la DCA.
La veille au soir, de fortes explosions ont secoué la capitale, où la défense anti-aérienne à tiré après des frappes contre une base à l’entrée ouest de la capitale, ont indiqué des témoins. Les raids ont aussi visé une base militaire près de Taëz (sud) et la base aérienne d’Al-Anad.
– ‘L’Iran veut dominer la région’ –
Les premiers raids de l’opération "Tempête décisive" ont été qualifiés de "succès" par un porte-parole de la coalition à Ryad. Ces frappes se prolongeront jusqu’à ce que les "objectifs" soient atteints, a-t-il ajouté en écartant une offensive terrestre dans l’immédiat.
Dans une première réaction aux raids, le chef des rebelles, Abdel Malek al-Houthi, a condamné une "invasion" et averti que les "Yéménites ne vont pas rester sans réagir".
L’Iran a mis en garde contre une propagation du conflit, son président Hassan Rohani dénonçant une "agression" militaire.
"L’implication" iranienne au Yémen est ouvertement dénoncée par le royaume saoudien sunnite, alors que Téhéran n’a jamais confirmé aider les Houthis par ailleurs appuyés par des soldats restés fidèles au prédécesseur de M. Hadi, Ali Abdallah Saleh.
"Les Iraniens sont ceux qui s’ingèrent dans les affaires des pays arabes, que ce soit au Liban, en Syrie, en Irak, et au Yémen, ce que nous ne pouvons pas tolérer", a déclaré l’ambassadeur saoudien à Washington, Adel al-Jubeir, sur Fox News.
"Nous devons faire face à l’agression de l’Iran dans la région. Nous nous opposons à leur soutien aux Houthis et à la tentative des Houthis de s’emparer du Yémen", a-t-il ajouté. "C’est très évident qu’ils (les Iraniens) veulent dominer la région".
En pleines négociations sur le nucléaire avec Téhéran, les Etats-Unis ont exprimé leur appui à l’intervention saoudienne et annoncé "un soutien logistique et de renseignement" avec notamment des avions ravitailleurs et des avions radars Awacs.
La Maison Blanche s’est déclarée elle aussi inquiète des "activités iraniennes" au Yémen, parlant d’informations sur "le transfert iranien d’armes" dans ce pays.
– ‘Favoriser les radicaux’ sunnites –
L’Arabie saoudite, qui a une longue frontière avec le Yémen, a mobilisé 150.000 militaires et 100 avions de combat, tandis que les Emirats arabes unis ont engagé 30 avions de combat, Koweït 15 appareils et le Qatar 10, a indiqué Al-Arabiya, chaîne de télévision à capitaux saoudiens. Bahreïn participe avec 12 avions.
L’opération mobilise également l’Egypte -avec son aviation et sa marine-, la Jordanie, le Soudan, et le Maroc, selon Ryad.
Selon les experts, les raids aériens pourraient avoir des résultats limités sans une intervention terrestre qui reste peu probable en raison des risques d’escalade avec Téhéran et d’enlisement.
De plus pour John Marks, expert du Moyen-Orient à l’institut Chatham House, "se contenter d’écraser les Houthis changera certes la dynamique des factions", compliquée au Yémen, mais cela pourrait "favoriser des groupes ultra-radicaux sunnites".
Il faisait allusion aux réseaux Al-Qaïda, implanté dans le sud-est du pays, et Etat islamique (EI) qui a revendiqué ses premières attaques meurtrières la semaine dernière à Sanaa.