La prière d’un enfant marocain brutalisé qui a secoué la Suède
L’imploration d’un migrant marocain de neuf ans dont un agent de sécurité tape la tête contre un sol en grès a secoué la Suède, pays qui accueille des milliers d’enfants réfugiés esseulés.
Un témoin anonyme de la scène a affirmé au quotidien de la ville, Sydsvenskan, que les images ne rendaient pas toute la violence de cette interpellation. "On ne peut pas ressentir ce que font les cris du garçon implorant à l’aide, sa prière et le bruit sourd de son crâne contre le sol en pierre", a-t-il écrit dans un long récit.
La police enquête sur cet agent de sécurité, qui a été suspendu. Il avait interpellé le garçon parce qu’il avait pris le train sans billet.
Son comportement a été largement condamné dans un pays qui non seulement fut le premier à interdire les châtiments corporels, mais se targue aussi d’une politique d’accueil parmi les plus généreuses d’Europe.
"Est-ce qu’une petite tête blonde aurait été cognée contre le sol?", s’est interrogé l’éditorialiste d’Expressen Lars Lindström. L’écrivain Jonas Gardell a ému ses lecteurs avec un parallèle entre ce garçon marocain et sa fille, qui a le même âge.
Après l’incident, l’enfant a été ramené au foyer où il avait été placé à son arrivée en Suède. Puis il l’a fui avec un autre garçon âgé de 12 ans, présenté dans les médias comme son demi-frère.
Après plusieurs jours sans nouvelles, vendredi il a été retrouvé par des policiers dans le pays voisin, le Danemark. "Le garçon de neuf ans a été retrouvé dans la région du Jutland", soit à plus de 200 km de Malmö, a déclaré à l’AFP Mats Karlsson, de la police suédoise.
Celle-ci avait présenté ses excuses jeudi pour avoir minimisé la disparition.
7.000 enfants en un an
Des commentaires négligents de policiers dans les médias, comme "il s’est envolé comme un chèque", ont été durement critiqués, de même que la réticence initiale à faire un signalement à tous les commissariats du pays.
Plus d’un tiers des 315.000 habitants de Malmö, troisième ville de Suède, sont immigrés, et l’importante communauté musulmane ne cesse de grandir avec l’arrivée de Syriens et d’Irakiens.
La région autour de ce port muticulturel est cependant le fief du parti anti-immigration des Démocrates de Suède, et plusieurs enquêtes ont montré que les jeunes du Sud du pays avaient généralement une vision plus négative des immigrés que le reste du territoire.
La police de Malmö n’en est pas à sa première polémique. En 2008, lorsque s’était embrasé le quartier de Rosengård, celui où a grandi le footballeur Zlatan Ibrahimovic, un policier avait été filmé en train de proférer des insultes racistes, comparant un jeune à un singe.
Des termes péjoratifs pour les Noirs ont été employés pour désigner les délinquants lors d’entraînements des forces de l’ordre.
La Suède accueille un contingent record d’enfants réfugiés sans leurs parents en Europe: 7.000 sont entrés sur son sol en 2014, un nombre plus que décuplé en une décennie.
Le ras-le-bol d’une partie de l’électorat face aux réfugiés, dans le pays européen qui en reçoit aujourd’hui le plus grand nombre par rapport à la population, est le thème de prédilection des Démocrates de Suède, devenus en 2014 le troisième parti du pays avec 12,9% aux législatives.