Israël se recueille sur la dépouille de Peres et prépare l’accueil des leaders de la planète
Le peuple israélien se recueille jeudi sur la dépouille de Shimon Peres et se prépare à recevoir vendredi les dirigeants de la planète aux obsèques de cette grande figure historique.
Israël n’a pas connu de tel évènement au moins depuis les funérailles en 1995 d’Yitzhak Rabin, l’ancien rival et Premier ministre assassiné, qui avait été récompensé en même temps que Shimon Peres et le leader palestinien Yasser Arafat du Nobel de la paix en 1994.
Jérusalem était déjà en état de siège jeudi matin alors que commençait l’hommage populaire à celui que tout le monde appelait Shimon et dont l’image était intimement associée à l’ascension d’Israël, de la naissance au statut de puissance régionale.
Le cercueil ceint du drapeau bleu et blanc frappé de la croix de David a été solennellement disposé sur le parvis de la Knesset (parlement) pour que les Israéliens viennent lui rendre leurs derniers adieux.
Dans un pays constamment confronté aux défis sécuritaires, 7.000 policiers ont été mobilisés pour ces deux jours de deuil.
Toutes les routes menant à la Knesset devaient être fermées, des navettes assurant le transport de ceux venant se recueillir. Avec l’arrivée des dirigeants étrangers vendredi, le mont Herzl sur lequel Shimon Peres sera enterré, ainsi qu’une grande partie de Jérusalem devraient être largement coupés du monde.
L’autoroute reliant Jérusalem et Tel-Aviv, la capitale économique, sera coupée par intermittences pour acheminer les chefs d’Etat et de gouvernement.
Ces obsèques coïncident avec le début des congés des grandes fêtes juives qui font redouter aux autorités israéliennes un accès de violences palestiniennes.
M. Peres s’est éteint mercredi matin dans son sommeil à l’âge de 93 ans à l’hôpital, des suites d’un accident vasculaire cérébral qui l’avait frappé le 13 septembre, jour anniversaire des accords d’Oslo. Il n’était jamais sorti de son sommeil.
Il n’était pas seulement le dernier survivant des trois récipiendaires du Nobel de la paix 1994 récompensant leurs "efforts en faveur de la paix au Moyen-Orient", concrétisés un an plus tôt par le premier accord d’Oslo. Ce dernier jetait les bases d’une autonomie palestinienne et offrait un espoir de règlement du conflit.
Il était aussi aux yeux des Israéliens le dernier survivant de la génération des pères fondateurs de l’Etat d’Israël.
Les marques de l’immense respect qu’inspirait M. Peres ont afflué du monde entier, saluant la vision, le courage ou la ténacité dans la recherche de la paix de celui que beaucoup de dirigeants étrangers appelaient leur "ami".
Les présidents américain, français, allemand ou polonais, l’ancien président américain Bill Clinton (mais pas son épouse en pleine campagne), le prince Charles, le roi d’Espagne Felipe VI et des dizaines de personnalités sont attendus à l’enterrement. Aucune présence de dirigeants d’importants pays du Moyen-Orient n’avait été officialisée.
M. Peres était de ces personnes "qui changent le cours de l’histoire humaine", a dit le président américain Barack Obama. Un "génie au grand coeur" pour M. Clinton, qui présida à la fameuse signature de l’accord de 1993 et à la poignée de main des anciens ennemis, Peres, Rabin et Arafat.
Le pape a exprimé sa "profonde tristesse" et espéré que son "héritage" sera respecté, au moment où les perspectives de règlement du conflit israélo-palestinien ont rarement été plus sombres.
M. Obama a ordonné que les drapeaux soient mis en berne jusqu’à vendredi soir sur la Maison Blanche, ainsi que tous les bâtiments officiels et militaires américains dans le pays et à l’étranger.
Après avoir été toute sa vie au coeur des grandes batailles de la courte histoire d’Israël et des farouches controverses du monde politique israélien, M. Peres était devenu dans son pays aussi une personnalité largement consensuelle, considérée comme un sage de la nation.
Entré en politique à 25 ans grâce à David Ben Gourion, fondateur d’Israël, M. Peres était l’un des architectes du programme nucléaire d’Israël, considéré comme la seule puissance atomique militaire du Moyen-Orient.
Premier ministre à deux reprises (1984-1986 et 1995-1996) puis président de 2007 à 2014, le travailliste Shimon Peres avait occupé pendant plus de 50 ans de vie publique de nombreux postes de responsabilité: Défense, Affaires étrangères, Finances…
Malgré les accords d’Oslo et la conversion à la paix de cet ancien faucon, les Palestiniens ont une image bien plus sombre de l’homme qui a cautionné les premières colonies juives de Cisjordanie occupée et qui était Premier ministre quand l’aviation israélienne a bombardé le village libanais de Cana, tuant 106 civils en avril 1996.
M. Peres reposera au mont Herzl au côté de M. Rabin.
Source AFP