Le coronavirus a fait fuir tous les employés ou presque au siège de l’ONU. Mais pas leur chef, Antonio Guterres, qui refuse toute fermeture et assure que le Conseil de sécurité continue de fonctionner même sans s’y retrouver physiquement.
« Je suis très fier parce que même dans ces circonstances très difficiles, l’ONU partout dans le monde reste ouverte pour travailler auprès des Etats membres ayant besoin de notre soutien et aider les gens les plus vulnérables », a-t-il souligné jeudi lors de sa première conférence de presse par vidéo depuis le début de la pandémie.
Entouré d’une poignée de conseillers, le secrétaire général, dont le vaste bureau au 38e et dernier étage de l’immeuble de verre donne sur l’East River, se targue de multiplier réunions « virtuelles » et appels téléphoniques, notamment pour appeler à la « solidarité » et éviter des « millions » de morts.
« Aujourd’hui, j’ai eu une réunion avec les 140 résidents-coordonnateurs de l’ONU déployés dans le monde. Tous les jours, je suis en contact avec une dizaine de missions », explique l’ancien Premier ministre portugais, alors que les Nations unies gèrent 100.000 Casques bleus dans une quinzaine d’opérations, sans parler des missions politiques.
A ce jour, l’ONU à New York déplore officiellement quatre cas positifs au Covid-19. Une diplomate des Philippines, un membre du secrétariat (3.000 employés), un journaliste accrédité et un fonctionnaire de l’Agence pour l’enfance Unicef située dans le quartier.
Du côté de l’Assemblée générale de l’ONU (193 Etats) et du Conseil de sécurité (15 membres), tout le monde s’est mis à l’abri chez lui.
« Le télétravail est généralisé », confirme un diplomate. A New York, si le confinement n’est que préconisé, la ville tourne déjà au ralenti, sans être encore une cité-fantôme.
Fait du hasard, la Chine, où a été décelé pour la première fois le virus, assure en mars la présidence tournante du Conseil de sécurité. Elle a annulé toutes les réunions cette semaine et devrait faire de même la semaine prochaine alors que des sessions étaient prévues sur la République démocratique du Congo, la Syrie, le Proche-Orient, l’Afghanistan et la Libye.
Selon des diplomates, une seule réunion devrait se tenir jeudi, pour adopter des mandats arrivant à échéance, mais sans changement de contenu majeur.
– Virtuel ou physique ? –
La mission en Somalie va être renouvelée pour trois mois et celle des experts chargés des sanctions imposées à la Corée du Nord pour un an. L’opération au Darfour (Soudan), qui devait engager un retrait graduel des Casques bleus pour laisser place en octobre à une mission politique, va être prolongée jusqu’à fin mai sans modification, ont indiqué à l’AFP les mêmes sources sous couvert d’anonymat.
Reste à savoir si cette triple adoption de résolutions se déroulera lors d’une réunion « virtuelle » ou « physique ». La Russie « bloque » car elle ne veut pas de « virtuel », précise un diplomate.
Mais « tout le monde va se heurter au principe de réalité », ajoute-t-il, en soulignant qu’une réunion du Conseil de sécurité au siège de l’ONU, même réduite, implique la venue de dizaines de personnes, sans parler de la sécurité ou des équipes de nettoyage.
Sans évoquer cette énième division du Conseil de sécurité ni préciser sa pensée, Antonio Guterres a affirmé jeudi que « dans certaines circonstances, une présence physique était nécessaire, dans d’autres non ».
« Nous avons réuni toutes les conditions pour permettre des réunions virtuelles avec autant de monde que nécessaire », a-t-il dit.
En début de semaine dernière, un premier essai de réunion par vidéo s’était soldé par une « faillite technique », selon un ambassadeur. Depuis, « ca marche de mieux en mieux », assure un diplomate.
Au quotidien, la visio-conférence a été adoptée unanimement par les experts des missions pour discuter des textes (déclarations, projets de résolution…) comme par les ambassadeurs.
« Tout le monde reste connecté, le Conseil de sécurité continue de travailler même si c’est moins visible », se félicite un diplomate.