Ce scénario qui est en train de s’installer dans la durée est le pire cauchemar de Nicolas Sarkozy, l’initiateur en chef des frappes internationales contre la Libye. Pour convaincre ses partenaires européens et arabes de le suivre dans cette aventure militaire, le président français leur avait vendu l’idée d’une intervention aussi brève qu’efficace. Un tapis de bombes ciblé, une mise sous embargo de l’ensemble du territoire libyen finirait par faire craquer le régime vieillissant de Mouammar Kadhafi dont les faiblesses criantes ont été largement exposées par une opposition à l’affût de la moindre occasion d’abattre le maître de Tripoli.
Sauf que le cours des événements n’a pas suivi la ligne espérée. Les frappes ont montré leurs limites. Quand elles ne ratent pas leurs cibles prioritaires, elle provoquent de redoutables dommages collatéraux qui les rendent encore plus impopulaires et renforcent la capacité de feu et la mobilisation autour de Kadhafi, l’homme programmé à abattre.
Devant cette situation, de nombreuses voix et non des moindres se sont élevées pour réclamer l’envoi des forces spéciales sur le territoire libyen. Un homme comme Axel Poniatowski, le président de la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale l’a exprimé publiquement. Il ne faisait que relayer les inquiétudes de Gérard Longuet, ministre de la défense de voir ce conflit durer.
Signe que cette proposition dérange au plus haut point, le ministre français des affaires étrangères Alain Juppé s’est dit tout à fait hostile à l’envoi de troupes au sol pour combattre aux cotés des rebelles libyens et François Fillon, Premier ministre ne voit d’autres solutions que d’intensifier les frappes aériennes.
Il faut dire que faute d’avoir pu convaincre un proche de Kadhafi de monter un putsch de délivrance ou d’avoir pu cibler une résidence de Mouammar Kadhafi, Nicolas Sarkozy, inspirateur de la coalition militaire n’a que deux choix pour espérer mettre fin à ce conflit et éloigner le spectre de l’enlisement. Le premier est de mettre des troupes au sol, ce qui contredit ouvertement l’esprit de la résolution 1973 qui autorise cette opération. La seconde est d’armer les rebelles dont le chef du conseil de transition libyen (CNT) Mustapha Abdeljalil a été reçu a l’Elysée.
Cette seconde hypothèse ne soulève guère d’enthousiasme. Si la coalition connaît très bien l’identité de l’homme à faire tomber, Mouammar Kadhafi, elle ignore jusqu’à présent l’identité de l’alternative à mettre en place. Le fameux CNT n’a été reconnu jusqu’à présent que par La France, l’Italie et le Qatar. Livrer des armes aux rebelles du CNT est une opération délicate sur le plan sécuritaire surtout dans une région où les opérationnels d’Al Qaida sont aux aguets. A l’impossibilité d’envoyer des troupes au sol s’ajoute la difficulté d’armer convenablement les rebelles… Les ingrédients d’un enlisement sont là.