Trois enquêtes, un avertissement. Sans candidat désigné pour 2012, les socialistes sont du pain bénit pour les instituts de sondages. Ils sont obligés de réaliser plusieurs enquêtes pour tester tous les prétendants: Dominique Strauss-Kahn, Martine Aubry, François Hollande, pour citer ceux choisis par Harris interactive pour Le Parisien. On aurait pu (du) ajouter Ségolène Royal. «Aucune importance», répond-on dans l’entourage de la présidente Poitou-Charentes. Elle est sans doute satisfaite de ne pas entrer dans la comparaison. En effet, les résultats ont au moins un point commun: les trois enquêtes parues entre dimanche et mardi ont montré que le candidat PS, quel qu’il soit, serait devancé par la présidente du FN Marine Le Pen.
Certes, l’étude Harris Interactive est à prendre avec précaution tant qu’elle n’est pas corroborée par d’autres instituts. Mais les socialistes commencent à s’alarmer de leur propre manque de clarté. Et si l’absence de candidat identifié favorisait la percée de l’extrême droite? Les primaires de désignation du candidat ne commenceront officiellement que le 28 juin avec le dépôt des candidatures. Mais pour l’instant, les intentions des deux favoris Dominique Strauss-Kahn et Martine Aubry demeurent inconnues… Les deux semblent se préparer. La bataille qui s’annonce entre les quatre inquiète: les électeurs ont-ils envie de ce spectacle-là? Pour les socialistes, comme le dit le maire de Paris Bertrand Delanoë, les sondages sont «un avertissement pour chacune de nos consciences».
La question du calendrier
Mais si chacun prône l’union, chacun veut rassembler à sa façon. Les partisans de Dominique Strauss-Kahn, le favori jusqu’à présent, plaident plus que jamais pour un rassemblement autour de leur champion. «En soi, les primaires sont excellentes, mais si ce qui est perçu, ce ne sont que des divisions, alors il y a des correctifs à apporter», estime François Kalfon, le spécialiste des sondages au PS. «Il faut un mode de désignation qui soit au niveau des préoccupations des Français, dit-il, pas de nombrilisme.»
Invité mardi du «Talk Orange-Le Figaro», le sénateur maire de Lyon Gérard Collomb a souhaité que les primaires confirment un favori plutôt que départagent des prétendants. Pour ce qui le concerne: DSK. «Les primaires peuvent permettre le rassemblement de tous les socialistes», a-t-il expliqué. Gérard Collomb espère que Royal et Hollande retireront leurs candidatures. Il compte aussi sur le ralliement d’Aubry.
Que tous les autres candidats renoncent, c’est le rêve des strauss-kahniens. Aujourd’hui, la réalité est différente. «En politique, il faut de la cohérence», rétorque le député européen Stéphane Le Foll, le bras droit de François Hollande. «Ceux qui ont voulu des primaires ne peuvent pas nous dire maintenant qu’il n’y en a plus! Ce n’est pas sérieux. Mais s’il y un truc sur lequel on veut réfléchir, il y a le calendrier.» Accélérer le choix du candidat, c’est la proposition des hollandais pour répondre à l’attente de l’électorat plus vite. «Tant qu’on sera dans le flou général, on sera dans le flou général», poursuit-il. Sans candidat et donc sans projet identifié, le PS ne pourrait être audible. Pour François Hollande, avoir un candidat c’est pouvoir proposer «peut-être une candidature commune» à gauche ensuite.
Ségolène Royal non plus n’a jamais cru dans le calendrier retenu par le PS. «La meilleure riposte c’est que la gauche ait enfin un projet et un candidat. Hélas le calendrier des appareils et l’impatience du peuple ne vont pas de pair. J’avais dit que tout cela devait être prêt avant l’été sinon ce serait un boulevard pour d’autres», explique-t-elle dans un message sur Internet. Mais pour autant, les royalistes ne veulent pas rouvrir le débat de la date de la désignation. «Est-ce qu’on répond aux exigences des Français par un calendrier ou sur le fond? Sur le fond!», explique son porte-parole Guillaume Garot.
Martine Aubry et Ségolène Royal partagent la même préoccupation: avoir du temps pour se préparer à la campagne. La première secrétaire s’est fixée une échéance principale: le projet du PS qui doit être finalisé en mai. Un moment de clarification pour elle. Hors de question de toucher aux primaires ensuite. «Les Français sont attachés à la démocratie», analyse un partisan d’Aubry. «Ils voudront avoir le choix.» Pour qu’ils aient le choix, elle cultive sa spécificité. Demain, elle reçoit à Lille l’auteur d’Indignez-vous, Stéphane Hessel, l’un des plus gros succès de librairie du moment.