Polygamie en série dans le gouvernement marocain
Cette fois, c’est officiel. Le ministre marocain des relations avec le Parlement, Lahbib Choubani, convolera bientôt en secondes noces avec sa collègue ministre déléguée auprès du ministre de l’enseignement supérieur, Soumia Benkhaldoun. « En secondes noces », non parce que M. Choubani a divorcé ou est veuf, mais parce qu’il est déjà marié.
L’affaire défrayait la chronique depuis des mois, la rumeur enflant sur l’existence d’une idylle entre ces deux membres du gouvernement du Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste) au pouvoir. Début avril, le secrétaire général du parti de l’Istiqlal, Hamid Chabat, dans l’opposition, avait publiquement évoqué l’affaire.
« Le problème ? », soulignait le 15 avril l’agence de presse espagnole EFE : « Benkhaldoun était mariée et venait de divorcer, et certains, dont le secrétaire général du parti de l’Istiqlal, Hamid Chabat, ont trouvé des munitions politiques avec cette affaire, traitant même Choubani de “coureur de jupons” et de “briseur de ménage”. » M. Chabat accusait M. Choubani d’avoir séduit sa collègue alors qu’elle était encore mariée.
Au-delà de cet étonnant feuilleton sentimental, l’affaire a relancé l’épineux débat sur la polygamie au Maroc, officiellement peu répandue, mais toujours légale (jusqu’à quatre femmes). Depuis la réforme du code de la famille (la Moudawana), en 2004, les conditions ont été durcies : l’homme doit notamment obtenir l’autorisation d’un tribunal, mais aussi de sa première épouse, pour prendre une nouvelle femme. Selon les chiffres du ministère de la justice, les mariages polygames n’ont représenté que 0,26 % de toutes les unions célébrées en 2013, soit moins de 800.
« Dans le gouvernement marocain, le pourcentage monte à 6 % », notait non sans ironie l’agence EFE. Il s’agit en effet du deuxième ministre polygame au sein du gouvernement islamiste modéré PJD, le ministre de la justice, Mustafa Ramid, ayant également deux épouses. Pas de quoi améliorer les relations entre le gouvernement et les associations de défense des droits des femmes, qui militent pour l’interdiction de la polygamie. En 2014, le premier ministre, Abdelilah Benkirane, s’était attiré les foudres des militantes en louant « le rôle sacré » de la femme dans les foyers, les comparant à des « lustres » illuminant nos maisons.