Palestiniens: le président Abbas se prépare à serrer encore la vis au Hamas

Les vieilles querelles entre organisations palestiniennes menacent de s’aviver encore, le président Mahmoud Abbas se préparant à prendre contre le Hamas des mesures qui font craindre des tensions renouvelées dans la bande de Gaza sous contrôle du mouvement islamiste.

Le Hamas et le Fatah, parti qui domine l’Autorité palestinienne établie en Cisjordanie occupée et présidée par M. Abbas, ont tenté à plusieurs reprises de se réconcilier après que le mouvement islamiste eut pris le pouvoir à Gaza au prix d’une quasi guerre civile en 2007.

La dernière tentative de raccommodage, sous l’égide de l’Egypte, date de fin 2017. Les deux camps avaient alors accepté de partager le pouvoir et le Hamas consentait à céder à l’Autorité le contrôle des points de passage séparant Gaza de l’Egypte et d’Israël. Mais l’accord a fait long feu, les deux parties se rejetant la responsabilité de l’échec.

Dimanche dernier, l’Autorité a annoncé son retrait du poste-frontière avec l’Egypte, créant un dilemme pour le Caire quant à l’opportunité de laisser la voie ouverte avec le Hamas aux commandes côté gazaoui. Pour l’instant, l’Egypte laisse seulement passer les Palestiniens dans un sens, celui du retour vers Gaza.

Depuis des mois, M. Abbas a infligé de sévères mesures de rétorsion au Hamas, notamment pour l’épuiser financièrement. De nouvelles vont venir, disent des proches du président de l’Autorité.

"Des décisions très importantes contre le Hamas sont en cours de discussion", dit à l’AFP un haut responsable sous couvert d’anonymat.
"La responsabilité de gouverner"

Selon ce responsable, l’Autorité palestinienne dépense environ 100 millions de dollars par mois à Gaza, notamment pour subventionner l’approvisionnement en électricité, et envisage de réduire considérablement ses dépenses. "Ceux qui veulent gouverner Gaza doivent assumer la responsabilité de le gouverner", déclare-t-il.

L’Autorité pourrait aussi, après la frontière avec l’Egypte, retirer son personnel des points de passage avec Israël, disent des proches de M. Abbas.

Israël serait alors confronté à la difficile décision de fermer les points de passage, au risque de la suffocation de Gaza, ou de les faire fonctionner avec le Hamas, considéré comme une organisation terroriste par l’Etat hébreu, les Etats-Unis et l’Union européenne.

Les mesures contre le Hamas pourraient aussi inclure la réduction des salaires des familles des prisonniers du Hamas ou l’annulation des passeports palestiniens des employés du Hamas, selon les mêmes sources.

M. Abbas a déjà annoncé son intention de dissoudre le Parlement palestinien dominé par le Hamas. Cette assemblée ne s’est pas réunie depuis la scission de 2007, mais représente toujours formellement le lieu de l’activité législative.

Bassem Naim, un haut responsable du Hamas, a dit être familier de telles menaces.

L’intérêt de Netanyahu

"Tout type de sanction telle que (cesser de payer) l’électricité, bloquer (l’acheminement des) médicaments, fermer la frontière ou réduire les salaires est destiné à faire pression sur les habitants pour qu’ils se soulèvent contre le Hamas, et c’est voué à l’échec", a-t-il déclaré à l’AFP.

Les Palestiniens sont soumis à rude épreuve par les politiques du président américain Donald Trump qui présente lui-même son administration comme la plus pro-israélienne de l’histoire du pays.

Pour sa part, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu poursuit la colonisation en Cisjordanie. Le dialogue en vue d’un règlement politique israélo-palestinien est rompu depuis 2014.

La division croissante entre les organisations palestiniennes affaiblit encore leurs positions face à de telles pressions, estime Hugh Lovatt, du European Council on Foreign Relations.

Le retrait de l’Autorité palestinienne des points de passage "n’est pas irréversible, mais c’est certainement une mesure très négative. C’est une stratégie à court terme qui triomphe d’une stratégie à plus long terme", juge-t-il.

Pour Nadia Hijab, présidente du groupe de réflexion palestinien Al-Shabaka, les Palestiniens craignent que cette décision "ne renforce la division et ne mène à une rupture complète entre Gaza et la Cisjordanie, ce que recherche Israël".

Israël et le Hamas ont frôlé une nouvelle guerre dans la bande de Gaza en 2018. Si la pression financière s’accroît sur le Hamas, "vous verrez presque à coup sûr le Hamas augmenter les tensions à la frontière avec Israël", prédit M. Lovatt.

Israël et le Hamas se sont livré trois guerres à Gaza depuis 2008.

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