Libye: désaccord au sein de l’UE sur les moyens pour contrôler l’embargo
L’Union européenne ne sera pas en mesure lundi d’aboutir à un accord pour reprendre l’opération navale Sophia avec un objectif limité au contrôle de l’embargo de l’ONU sur les armes à destination de la Libye, en raison de l’opposition de l’Autriche, a reconnu le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell.
« Je ne pense pas que nous soyons en mesure de faire cela », a-t-il déclaré aux journalistes peu avant une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’UE à Bruxelles.
« L’unanimité est nécessaire », a-t-il rappelé, pour reprendre cette opération que l’UE avait décidée en 2015 au plus fort de la crise des réfugiés, à la fois pour lutter contre les trafiquants d’êtres humains et contrôler le respect de l’embargo de l’ONU sur les armes à destination de la Libye.
« Si nous ne l’obtenons pas, nous ne pouvons pas aller de l’avant », a-t-il souligné.
Le mandat de Sophia a été prolongé jusqu’au 31 mars 2020, mais elle n’est plus opérationnelle en mer. Les Etats membres ont retiré leurs navires à cause du refus de l’Italie de laisser débarquer sur son territoire les migrants sauvés en mer faute d’accord entre les Etats de l’UE pour les prendre en charge.
L’Autriche voit dans l’opération Sophia « un billet d’entrée en Europe pour des milliers de migrants clandestins » et refuse donc de donner son accord au retour des navires européens dans la zone.
« L’opération Sophia n’est plus. Nous avons besoin d’une opération militaire, pas d’une opération humanitaire », a déclaré le ministre des Affaires étrangères Alexander Schallenberg à son arrivée à Bruxelles.
« Il n’y a pas d’attitude de blocage, mais nous sommes au début d’un processus de négociation et de discussion très sérieux », a-t-il soutenu.
« Nous avons besoin d’une véritable mise en oeuvre de l’embargo et de mon point de vue, l’opération Sophia n’était pas la bonne approche. Quelque chose de nouveau doit arriver’, a-t-il argumenté.
« Il y a un débat aujourd’hui, nous n’avons pas l’intention de prendre des décisions », a-t-il confirmé.
« Ceux qui pensent avant tout aux questions de migration doivent être conscients que les problèmes de migration ne peuvent être résolus que si la Libye ne demeure pas un État en faillite », a averti le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas.
Josep Borrell a insisté sur l’urgence pour l’UE d’agir. « L’émissaire de l’ONU pour la Libye Ghassan Salamé nous a avertis que la situation était très mauvaise sur le terrain avec de nombreuses violations du cessez-le-feu ».
L’Autriche n’est pas le seul pays à bloquer. « Lorsque vous approchez de la décision finale, beaucoup d’autres ont une certaine réticence », a souligné Josep Borrell.
« Si nous ne pouvons pas nous entendre aujourd’hui, nous tenterons de le faire lors du prochain conseil » des ministres des Affaires étrangères prévu le 23 mars à Bruxelles, a-t-il déclaré.
Le ministre des Affaires du Luxembourg Jean Asselborn veut croire en un changement de position à Vienne où le chancelier Sebastian Kurz est en coalition avec les Verts pour gouverner.
« Je ne peux pas imaginer qu’un pays comme l’Autriche dise non en fin de compte », a-t-il déclaré. « Je comprends que l’Europe ne soit parfois pas capable de faire de la politique mondiale, mais elle doit être capable de faire de la politique européenne », a-t-il ajouté.